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Un futur GIEE grandeur nature pour aller dans le sens de l'agroécologie

En Rhône-Alpes, plusieurs dizaines d’agriculteurs ont investi, en groupe, pour changer leurs pratiques agricoles. Une démarche qui préfigure un groupement d’intérêt économique et environnemental.

Un groupement d’intérêt économique et environnemental ou GIEE, tout le monde en parle, mais c’est quoi exactement ? Et pour financer quels projets ? S’il n’en existe pas encore sous ce statut, certains groupes d’agriculteurs constitués s’en approchent déjà. C’est le cas dans la vallée du Rhône, où Nicolas Ribes, conseiller indépendant, a aidé plusieurs groupes à structurer des projets à la fois économiques et environnementaux.
Nous sommes à Albon, à une quarantaine de kilomètres au nord de Valence, dans la Drôme, au GIE Agribiotech. Un groupe de six agriculteurs a décidé de contribuer à résoudre un problème de qualité de l’eau dans leur vallée. Sur le captage d’Albon, il y avait régulièrement des pics de S-métolachlore. L’eau n’était plus potable, d’où un classement dans la liste des captages prioritaires. L’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse a mis en place un programme d’actions pour rétablir la qualité de l’eau.
« Nous avions déjà des affinités entre nous car nos parents travaillaient ensemble, auparavant, souligne Aurélien Ravit, un jeune agriculteur. Le facteur déclencheur a été notre rencontre avec Nicolas Ribes qui nous a expliqué que le GIE était la bonne structure juridique pour monter un tel projet et le soutenir auprès de la DDT. »


Agricultures biologique et conventionnelle ensemble


L’originalité de ce groupe est la coexistence de quatre agriculteurs bio et de deux conventionnels sur une surface totale de 536 hectares. Les bio devaient renouveler leur matériel et les conventionnels devaient investir dans l’agriculture de précision pour réduire l’usage des phytos. Ils ont trouvé un intérêt commun. « Nous allons passer au binage en autoguidage GPS. Cela va se traduire par un gain de temps, une réduction de la casse des outils, une baisse des charges de structure avec du matériel plus performant, et surtout une amélioration considérable des conditions de travail car le désherbage mécanique demande une attention très intense », souligne Denis Valentin, agriculteur bio depuis une quinzaine d’années.
Aurélien Ravit, lui, est un passionné de mécanique. « Je souhaitais passer à l’autoguidage RTK, avec une précision centimétrique, mais seul, c’est un investissement trop élevé. À plusieurs, c’est possible. » Le GIE a investi dans une bineuse, une herse étrille, une houe, une balise RTK et des systèmes de guidage, pour un investissement de 400 000 euros dont la moitié pour le système d’autoguidage. Des aides sont venues de la communauté de communes, de l’Agence de l’eau et du deuxième pilier de la PAC. « Au niveau technique, nous voulons aller encore plus loin avec un guidage de l’outil lui-même pour pallier la dérive », s’enthousiasme-t-il. L’agriculteur conventionnel voit un grand intérêt à s’être associé avec des bio. « Ils nous apportent leur expérience. Ils obtiennent d’excellents rendements. »
Non loin de là, un autre groupe s’est constitué sur une problématique similaire : la qualité de l’eau. C’est le GIE de la Varèze. Cinq exploitations céréalières et une maraîchère sur 495 hectares, allant de 173 hectares à 10 hectares, devaient réagir face à la pollution de la source de Val qui rit, mais qui ne faisait pas rire les riverains. « Quand il y a de l’atrazine dans l’eau, on ne peut pas nier notre responsabilité. Il fallait trouver des solutions. Mais ça coûte très cher », souligne Bruno Jénin, l’un des agriculteurs.

Transformer les contraintes en atouts porteurs


Le groupe a agi sur plusieurs leviers : la création d’une station de lavage des pulvérisateurs, l’acquisition de matériels de désherbage mécanique et d’implantation de couverts végétaux et l’engagement de chacun dans une MAE territoriale (MAET) de réduction des phytos. « Je n’en peux plus d’avoir cette étiquette de pollueur, s’enflamme Bruno Jénin. Des contraintes, il faut les transformer en points positifs, notamment en cherchant à regagner en autonomie sur nos exploitations. Et pourquoi ne pas aller plus loin et produire de la luzerne pour nos collègues éleveurs ? »

Passage massif au bio


Car à côté de ces deux GIE de céréaliers, il en existe un troisième regroupant des exploitations de polyculture-élevage, de maraîchage et de viticulture, en Ardèche, sur l’autre rive du Rhône. C’est le GIE Développement agriculture durable (DAD) qui est antérieur aux deux précédents. Elles ne sont pas cinq, mais 52 exploitations d’élevage sur 1 870 hectares à s’être engagées dans une démarche de réduction des phytos. Tout le groupe, représentant 75 % de la SAU de six communes autour de Cheminas, s’est lancé dans la démarche : formation, acquisition de matériels, stations de lavage pour traiter 81 000 litres d’effluents de pesticides. Le dossier représentait 450 000 euros. « Ils se sont engagés dans une MAET pour aller chercher la performance économique et environnementale avec le soutien de l’Agence de l’eau et du Feader », souligne Nicolas Ribes. Les résultats ont été tels qu’ils se sont dit qu’ils pouvaient aller plus loin en convertissant à l’agriculture bio leurs 6 millions de litres de lait. En deux ans, toute la vallée a basculé en agriculture biologique avec Danone. Ils ont créé une Cuma pour acquérir une désileuse automotrice qui passe de ferme en ferme, puis ont démarré la construction de méthaniseurs pour gagner en autonomie sur la fertilisation et récupérer la chaleur pour sécher les fourrages. « En bio, nous avons intensifié tous nos hectares au service de l’élevage, alors qu’auparavant, on n’intensifiait que le maïs », explique François Coste, agriculteur à Cheminas qui arrive à produire 10 000 kilos de lait par vache. « Nous avons la chance d’avoir nos amis céréaliers pour leur acheter du grain humide. Et bientôt, ils vont produire pour nous de la luzerne », poursuit-il. Et c’est là que le GIEE trouve tout son intérêt.

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