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Lait bio : les éleveurs se sentent abandonnés face à d’importantes pertes

Les maigres annonces du gouvernement (10 millions d’euros) au Salon de l’agriculture pour aider les agriculteurs bio laissent un sentiment d’abandon aux éleveurs laitiers. Les pertes sont chiffrées à 60 millions d’euros pour 2022 rien que pour la filière laitière.

ligne production lait bio
Une autre enveloppe pour les filières bio pourrait venir du reliquat de l’aide à la conversion de la Pac qui, vu la conjoncture, ne devrait pas être intégralement utilisée.
© O. Amy / Cniel

21 000 €. C’est le manque à gagner pour une exploitation bio en zone montagne en 2022 du fait de la crise que subie la filière selon les estimations du Cniel. Il est de 6000 € pour les élevages laitiers bio de plaine. Pour l’ensemble de la filière laitière, les pertes atteignent 60 millions d’euros. « Deux tiers sont assumés par les producteurs. Un tiers sont supportés par les laiteries qui ont maintenu le prix du lait bio pour le lait déclassé », décrypte Yves Sauvaget, président de la commission bio du Cniel et éleveur adhérent à la Confédération paysanne.

Les projections pour 2023 sont encore plus alarmistes. Les pertes pour la filière pourraient grimper à 71 millions d’euros. Une exploitation bio de montagne livrant à une laiterie spécialisée pourrait voir son manque à gagner atteindre 32000 € pour 2023. En effet, face à une importante déconsommation et à une production qui devrait encore s’accroître légèrement jusqu’à la moitié de l’année, la situation est particulièrement délicate pour la filière lait bio. Le prix bio 2022 payé aux producteurs est resté relativement stable alors que l’inflation était bien là.

De maigres annonces

En face, le gouvernement a timidement annoncé une aide exceptionnelle de 10 millions d’euros pour l’ensemble des filières bio. Car le lait et ses dérivés ne sont pas les seuls à être boudés par les consommateurs. C’est tous les produits bio qui sont concernés par la déconsommation. L’enveloppe est donc bien loin des attentes des agriculteurs bio.

Devant des députés, le ministre de l'Agriculture a expliqué que les filières porc et lait sont celles « où il y a des risques de déconversion » et « qui sont le plus en risque » rapportent nos confrères d’Agra. Le fléchage des fonds devrait donc les cibler en priorité.  Marc Fesneau a également évoqué une relance de la commande publique pour atteindre les objectifs Egalim (minimum 20% de produits bio) dans les cantines.

Prendre ses responsabilités

« Les producteurs de lait se sentent complètement abandonnés », témoigne Pascal Le Brun, président de la coopération agricole. « Ce que propose le ministre ne nous convient pas », abonde Samuel Bulot, vice-président de la FNPL en charge du dossier bio.

Sous l’impulsion des objectifs politique de développement de bio, le plan de filière de 2017 prévoyait de doubler la production bio d’ici cinq ans. C’est chose faite mais en face des ambitions politiques, le marché n’est pas au rendez-vous.

« Je dis aux politiques vous avez eu une ambition trop forte sur le bio. Vous êtes coresponsable de cette surproduction, lance Thierry Roquefeuil, président de la FNPL. Vous ne pouvez pas nous laisser en rase campagne dès qu’il y a des difficultés. »

La question du « gaspillage d’argent public » est également soulevée. En effet, les conversions ont été aidées par des deniers publics tant européens que nationaux ou régionaux. En cas de retour à la filière conventionnelle, quel aura été leur utilité ?

En chiffres

En janvier 2023, la consommation des ménages a dégringolé au niveau de mi-2017. Entre temps la collecte à progresser de 50%.

 

Vers un manque de lait pour 2026 ?

« D’ici 2026, la France pourrait manquer de lait bio notamment sur la partie matière grasse », alerte Yves Sauvaget, président de la commission bio du Cniel. Pourquoi ? D’un côté, la demande de produits bio devrait remonter au gré du tassement de l’inflation que la banque mondiale et l’Insee estime pour 2024. La mise en place effective de la loi Egalim demandant aux cantines de servir au moins 20% de produits bio permettrait d’absorber 15% des déclassements. En face, les taux de cessation des prochaines années avoisineront 4 à 5 % soit une perte de 200 millions de litres de lait bio sur trois ans.

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