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COMPÉTITIVITÉ
Les céréaliers français à la peine au niveau européen

Un gain de productivité modeste, de lourdes charges d’amortissement et une main-d’oeuvre surtout familiale pénalisent les exploitations françaises par rapport à celles du nord de l’Europe.

Quel est le niveau de compétitivité économique des exploitations de grandes cultures françaises par rapport à leurs homologues européennes ? Vincent Chatellier, économiste à l’Inra, a réalisé une analyse comparative des exploitations spécialisées en céréales et oléoprotéagineux (COP)(1) de l’Union européenne sur la période 1991 à 2006. Sept États regroupent 75 % des exploitations céréalières et génèrent 85 % de la valeur céréalière. Il s’agit de la France, du Royaume-Uni, de l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, la Hongrie, et la Pologne.

MANQUE DE FLEXIBILITÉ

« Sur quinze ans, la France affiche une valeur ajoutée par emploi agricole à temps plein convenable, autour de 22000 euros par UTA, explique le chercheur. Mais si on rémunère la main-d’oeuvre familiale, les choses se dégradent nettement. » Les exploitants français font, en effet, peu appel à la main-d’oeuvre salariée (13 % contre environ 40 % au Royaume-Uni et en Allemagne), ce qui réduit leur flexibilité par rapport à leurs collègues européens en période difficile, ces derniers ayant la possibilité d’ajuster la masse salariale. « Le chiffre d’affaires de la production agricole par emploi direct ne progresse plus, ni par hectare de SAU », s’inquiète l’économiste. Autour de 850 euros par hectare hors aides, les exploitations céréalières françaises sont moins performantes que l’Allemagne, le Royaume-Uni et même l’Italie. « La faible progression de la surface agricole par emploi, comparée aux autres pays de l’Union européenne, n’est pas compensée par une augmentation de la productivité par hectare, du fait notamment du plafonnement des rendements. »

Deuxième handicap: les frais d’amortissement sont les plus élevés en France. Ils représentent près d’un quart de la valeur de la production agricole, et ont tendance à augmenter sur une période récente alors qu’ils ont baissé chez les concurrents du nord de l’Europe. « Les conditions de financement de l’agriculture, avec des taux d’intérêt favorables, et la politique fiscale française incitent à la mécanisation », souligne le chercheur. Une analyse plus fine, réalisée sur les grandes exploitations céréalières européennes de plus de 150 hectares,montre que 34 % des charges sont imputables aux dotations aux amortissements en France, soit 10 points de plus que la moyenne européenne et 14 points de plus que l’Allemagne. En revanche, les charges foncières sont plus faibles.

PAS D’ÉCONOMIE SUR LES INTRANTS

Du côté des charges d’intrants, « alors que les agriculteurs ont fait des efforts pour réduire leurs utilisations d’engrais, les charges d’engrais ramenées à la valeur de la production agricole n’ont pas diminué depuis quinze ans et sont parmi les plus élevées », s’étonne Vincent Chatellier. Elles ont même augmenté sur la période 2003-2006, avant la flambée des prix des matières premières. Le chercheur fait le même constat pour les produits phytosanitaires. De là à conclure que le prix des engrais et des phytosanitaires augmente plus en France que dans les autres États membres, il n’y aurait qu’un pas… que le chercheur ne franchit pas.

 

(1) Ce sont les exploitations référencées dans l’Otex (orientation technico-économique des exploitations agricoles) n° 13 du Rica, réseau d’information comptable agricole.

 

Carte d’identité des exploitations céréalières de l'Union européenne

Les exploitations de grandes cultures spécialisées en céréales et oléoprotéagineux(1) représentent 11 % des exploitations agricoles de l’Union européenne, 23 % de la surface agricole utile (SAU) et 8 % des emplois. Elles assurent la production de 43% des céréales européennes ainsi que la moitié des oléoprotéagineux.

La surface moyenne par exploitation était de 72 hectares en 2006 (80 ha aujourd’hui). Les structures françaises se situaient à 108 hectares (120 ha aujourd’hui), une surface plus faible qu’en Allemagne (200 ha) et en Grande-Bretagne (167 ha) alors que les exploitations COP hongroises, espagnoles et italiennes sont plus petites (respectivement 85, 71 et 25 ha).

Les exploitations céréalières européennes emploient 1,2 unité de travail agricole (UTA) dont 20% relève du salariat, la France se situant à 1,4 dont 13 % sous forme salariée.

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