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Engrais azotés : l'industriel Yara s'inquiète de possibles ruptures d'approvisionnement

L’entreprise de fabrication d’engrais norvégienne Yara a souligné la fragilité actuelle des chaînes logistiques dans l'approvisionnement d'engrais, tout en mettant en avant sa volonté de décarboner son activité.

Pour l'entreprise Yara, les prix des engrais vont rester fermes, avec des craintes pour la logistique en raison d'usines européennes à l'arrêt.
Pour l'entreprise Yara, les prix des engrais vont rester fermes, avec des craintes pour la logistique en raison d'usines européennes à l'arrêt.
© G. Omnès

« Actuellement, l’augmentation du prix de l’ammoniac fabriqué en Europe ne permet plus aux industriels de produire des engrais à un coût tenable », a expliqué le président de Yara France Nicolas Broutin lors d'une conférence de presse organisée à Paris le 20 septembre. La tonne d’ammoniac s’échange à 2 500 dollars la tonne ($/t) en Europe contre 1 300 $/t sur le marché mondial.

Une réduction de production d'engrais de 65 %

Cette situation a contraint les producteurs d’engrais à réduire leur production (-65 % pour Yara). « Nous sommes en pleine période de préparation de la prochaine saison et des usines sont à l’arrêt », a lâché le dirigeant de l’entreprise norvégienne de fabrication d’engrais, qui s’inquiète d’éventuelles ruptures de la chaîne d’approvisionnement pour des raisons logistiques. Seules les usines situées à proximité d’un port parviennent à tourner grâce à de l’ammoniac importé. C’est le cas des usines françaises de Yara situées à Ambès (33) et Montoir-de-Bretagne (44).

 

 
« Actuellement, l’augmentation du prix de l’ammoniac fabriqué en Europe ne permet plus aux industriels de produire des engrais à un coût tenable », a expliqué le président de Yara France Nicolas Broutin, à gauche, aux côtés de Delphine Guey,  directrice de la communication.
« Actuellement, l’augmentation du prix de l’ammoniac fabriqué en Europe ne permet plus aux industriels de produire des engrais à un coût tenable », a expliqué le président de Yara France Nicolas Broutin, à gauche, aux côtés de Delphine Guey, directrice de la communication. © V. Charpenet

 

Le responsable a indiqué que les prix devraient rester fermes encore quelque temps en lien avec le prix du gaz. Cependant, il considère que les difficultés rencontrées par l’élevage en Europe à cause de la sécheresse pourraient venir tempérer l’ardeur de la demande d’engrais observée puis la reprise post-covid.

Dans ce contexte de crise de l'énergie, doublé d'une crise climatique, l'entreprise a mis en avant sa volonté de réduire sa dépendance aux énergie fossiles tout en minorant son empreinte carbone. « La production d’une tonne d’ammoniac émet l’équivalent de deux tonnes de CO2 », a rappelé le président de Yara France. Ce chiffre illustre l’urgence à décarboner la production d’engrais azotés. « C’est fondamental pour réduire l’empreinte carbone de l’alimentation », souligne le responsable. L’ammoniac, produit à partir de gaz naturel, est en effet l'un des principaux ingrédients nécessaire à la production d’engrais azotés

À cette considération environnementale vient s’ajouter actuellement une considération économique face à l’explosion des prix de l’énergie depuis deux ans (+500 % pour l’électricité et +350 % pour le gaz). Deux bonnes raisons pour l’entreprise de présenter les solutions qu’elle envisage pour continuer de réduire son empreinte carbone et parvenir à produire « des engrais verts », c’est-à-dire complétement neutres en carbone, d’ici 2050.

Yara travaille sur la réduction de ses gaz à effet de serre (GES) depuis plusieurs années. « En 20 ans, elles ont été réduites de moitié », avance Nicolas Broutin. C’est l’orientation de la production européenne vers les ammonitrates qui explique en partie ce progrès. La fabrication de cette forme d’engrais est en effet moins émettrice que pour les produits de nature uréique. « Grâce à l’amélioration des processus de production, nous avons réduit de plus de 95 % les émissions de GES du site de Montoir-de-Bretagne », précise le responsable. De manière générale, l’entreprise cherche à gagner en efficacité énergétique, notamment grâce à l'utilisation de l’électricité et l'installation de chaudière biomasse.

Yara teste actuellement en Norvège la technique de l’hydrolyse de l’eau qui consiste à récupérer l’hydrogène dans l’eau plutôt que dans le gaz naturel pour produire de l’ammoniac. Une méthode prometteuse mais très gourmande en énergie. « Cela nécessite un approvisionnement régulier et important, explique Nicolas Broutin. En Norvège, c’est l’énergie hydraulique qui est utilisée. » L’utilisation d’une énergie renouvelable est en effet une condition sine qua non à la production d’engrais dit « verts ».

Récupérer l'azote organique des déchets biodégradables

L’entreprise travaille par ailleurs à un projet d’économie circulaire en partenariat avec Véolia. Objectif : récupérer l’azote organique des déchets biodégradables des Français pour produire des engrais organo-minéraux.

Ces nouvelles pistes exigent la mobilisation de capitaux importants. Les investissements pour le projet en Norvège s’élèvent par exemple à près de 250 millions d’euros. Yara bénéficie de l’appui de l’État norvégien. « Le secteur doit pouvoir continuer à investir, considère Nicolas Broutin. L’Union européenne doit assurer sa capacité à produire de l’ammoniac décarboné ».

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