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Mon groupe tracteur en Cuma est dissous, que faire ?

La FRCuma des Hauts-de-France illustre la différence de coût de revient entre un tracteur en propre et un tracteur en Cuma, à partir d’un cas réel.

Le tracteur est le matériel le plus difficile à mettre en Cuma et les groupes tracteurs sont les plus durs à pérenniser. Car pour qu’un groupe tracteur fonctionne bien, il faut organiser le travail en commun, des chantiers en commun, avec le ou les tracteurs et le reste du matériel", plante Mathilde Capet, ingénieure animatrice à la FRCuma des Hauts-de-France. Quand l’organisation n’est pas au rendez-vous, les éleveurs utilisent moins le tracteur, qui coûte du coup plus cher à ceux qui s’en servent. "Et dès que les gens estiment qu’ils ont les moyens de s’offrir leur propre tracteur, ils le font, mettant en difficulté les autres adhérents, qui supportent du coup un prix trop élevé car le tracteur ne fait plus assez d’heures. Résultat des courses, des tracteurs finissent par disparaître des Cuma."

Pourtant, l’intérêt économique d’un tracteur de forte puissance partagé est très significatif par rapport à un tracteur en pleine propriété. "Le collectif quel qu’il soit — co-propriété, Cuma, ETA — permet de diluer les charges d’investissement, d’assurance et d’entretien d’un matériel", rappelle Mathilde Capet.

La FRCuma s’est livrée à une simulation à partir d’un cas réel pour appuyer son argumentaire. Une exploitation spécialisée en lait adhère à un groupe tracteur en Cuma. Malheureusement, ce groupe est dissous et les tracteurs en Cuma sont vendus. Que peut faire l’éleveur ? À quel coût ? La FRCuma a simulé deux cas de figure, qui s’avèrent compliqués à gérer pour l’éleveur.

Situation de départ : des charges de traction de 19 450 euros par an

Nous sommes en 2016 dans une exploitation spécialisée en lait, avec 68 ha (45 ha de prairies permanentes, 6 de prairies temporaires et méteil, et 17 de maïs ensilage), 1,6 UMO et 550 000 litres de lait.

L’éleveur utilise deux tracteurs de Cuma (120 cv et 145 cv) pour 210 h/an (labour, déchaumage, préparation du sol, fumier…). Il se sert principalement du 120 cv. L’éleveur possède en propre quatre tracteurs, de 45 à 95 cv. Il les utilise 2050 heures par an.

La FRCuma a calculé le coût de revient des tracteurs en propriété. Il comprend les charges de carburant, d’assurance, de réparations, et l’amortissement "réel" du matériel, c’est-à-dire sa décote sur le marché de l’occasion (-13 -14 % par an environ). Ce coût va de 3,73 euros/heure à 9,65 €/h, suivant le tracteur. "Le plus coûteux est un 85 cv de 2003 car il fait peu d’heures. Le 95 cv de 2008 coûte 6,84 €/h car il tourne bien (1000 h/an). Les éleveurs connaissent rarement le coût de revient de leurs tracteurs." Le tracteur de 45 cv (1983) coûte le moins cher. "Il fait 350 h/an, mais il fait beaucoup d’heures pour amener de l’eau dans les prairies ! L’optimisation des charges de mécanisation se raisonne aussi à travers des choix techniques et de gestion (reprise de terres, investissement dans un système d’abreuvement dans les prairies…)", commente Mathilde Capet.

Au total, le parc tracteur de l’éleveur lui coûte 14 700 euros par an. Le coût facturé par la Cuma est de 4 750 euros. Donc au total, les charges de traction s’élèvent à 19 450 euros, soit 35 euros pour 1000 litres.

Cas n°1 : l’éleveur veut maîtriser son coût de traction

Il faudra revoir tout le parc matériel. Comme l’éleveur n’a plus accès aux tracteurs de la Cuma, il lui faut acheter un tracteur de 125 cv pour pouvoir travailler, et du coup il revend le 95 cv. Il estime qu’il fera faire à ce nouveau tracteur 450 heures par an. Partant d’un objectif de coût de revient de 15 €/heure, il faudrait que ce 125 cv lui coûte au plus 6 750 euros par an, sans compter de frais d’entretien. Ce qui correspond à un tracteur de 30 000 euros.

"Ce n’est pas réaliste ! Ce budget correspond à un tracteur qui a déjà dix ans d’âge avec 5000 à 6000 heures de travail au compteur. Donc on peut difficilement ne pas avoir de frais d’entretien. Même si on profite de la revente du 95 cv (11 300 euros), cela ne change pas le coût de revient et donc l’incidence sur la trésorerie dans la durée. Il faudrait complètement revoir l’ensemble du parc matériel pour l’adapter à des tracteurs de plus faible puissance", analyse Mathilde Capet.

Théoriquement, cet éleveur a de la marge, si on considère qu’une exploitation spécialisée en lait peut travailler rationnellement avec 2 cv/ha SAU (référence citée par l’Institut de l’élevage). "Ici, en situation de départ, nous sommes à 4,7 cv/ha SAU. Il y a très peu d’exploitations laitières qui ne sont pas surmécanisées", commente Mathilde Capet.

Cas n°2 : l’éleveur veut conserver le même niveau d’équipement

Un surcoût important. Comme l’éleveur n’a plus accès aux tracteurs de la Cuma, il va acheter un tracteur de 125 cv pour remplacer le 120 cv de la Cuma qu’il utilisait le plus souvent. Son prix n’a plus rien à voir avec le prix du 120 cv acheté par la Cuma en 2010 : "Il faut compter environ 20 000 euros de plus", indique Mathilde Capet. Donc la FRCuma a simulé un achat en propriété en 2010 pour évaluer son coût de revient sur dix ans et le comparer aux factures de la Cuma. "Même avec la revente du 95 cv devenu superflu, le surcoût est important", conclut Mathilde Capet.

Dico

Le coût de revient d’un matériel

Le calcul des Cuma prend en compte l’entretien, le carburant, l’assurance, et un amortissement réel, c’est-à-dire la perte de valeur réelle du matériel. Contrairement aux amortissements pratiqués dans les exploitations, qui ont généralement une logique fiscale et qui ne prennent pas en compte la valeur de revente du matériel.

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