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Problème de qualité de farine, et si c’était dû aux amidons endommagés...

« Aujourd’hui on caractérise un blé selon son taux de protéines et pour la farine, les professionnels se focalisent aussi sur ce critère. Pourtant plus de 70 % du produit est constitué d’amidon rarement pris en considération », témoigne Arnaud Dubat, directeur Applications et marketing de Chopin Technologies. Cette fraction, et en particulier la présence d’amidons endommagés, n’est pas sans conséquence qualitative, donc technologique. « De plus en plus d’industriels de la seconde transformation se rendent compte de l’importance de cette donnée et l’intègrent à leurs cahiers des charges. »
Optimiser l’altération de l’amidon
L’amidon est composé de granules qui se trouvent endommagés par la mouture, et ce, dans de plus ou moins grandes proportions. Or « le pouvoir d’absorption d’eau d’un granule d’amidon est multiplié par 4 à 10 s’il est cassé », explique Arnaud Dubat. La proportion d’amidons endommagés change alors la fonctionnalité de la farine. Au fournil, la pâte sera plus collante lors du pétrissage. « L’amidon, qui a capté l’eau comme une éponge, la relargue facilement. » Par ailleurs, l’amidon fragilisé sera plus facilement attaqué par les amylases. à la clef : plus de sucres simples disponibles dans la pâte. Cela entraînera une plus forte production de gaz à la fermentation et une coloration plus marquée (caramélisation et réaction de Maillard). « Le visuel du produit fini est donc modifié. » « Un fort taux d’amidons endommagés peut donner des résultats semblables à la mouture de grains germés », illustre le spécialiste. Difficile de rectifier les défauts. Il faudra chercher à limiter la quantité d’amylases et renforcer l’apport de gluten, ce qui est coûteux.
Un critère observé à la loupe dans de nombreux pays
« En France, la présence d’amidons endommagés, pourtant très étudiée, est peu mesurée. En Turquie, en revanche, 80 % des meuniers la contrôlent. En Asie et aux états-Unis, l’analyse est quasi obligatoire, précise le représentant de Chopin Technologies, entreprise qui réalise près de 80 % de son CA à l’export. Pour caractériser une farine, les Américains s’intéressent à cette donnée avant même de s’inquiéter du taux de cendres. » Cela s’explique en partie par le fait que les Anglosaxons utilisent des blés Hard produisant plus d’amidons endommagés à la mouture. Outre-Atlantique, les industriels « cherchent une absorption d’eau de la farine panifiable la plus importante possible sans détériorer la qualité du produit fini. Pour cela, ils visent un niveau d’endommagement d’amidon optimal. Ils travaillent à dureté de blé donnée et, si leur conditionnement et le process sont maîtrisés, le taux d’endommagement l’est aussi », assure le professionnel. à l’inverse, dans la fabrication des biscuits, c’est une hydratation minimale qui va être visée. Car, plus la pâte est humide, plus il faudra engager d’énergie pour faire ressortir l’eau des produits.
La surveillance des amidons endommagés permet aussi, par exemple, de détecter plus rapidement l’usure des cylindres, selon l’étude comparative réalisée par Ahmed Benamara, meunier algérien. Elle permettrait aussi de contrôler leur parallélisme, ces évènements entraînant une dérive qualitative.