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Pression foncière
L´espace rural en mal d´une gestion vraiment durable

En de nombreux endroits, la pérennité pure et simple de l´activité agricole est remise en cause. Car ses revenus deviennent dérisoires comparés à l´intérêt financier que recèle l´abandon du foncier.


Ces chiffres donnent à réfléchir : entre 1992 et 2000, les routes et les parkings ont progressé de 10 %. Chaque année plus de 60 000 hectares, dont la moitié parmi les meilleures terres agricoles françaises, sont artificialisés. Bien que 80 % de la population réside sur seulement 20 % du territoire, 41 % de ce dernier est aujourd´hui constitué d´espaces à dominante périurbaine qui englobent 40 % des exploitations agricoles.
Nul hasard, donc, si la fédération des Safer, mais aussi la Datar(1) dans une récente étude, sonnent le rappel pour une « gestion durable de l´espace rural et périurbain ».
Avec l´APCA(2), la fédération des Safer a tenu un colloque sur le sujet le 12 novembre dernier. Avec comme point de départ ce constat : la progression du béton s´emballe, s´opère en ordre dispersé, grignote l´espace rural de toutes parts et met les prix de la terre sous pression.

Des prix, en progression moyenne de plus de 11 % en 2002, qui finissent par perdre toute logique économique avec la rentabilité du secteur agricole et remettent en cause sur le long terme l´accessibilité de jeunes agriculteurs à la terre. Voire, en de nombreux endroits, la pérennité pure et simple de l´activité agricole dont les revenus deviennent dérisoires comparés à l´intérêt financier que recèle l´abandon du foncier.
Simple question « d´offre et de demande », semble considérer Philippe Brayer, président de la fédération nationale de la propriété rurale qui a tenu à rappeler que les propriétaires sont « des hommes de projet sur le territoire mais que tout propriétaire espère faire une plus-value ».

Cependant, on conviendra qu´en la matière, le marché n´est pas apte, à lui seul, à faire pour le mieux. « La gestion des espaces n´est pas qu´une question technique. Elle est politique et éminemment sociétale », souligne Anne-Marie Ducroux, présidente du Conseil national du développement durable. Il en va du degré plus ou moins poussé d´artificialisation de l´environnement dans lequel nous vivrons et du potentiel de développement sur le territoire que nous laisserons aux générations qui nous suivent. « Beaucoup de décisions ne pourront plus être prises avec la liberté d´avant. Les évolutions sont irréversibles alors que le foncier est une ressource non renouvelable », rappelle-t-elle. C´est pourquoi, « paradoxalement, le développement peut tuer le développement du futur », soulignait Jean-Paul Delevoye, ministre de la Fonction publique, de la Réforme de l´État et de l´Aménagement du territoire, en introduisant ce colloque.
©P. Forget


Jeux de pouvoirs sur la question foncière
Ardue, la question foncière soulève les passions et se résume ainsi dans les propos du ministre : « La régulation par le seul marché est absolument déséquilibrante en terme d´aménagement de l´espace et de prix. La question de fond est la suivante : jusqu´où doit-on laisser faire le marché ? Où pose-t-on les limites du droit de propriété, nécessaires à la préservation de l´intérêt général ? »
Le ministre, tout en rappelant que « beaucoup d´agriculteurs arrêtent faute de visibilité sur leur foncier », interpelle la profession : « Je me sens orphelin d´une position claire du syndicalisme agricole s´agissant de la rentabilité de terres achetées hors de prix et de la recherche de plus-values foncières dans le cadre d´opérations liées à des investissements publics. »
Élus locaux, agriculteurs, notaires, propriétaires, experts se sont exprimés dans ce colloque. De leurs propos on ressent que l´arsenal réglementaire existant, d´ailleurs suffisant aux yeux de la plupart, est mal ou insuffisamment utilisé et peut-être parfois détourné.

Localement, celui-ci s´articule autour des plans locaux d´urbanisme (Plu), successeurs des plans d´occupation des sols (Pos) et des schémas de cohérence territoriale (Scot). Tout « cela ne marche pourtant pas très bien, déplore Marc Censi, président de l´Assemblée des communautés de France. On se heurte aux jeux de pouvoirs qui se transforment en obstacles infranchissables pour mener des politiques foncières réfléchies et équilibrées sur le long terme ».
Pour le président de l´association nationale des maires de France, Daniel Hoeffel, « l´échelon intercommunal est le plus pertinent pour éviter la dissémination et organiser vraiment la coexistence des diverses activités. Les Plu doivent être élaborés le plus possible à l´échelon intercommunal et le plus en harmonie avec les Scot ». Une position relayée par Gérard Bailly, président du Conseil général du Jura qui estime « inutile de créer des structures supplémentaires mais qu´il faut sortir des politiques communales dans ce domaine ».

Sauvegarder des espaces agricoles à part entière
Bref, on fait encore trop souvent son « Plu » dans son coin et, pour éviter mitages, disséminations, et mauvaise répartition des activités sur le territoire, « les acteurs locaux ne se fédèrent pas suffisamment autour des projets » considère Marc Censi.
En parcourant la France, ce constat saute aux yeux. En particulier dans les zones déjà largement périurbaines. « Il faudra aller de plus en plus vers une affectation des biens fonciers entre logements, activités industrielles et commerciales, agriculture et espaces naturels de manière à en garantir l´usage qui en est fait », suggérait Jean-Paul Delevoye dans son introduction. Ce qui suppose des moyens réglementaires efficaces pour, en particulier, sauvegarder des espaces agricoles considérés trop souvent comme réserve résiduelle de terrain urbanisable.

Bref, on fait encore trop souvent son « Plu » dans son coin et, pour éviter mitages, disséminations, et mauvaise répartition des activités sur le territoire, « les acteurs locaux ne se fédèrent pas suffisamment autour des projets » considère Marc Censi.
En parcourant la France, ce constat saute aux yeux. En particulier dans les zones déjà largement périurbaines. « Il faudra aller de plus en plus vers une affectation des biens fonciers entre logements, activités industrielles et commerciales, agriculture et espaces naturels de manière à en garantir l´usage qui en est fait », suggérait Jean-Paul Delevoye dans son introduction. Ce qui suppose des moyens réglementaires efficaces pour, en particulier, sauvegarder des espaces agricoles considérés trop souvent comme réserve résiduelle de terrain urbanisable.

(1) Délégation à l´aménagement du territoire et à l´action régionale.
(2) Assemblée permanente des Chambres d´agriculture.

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