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Note de panification des blés : une approche décalée par rapport aux besoins du marché ? 

Arvalis a convié différents spécialistes de la panification à présenter leur perception des blés 2023. Les échanges ont amené à pointer certaines limites des standards d’évaluation actuels. 

© Intuitivmedia (Pixabay)

Avec le dérèglement climatique, les évènements météorologiques inattendus affectant les cultures s’avèrent de plus en plus nombreux. Et ces aléas sont parfois très localisés. Ainsi, la moisson de blé tendre a par exemple commencé de manière précoce cette année à la faveur des températures élevées. Mais l’arrivée des pluies a retardé les travaux dans le Sud-Ouest puis dans le Nord-Ouest. Chaque nouvelle campagne de culture est désormais atypique et conduit à la récolte de matières premières aux qualités souvent moins homogènes selon les zones de production. Parallèlement, le choix des variétés serait aujourd’hui davantage raisonné selon les caractéristiques du terroir.

Une diversité de situations qui interroge sur la façon de communiquer 

C’est en particulier le cas dans le Sud-Loire (PACA excepté) où les blés utilisés se révèlent plus diversifiés qu’au Nord par exemple. Dans ce contexte, apprécier la moisson à l’échelle du territoire national peut paraître insuffisant pour les utilisateurs français.

Un constat partagé par tous les observateurs des blés français réunis le 26 septembre par Arvalis. Des intervenants de la société Eurogerm, de Lesaffre panification et du Labo Meunier-Banette ont présenté, aux côtés de l’établissement scientifique, leurs observations avec les meuniers. Les différents spécialistes ont ainsi pris l’habitude d’évaluer la qualité des blés par grandes régions. Mais pouvoir présenter une vision de la qualité de la moisson sur la base de moyennes nationales reste important pour accompagner l'activité d’exportation, ont pointé certains professionnels. 

Rapprocher les tests de la pratique 

Au-delà de la façon de communiquer les résultats de l’année, les méthodes d’évaluation ont aussi été interrogées par les intervenants et les participants. En particulier le test Pain Courant Français (NF V03-716) et la note de panification. Pour certains observateurs, ce critère devient moins représentatif de la réalité du terrain, puisque le travail en direct (pétrissage et cuisson le même jour) est moins pratiqué dans les boulangeries. La panification fait souvent intervenir des étapes de froid positif. Elles permettent de différer la mise au four. Ainsi les artisans peuvent notamment proposer des cuissons tout au long de la journée. En multipliant les fournées, les artisans peuvent répondre à l’attente des consommateurs finaux de pouvoir acheter du pain frais à toute heure.

C'est entre autres raisons ce qui incite les laboratoires comme Arvalis, Banette, Eurogerm ou Lesaffre à développer et mettre en œuvre d’autres diagrammes qui viennent ainsi compléter la perception donnée par le test en direct et s’ajuster à la diversité des pratiques. Le test de laboratoire pratiqué en direct reste néanmoins discriminant et la plupart du temps transposable à l’observation du terrain. Il présente en outre l’avantage d’être normalisé et sa mise en œuvre est totalement harmonisée dans les laboratoires. Tous les utilisateurs parlent ainsi le même langage et il est facile de comparer les résultats entre laboratoires et entre origines des échantillons (lieu, année, …).  

Adopter de nouveaux protocoles d’évaluation  

Au-delà de l’organisation, l’offre de produits elle-même a évolué. Apprécier les blés qui donneront des farines pour fabriquer des pains de mie, des buns ou encore des wraps, de plus en plus consommés, en fonction de la note de panification pensée pour les pains à croûte peut également sembler décalé.

Idem pour la viennoiserie, par exemple. Certains blés peuvent avoir une mauvaise note au test Pain Courant Français, mais se révéler intéressants sur certains critères essentiels pour d’autres applications, comme la ténacité ou l’extensibilité.
« Il faudrait repartir de l’aval, de la demande des consommateurs artisans et industriels, et remonter leurs besoins » pour développer d’autres protocoles, suggère Benoît Méléard, responsable Pôle Qualité chez Arvalis et tenir compte de critères déterminants pour les diverses applications. « C’est le travail qui est actuellement engagé, mais il ne sera pas possible de créer un test pour chacune d’elles », tempère l’expert.

La plupart des observateurs présents ne se fient d’ailleurs plus exclusivement à la note finale du test de panification NF V03-716 et s’intéressent aux différentes caractéristiques mesurées lors de ce test pour juger les blés. Ils ont également souvent recours à d’autres diagrammes plus proches de la réalité du terrain. 

Ajuster le processus dès l’inscription des blés 

Le poids de la valeur boulangère, et donc du test de panification, dans le processus global conduisant à l’introduction d’une nouvelle variété sur le marché a été débattu. En effet, « le test de panification pèse lourd dans l’inscription potentielle d’une variété au catalogue, c’est un point de vigilance », pointe Benoît Méléard. En raison de leur note de panification trop faible, des blés peuvent se retrouver évincés dès le stade de la sélection. Cela veut dire que l’amont est peut-être « passé à côté de variétés », avec des traits de caractères agronomiques pourtant intéressants.  

Pour toutes ces raisons, le CTPS a engagé en 2023 un chantier de rénovation du processus d’inscription des variétés de blé tendre au catalogue officiel.  

Difficulté de disposer d’échantillons suffisants 

Les participants de cette première journée de vision croisée sur la qualité des blés panifiables ont aussi pointé la difficulté à récupérer des échantillons suffisants pour apprécier équitablement et de manière représentative toutes les variétés.
Ce risque est encore plus probable avec une approche régionale de la qualité. Et si, à l’avenir, la filière devait multiplier les protocoles de tests, la difficulté s’en trouverait amplifiée, mettent en garde les spécialistes.  

Par ailleurs, les timings pour effectuer l’analyse des blés de l’année et fournir des bilans s’avèrent toujours plus serrés. Les blés testés sont « jeunes » et « les premières farines reçues ne sont pas systématiquement déjà optimisées au niveau du réglage des moulins » en fonction des caractéristiques de la nouvelle récolte.

Ce premier rendez-vous, proposé par Arvalis en tout début de campagne, a permis, outre de recouper les observations de chacun, de pointer des difficultés dans la réalisation de cet exercice et d’ouvrir des champs de réflexion collectifs.  

 

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