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Grâce à l'amélioration variétale, les maïs vont devenir moins frileux

Assez rapidement, avec la détection de nouveaux marqueurs génétiques, les obtenteurs devraient proposer des variétés plus tolérantes aux basses températures.

La tolérance au froid du maïs est rarement un critère évoqué dans le choix d’une variété. « Pourtant, ce critère est redevenu important avec les conditions climatiques plus chaotiques ces dernières années, remarque Josiane Lorgeou, spécialiste des variétés et de l’écophysiologie du maïs chez Arvalis. Mais il reste difficile à évaluer aujourd’hui. » Le plus souvent, cette tolérance se résume à parler vigueur en début de végétation. Pour Éric Luxey qui participe au choix des variétés chez Maïsadour, une plante qui présente une bonne vigueur au départ a plus de chance de produire un bon rendement. L’avis diverge pour Christian Lux, responsable agronomie et environnement à la coopérative alsacienne du Comptoir Agricole. Fort d’une trentaine d’années d’expérience, il affirme : « les plantes qui sont très vigoureuses au départ fabriquent plus de feuilles au détriment du système racinaire. Et au final, elles n’ont pas de meilleurs rendements. » Assisterait-on ainsi à une bataille d’experts ? « Aucunement, répond Éric François, chargé de développement chez Dekalb. Tous les deux ont raison. Les plantes sont soumises en Alsace, à des conditions climatiques plus contrastées. » À chaque région donc, sa particularité. En revanche, les deux conseillers sont d’accord sur un point. Pour les semis très précoces, une très bonne vigueur devient le critère numéro un. Éric Luxey estime jusqu’à 30 % la part de ces semis dans les terres sableuses de sa région. « En 2011, se rappelle le conseiller de Maïsadour, les semis implantés très tôt ont donné de très bons résultats parce que les conditions qui ont suivi étaient favorables. Quand un froid humide s’installe, nous voyons la différence au moment de la récolte entre une plante vigoureuse ou pas au départ. »


Un facteur parmi d’autres


Le choix d’une variété plus vigoureuse peut intervenir aussi selon les précédents culturaux. « Après une betterave, note Christian Lux, la structure du sol est souvent moins bonne. Les plantes les moins vigoureuses ont plus de mal à démarrer. » Cela rejoint l’analyse de Josiane Lorgeou. « La tolérance au froid est un facteur parmi d’autres de la composante du rendement. En termes de choix variétaux, hormis pour les semis très précoces, la hiérarchie des critères reste inchangée : précocité d’abord, rendement et régularité, tenue de tige et valeurs alimentaires. La vigueur vient ensuite comme la cerise sur le gâteau. »
Contrairement aux céréales à paille, il suffit de décaler la date de semis pour se soustraire des températures froides et éviter les pertes de pieds.
Or, nous assistons depuis une trentaine d’années à une élévation de la température. Selon Josiane Lorgeou, à même date de semis, on a gagné 150 degrés-jours en moyenne entre le 21 avril et le 31 octobre, ce qui correspond à deux groupes de précocité et sept à huit points d’humidité en moins à la récolte ! En quarante ans, les dates de semis ont été avancées de vingt jours !


Des marqueurs adaptés


Le semis plus précoce est donc recommandé pour mieux valoriser le potentiel de rendement, soit par un choix de variétés plus tardives, soit pour effectuer des récoltes à teneurs en eau du grain plus basses ou les deux. Or selon Arvalis, l’avancement de quinze jours des dates de semis avec le climat d’aujourd’hui n’est pas plus risqué qu’avec les dates d’il y a trente ans en termes de nombre de jours de levée, de durée semis-stade 10 feuilles et de nombre de jours de températures froides. Il n’en reste pas moins que la variabilité climatique entre les années justifie des recherches sur l’aptitude du maïs à supporter des températures basses.
Les variétés réagissent donc, selon leur génotype, plus ou moins bien à ces conditions froides. Tous les obtenteurs s’y intéressent. Jusqu’à présent, ils ont sélectionné les cultivars de façon empirique. Les candidats à l’inscription sont exposés à des conditions très froides. Les meilleurs candidats sont retenus. En règle générale, les types cornés présentent les meilleures caractéristiques en vigueur. Au fil des années, les variétés dentées affichent elles aussi de meilleures performances. Des sociétés allemandes, comme KWS, sont réputées pour proposer des variétés ayant une bonne vigueur. L’Inra d’Estrées-Mons étudie des cultivars issus des hauts plateaux d’Amérique latine qui, de par leur adaptation aux conditions climatiques, tolèrent bien les situations de gelée radiative.
Tout n’a pas encore été décrypté dans le fonctionnement physiologique de la plante. Néanmoins, de sérieuses avancées sont attendues dans les prochaines années. Des marqueurs génétiques sont en cours de détection grâce au programme Amaizing(1) dont l’objet est d’identifier notamment les facteurs génotypiques et phénotypiques de stress.
Selon Catherine Giauffret, spécialiste de la tolérance au froid à l’Inra d’Estrées-Mons, il sera possible pour les partenaires du projet d’effectuer dès 2016 un screening des cultivars et variétés en fonction des marqueurs détectés. Aux obtenteurs ensuite d’intégrer cette nouvelle donne dans leur programme de sélection. Chez Dekalb, les obtenteurs ont déjà calibré des marqueurs pour les stades 6 à 8 feuilles. L’objectif est de cumuler toutes les tolérances dans la même plante et, à très long terme, de baisser le zéro de végétation en dessous de 6 °C. Le maïs deviendrait moins frileux.

 

(1) Programme Investissement d’avenir doté de 27,5 millions d’euros sur huit ans et réunissant 24 partenaires publics et privés.

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