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Tous les marchés des grains à la baisse

Toutes les matières premières agricoles sont embourbées dans un marasme économique. Ce qui ne laisse rien entrevoir de bon pour la suite de la campagne commerciale.

Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel. Cet adage illustre parfaitement la situation des marchés mondiaux des grains. Après plusieurs années de bonne tenue des cours, nous voilà entrés dans une spirale baissière. En cause : les fondamentaux des marchés, notamment l’augmentation de la production, les conditions climatiques ou encore la qualité des récoltes. Et toutes les matières premières sont concernées.
Le blé, tout d’abord, connaît en France une situation atypique avec non seulement une récolte abondante, évaluée à 37,4 millions de tonnes (+ 1,5 % par rapport à l’an passé) mais aussi avec une qualité dégradée par la pré-germination. « Cessons de paniquer nos clients en disant que la qualité des blés français est mauvaise », demandait Xavier Beulin, président de la FNSEA aux journalistes lors de sa conférence de presse de rentrée. Il n’empêche, les faits sont là. « Chez moi, 100 % de mes blés sont non-panifiables », soulignait Dominique Chambrette, agriculteur en Bourgogne et vice-président de l’AGPB.


Révision à la baisse des prévisions d’exportations de blé tendre


Selon l’enquête Arvalis-FranceAgriMer, 54 % des blés tendres ont un temps de chute de Hagberg inférieur à 220 secondes. Dans ce contexte, après analyse, les meuniers ont considéré qu’ils pouvaient utiliser des blés jusqu’à 170 secondes. C’est donc 65 % de la récolte qui peut ainsi être utilisée par les meuniers, du moins les Français car les meuniers des pays tiers ne tiendront pas forcément le même raisonnement. C’est pourquoi FranceAgriMer a fortement révisé à la baisse ses prévisions d’exportations de blé tendre vers les pays tiers dans son dernier rapport. Celles-ci devraient s’élever à 8 millions de tonnes (Mt), contre 12,2 Mt l’an passé, qui, il est vrai, étaient particulièrement élevées. Et il a relevé les stocks de fin de campagne.
D’autres pays européens ont été touchés par le phénomène de pré-germination des blés, notamment l’Allemagne et la Pologne. Aux États-Unis et au Canada, on s’inquiète aussi de la qualité des blés, au niveau sanitaire cette fois, avec des problèmes de mycotoxines. Des taux anormaux de déoxynivalénol (DON) ont été repérés dans des lots de blé américain, les rendant impropres à l’export. La Russie, qui a des bons blés meuniers, en profite pour inonder le marché pays tiers dès ce début de campagne.

Que faire de toutes les céréales fourragères ?


Il faudra donc vendre une récolte française de blé dont un bon tiers ne peut être destiné qu’à l’alimentation animale, dans un contexte de récolte pléthorique en céréales fourragères, tant au niveau français, européen que mondial. En France, la production de maïs est estimée à 16,7 Mt ; l’AGPM parle même de 17 Mt, compte tenu des transferts issus du maïs fourrage. Et la collecte par les OS devrait atteindre 15 Mt… du jamais vu depuis 1997. Mais que faire de cette récolte abondante ? Du fait de la concurrence du blé et de l’orge fourragère, « c’est bien sur l’export que se jouera l’équilibre du bilan maïs 2014-2015 », considère l’AGPM, alors même que la production de maïs de l’Union européenne pourrait dépasser 73 Mt, soit une hausse de 19 % par rapport à la moyenne quinquennale. « Se pose aussi la question de la capacité des maïs français à être compétitifs face aux maïs d’importation, qu’ils soient ukrainiens, sud ou nord-américains », s’inquiète l’AGPM. La production mondiale de maïs est attendue à 987 Mt, soit 15 Mt de plus que l’an passé et 50 Mt de plus par rapport à la campagne 2012-2013 !


La récolte de soja pèse sur le complexe oléagineux


C’est outre-Atlantique que la progression est la plus fulgurante. Les États-Unis vont être littéralement noyés sous le maïs avec une récolte de 365,6 Mt, selon le bilan de l’USDA de septembre, en raison de rendements records attendus à 10,8 tonnes par hectare, encore révisés à la hausse compte tenu des conditions climatiques exceptionnelles . Du côté des oléagineux, les cours sont, eux aussi, tirés vers le bas par une production mondiale de soja exceptionnelle. Celle-ci s’élèverait à 311 Mt selon l’USDA soit une progression de 28 Mt en un an. Dans ce contexte, les prix du soja sont descendus à des niveaux au plus bas depuis quatre ans, passant sous la barre des 10 dollars par boisseau, les démarrages de la récolte confirmant la production record attendue. D’autre part, les rendements du canola canadien devraient être très bons.
Tous ces éléments viennent s’ajouter à une récolte française de colza en hausse de 27 % par rapport à 2013, pour atteindre 5,6 Mt. C’est la région Lorraine qui contribue le plus à cette augmentation. Quant à la production européenne, elle est estimée en croissance de 10 % par rapport à l’an passé selon Stratégie Grains, à 23,2 Mt. À ces bilans nord-américain et européen lourds, le repli du prix du pétrole contribue lui aussi au mouvement baissier.
En Europe, les cours du colza Euronext ont évolué sur le mois de septembre dans une fourchette de 320 à 330 euros la tonne sur les échéances rapprochées. La bonne résistance du produit face à l’adversité du marché est à souligner, mais il pourrait finir par céder sous la pression de la récolte massive de soja américaine. Et c’est tout le complexe oléagineux qui est concerné.



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