Aller au contenu principal

Elongation automnale des colzas : connaissez-vous les leviers à activer ?

Si le choix variétal reste incontournable pour limiter l’élongation automnale des colzas, cette option n’est pas toujours suffisante. L’itinéraire technique et les apports azotés doivent être ajustés pour contrôler au mieux ce phénomène.

L’élongation automnale est évaluée dans le cadre des essais d’inscription d’une variété.
© Terres Inovia

Vive les automnes doux et humides, propices à une pousse rapide des colzas dès le semis. Mais ce contexte favorable à l’implantation des cultures peut conduire à un allongement trop rapide des tiges. Ce phénomène, appelé élongation automnale, est redouté par les producteurs de colza. Car une tige longue et fine est plus sensible à la verse. Riche en eau, sa sensibilité au gel est également accrue. Si la tige « éclate », la perte de pied peut être totale. Ces blessures seront autant de portes d’entrées pour les maladies — phoma en tête — qui elles aussi, pourront impacter le rendement final. Limiter cette élongation fait partie des priorités des agriculteurs qui ont décidé d’introduire le colza dans leur rotation.

Le choix variétal est le premier poste d’action contre ce risque. Tout comme la sensibilité à la verse, la richesse en huile ou la précocité à floraison, l’élongation automnale est un critère évalué dans le cadre des essais d’inscription d’une variété. Il est également pris en compte, dès le stade de la sélection par les semenciers. L’institut Terres Inovia informe sur la sensibilité d’une variété (faible, moyenne ou forte), avec le catalogue variétal consultable sur le site myvar.fr

Ne pas dépasser les 40 ou 45 plantes par mètre carré

« Malheureusement, le seul critère variétal ne suffit pas toujours pour contrôler cette élongation, souligne Arnaud Van Boxsom, ingénieur régional chez Terres Inovia dans les Hauts-de-France. Ces dernières années, nous avons montré que d’autres leviers agronomiques permettaient de maîtriser le risque, à commencer par la densité de semis. Une forte densité, supérieure à 50 plantes par mètre carré, favorisera ce phénomène. Nous conseillons donc de ne pas dépasser les 40 ou 45 plantes par  mètre carré. »

Un semis précoce sera également plus propice car il laissera tout le temps au colza de s’allonger avant l’hiver, surtout si l’automne est doux et humide, ce qui est de plus en plus fréquent ces dernières années. Les créneaux de semis conseillés par Terres Inovia, au sein de chaque région, tiennent donc compte de ce paramètre.

Autre critère décisif : la disponibilité en azote dans la parcelle. Le risque est considéré comme réel si la quantité mobilisable dépasse les 100 unités. Une plante bien nourrie grandira plus et plus vite. La gestion des apports de matière organique, notamment dans les zones d’élevage, est à prendre en compte dans les rotations avec colza.

En Normandie par exemple, une région qui cumule douceur automnale et forte présence d’élevages, le choix variétal des colzas reste primordial. Dans d’autres régions, il faut reconnaître que, face à une pression insectes ou maladies grandissantes, le critère « élongation automnale » n’apparaît pas toujours en tête des priorités.

Le comportement aux maladies passe avant

« Tout est question d’équilibre, souligne Philippe Charron, chef produit expert colza chez RAGT Semences (voir encadré). Une variété productive affichant un bon comportement aux maladies et une sensibilité notable à l’élongation pourra quand même être choisie. À l’inverse, une variété peu sensible à ce phénomène mais également peu productive et peu riche en huile, aura plus de mal à s’imposer dans le choix final des agriculteurs. Le screening au niveau de la recherche reste donc capital pour repérer la variété aux multiples atouts. Sans oublier que les priorités pour les agriculteurs français ne seront pas les mêmes que pour leurs collègues européens. En Grande-Bretagne par exemple, le critère élongation automnale n’est pas du tout pris en compte. » Un sacré challenge pour les semenciers dont la recherche se joue le plus souvent à l’échelle européenne.

Pour anticiper le risque d’élongation, l’observation reste primordiale. Autour du stade 4 feuilles, il est conseillé de prélever quelques pieds de colza, pour réaliser une coupe transversale de la tige. Si celle-ci atteint déjà plusieurs centimètres, cela indique que le colza commence à s’allonger. Une application précoce de régulateur de croissance pourra alors être envisagée, en vérifiant l’estimation du risque à la parcelle, via un logiciel mis à disposition par Terres Inovia.

Un régulateur en dernier recours

Si l’élongation du colza est bien réelle, il reste l’option d’appliquer un régulateur de croissance. Son positionnement doit se faire entre les stades 6 et 8 feuilles du colza car passé ce stade, l’efficacité de la spécialité sera moindre. La dose à appliquer devra être ajustée en fonction du développement des plantes.

Sur des colzas déjà allongés, le produit ne pourra au mieux, que freiner le développement végétatif des plantes : aucune réduction de taille ni de verse ne doit être attendue. Le régulateur stoppe le développement des organes aériens pour favoriser la croissance racinaire. À noter qu’une régulation automnale inutile peut conduire à une perte de rendement comprise entre 5 et 10 % : le produit limitant la vigueur de la culture. Cette option n'est à envisager qu’en dernier recours, si toutes les autres précautions préalables se sont avérées inefficaces.

Philippe Charron, chef produit expert colza chez RAGT Semences

« Une variété sensible à l’élongation ne sera pas forcément écartée de notre gamme »

« Le critère 'élongation automnale' est depuis longtemps pris en compte dans nos programmes de recherche pour sélectionner de nouvelles variétés de colza. En France, son évaluation reste incontournable même si d’autres caractéristiques comme le rendement, la teneur en huile, les sensibilités aux maladies et aux insectes s’avèrent tout aussi, voire plus importants ces dernières années. Les agriculteurs savent désormais comment limiter ce phénomène en jouant sur la date et la densité de semis, la disponibilité en azote… Le climat reste également un facteur déterminant de l’intensité de cette élongation. Voilà pourquoi une variété moyennement sensible ne sera pas systématiquement écartée de notre gamme si, en parallèle, elle possède d’autres atouts agronomiques. Cette logique n’était pas vraie il y a quinze ans car à l’époque, le phénomène était moins connu et donc, moins bien maîtrisé par la voie agronomique. La variété RGT Quizz que nous lançons cette année affiche par exemple une sensibilité moyenne à l’élongation automnale mais s’avère très productive et se comporte bien vis-à-vis des pressions des ravageurs. »

 

Les plus lus

Semis direct de maïs précoce après un premier semis qui n a pas levé en raison de mauvaises conditions climatiques et des dégâts d'animaux nuisibles, corbeaux et ...
Semis de printemps : quelles solutions pour remplacer les orges de printemps non semées ?

Après les semis d’automne perturbés par les fortes pluies, la sortie d’hiver et les premiers semis de printemps sont, eux…

L'arrêté abeilles impose de réaliser les traitements de type fongicides sur le colza le soir.
Fongicides sur colza : quelles sont les conditions d'utilisation prévues par l’arrêté abeilles ?

Depuis 2023, l'arrêté abeilles impose le respect d'horaires pour utiliser certains produits phytosanitaires en période de…

Thomas Pointereau, agriculteur à Epieds-en-Beauce (45)  "Contre les volatiles tels que les pigeons, je fais une demande dérogatoire de tirs auprès de la préfecture ou de ...
Dégâts d’oiseau : « Je dépose des tas de grains de pois et de maïs en bordure des champs pour faire diversion »
Agriculteur à Épieds-en-Beauce (Loiret), Thomas Pointereau parvient à contenir les attaques d'oiseaux sur maïs. C'est plus…
Le décalage de semis de maïs ou de tournesol augmente le risque d'attaques importantes de pigeons et corvidés.
Dégâts d’oiseaux : des produits efficaces à venir en traitement de semences
De nouvelles spécialités corvifuges sont en cours de test pour le traitement de semences de maïs et de tournesol, avec parfois…
Déclaration PAC 2010 . Permanence organisation  par la chambre d'agriculture . Conseiller et agriculteurs associés . Dossier PAC . Aides du ministère de l'Agriculture . Télédéclaration. Telepac. Administration . Discussion technique sur la gestion du parcellaire. Carte. ordinateur.  --- Reportage complet disponible sur le site www.photoagriculture.com (pour obtenir un code dÂ’accès, contacter  S. Leitenberger : webmestre@leitenberger.fr).
Telepac 2024 : les 10 points à avoir en tête pour réussir sa déclaration PAC

La télédéclaration PAC doit être finalisée sur Telepac 2024 avant le 15 mai 2024. Jachères, conditionnalité, écorégime,…

Marc Moser, agriculteur à Kurtzenhouse (67)"En 2024, j’envisage d’appliquer un anti-dicotylédones à 5-6 feuilles du maïs et/ou une application dirigée de Banvel à ...
Désherbage maïs : « Nous faisons face à l’explosion de datura dans nos parcelles »

Le datura est signalé en Alsace depuis quelques années. Agriculteur à Kurtzenhouse (Bas-Rhin), Marc Moser doit dorénavant…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Grandes Cultures
Consultez les revues Réussir Grandes Cultures au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Grandes Cultures