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Une année 2022 compliquée pour les AOP laitières

Hubert Dubien, président du Cnaol, brosse les difficultés que pose la météo extrême de cette année pour les AOP laitières.

À cause des conditions climatiques chaudes et sèches, combien d’AOP ont dû demander une dérogation provisoire à leur cahier des charges ?

Hubert Dubien - Le climat de cette année conduit de nombreuses AOP laitières – près de la moitié des 51 AOP – à demander une modification temporaire de leur cahier des charges à l’Inao (1). Début octobre, elles étaient douze à l’avoir obtenu : saint-nectaire, banon, bleu du Vercors-Sassenage, abondance, beaufort, reblochon, tome des Bauges, fourme de Montbrison, laguiole, cantal, salers et beurre Charentes-Poitou. Le saint-nectaire, en plus d’être touché par la chaleur et la sécheresse a subi des dégâts très importants de rats taupiers.

Sur quoi portent ces demandes de modification ?

H. D. : Les demandes concernent la durée de pâturage. Lorsque les prairies ont eu du mal à démarrer au printemps ou qu’elles ont été grillées tôt dès juin et qu’ensuite la fin de saison ne permet plus de pâturer. Par exemple, en fourme de Montbrison, nous ne pouvons pas garantir les 150 jours minimum de pâturage. Nous ne pouvons nous engager que sur 120 jours cette année.

Avec les maïs de mauvaise qualité et le déficit d’herbe récoltée, il faut acheter davantage de fourrage, et parfois en chercher en dehors de la zone. C’est le second type de demande de dérogation : abaisser l’exigence de fourrages venant de la zone d’appellation. La troisième demande est de pouvoir amener davantage de concentrés que le plafond autorisé.

Ces demandes sont là pour éviter que les élevages décapitalisent et qu’il y ait alors un déséquilibre des filières AOP. Elles sont en place jusqu’à la reprise du pâturage.

Avec le changement climatique, comment les AOP peuvent-elles s’adapter de façon durable ?

H. D. : Les AOP nouvellement confrontées à ces épisodes climatiques extrêmes s’appuient sur l’expérience des autres AOP. Par exemple, une ODG peut recenser tous les détenteurs de surface de la zone et se mettre en contact avec eux. Sur la fourme de Montbrison cela a bien fonctionné, les exploitants de surface ont apprécié d’aider une filière de leur territoire, plutôt que de vendre hors zone.

Il faut aussi être à l’affût de nouvelles solutions techniques et les partager entre AOP. Sur la zone de Montbrison, nous testons une machine créée par un lycée agricole pour récolter les semences originelles des prairies permanentes, en vue de sursemer les prairies fatiguées.

À plus long terme, des AOP demandent aux Safer de leur communiquer en priorité les parcelles disponibles sur la zone d’appellation. Enfin, la démarche AOP laitières durables apporte des réponses. Il faut accélérer sur ce travail.

Où en est cette démarche AOP laitières durables ?

H. D. : Aujourd’hui, 45 AOP ont déposé des engagements pour travailler l’évolution de leur cahier des charges. Il faut à présent trouver collectivement les bons indicateurs et estimer leurs impacts. Par exemple : faut-il limiter la production par vache et/ou par hectare, avec quel impact ? L’objectif est d’être prêts en 2025, pour présenter de nouveaux cahiers des charges en 2030.

(1) Institut national de l’origine et de la qualité.

À retenir

Les défis se multiplient pour les AOP : pression foncière, renouvellement des générations, difficultés à recruter, inflation et baisse du pouvoir d’achat des consommateurs, sécheresse et bouleversements climatiques.

Impact de la baisse de pouvoir d’achat

La baisse de la collecte laitière due à la météo (chiffres encore non consolidés) et aux intrants très onéreux, intervient dans un contexte où le consommateur fait attention à ses dépenses et peut réduire ses achats plaisir. « Les premières tendances de l’année montrent une consommation en léger retrait », pointe le Cnaol. « Entre baisse des fabrications et baisse de la consommation, le marché pourrait s’équilibrer », espère Hubert Dubien.

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