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Critiques et débats sur les bilans énergétiques et environnementaux
Divorce entre les médias et les biocarburants

Les biocarburants font à nouveau la « une » des journaux… mais pour y être critiqués et non plus encensés comme à l’automne 2006.

«L’impasse des biocarburants », c’est le titre d’un récent communiqué de France Nature Environnement annonçant l’envoi d’une lettre au président de la République pour lui demander, au moment où il s’apprête à assumer la présidence de l’Union européenne, de défendre une nouvelle politique énergétique et notamment de revenir sur les objectifs d’incorporation d’agrocarburants. « Il est temps de reconnaître que les agrocarburants sont une impasse énergétique, environnementale et alimentaire » estime FNE. On ne saurait être plus clair.

UN BILAN FORTEMENT REMIS EN CAUSE
Hier portés aux nues, aujourd’hui critiqués, les biocarburants ne laissent pas indifférents. Lors du Grenelle de l’Environnement, leur bilan énergétique et surtout environnemental a été fortement mis en cause. La hausse des prix des matières premières et des prix alimentaires, et la crise alimentaire qui en découle, a amené à se poser, à juste titre, la question de la concurrence entre productions alimentaires et non-alimentaires. Les biocarburants sont accusés, sinon d’être la cause première de l’augmentation des prix, du moins d’exarcerber la crise alimentaire. « La fabrication de biocarburants aujourd’hui est un crime contre l’humanité » dénonce Jean Ziegler, le rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation. Pour lui, les pays développés sont responsables de la flamblée des prix des denrées alimentaires de base dans le monde. « Quand on lance, aux États-Unis, grâce à 6 milliards de subventions, une politique de biocarburant qui draine 138 millions de tonnes de maïs hors du marché alimentaire, on jette les bases d’un crime contre l’humanité pour sa propre soif de carburant », déclare-t-il dans une interview à Libération (14 avril 2008).

UNE CAUSE PARMI D’AUTRES
Toutes les critiques ne sont pas aussi violentes. Pour l’Organisation mondiale pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) les raisons de la crise alimentaire actuelle sont connues : une production affectée par le changement climatique (sécheresse), des stocks au plus bas depuis les années 80, une demande croissante liée à l’augmentation de population mondiale mais aussi à l’amélioration qualitative de la consommation alimentaire (viandes et lait) des pays émergents, le détournement des terres pour la production de biocarburants et l’intérêt croissant des spéculateurs financiers pour les matières premières. À cela s’ajoute « le manque d’investissements dans la maîtrise de l’eau, les routes, les moyens de stockage (40 % des récoltes sont perdues faute de stockage approprié), le conditionnement, l’accès aux marchés » précise le directeur général Jacques Diouf. Lors du Grenelle de l’Environnement, différentes organisations non gouvernementales ont contesté le bilan énergétique des biocarburants, le rapport énergie dépensée/énergie produite, que ce rapport soit calculé à l’hectare ou à l’hectolitre produit. Est mis en cause également l’intérêt des biocarburants pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et lutter contre le réchauffement climatique. Une des décisions du Grenelle de l’Environnement a été de demander à l’Ademe(1), de refaire un bilan. La première phase de ce travail a été rendue publique. Elle porte sur la méthodologie d’établissement des bilans afin de pouvoir faire des comparaisons fiables. L’Ademe procède actuellement à l’application de cette méthode aux filières françaises de biodiesel et bioéthanol.

LE DIESTER N’AFFAME PAS LA PLANÈTE
Toutes ces attaques ont bien sûr provoqué des réactions de la part des producteurs français. Dans un communiqué, Prolea rappelle, chiffres à l’appui, que « la production de Diester, biocarburant issu du colza et de tournesol cultivés en France, n’affame pas la planète ». Même discours de la filière éthanol : « Le modèle français et européen de développement du bioéthanol n’a pas d’impact sur la sécurité alimentaire mondiale et aucune pause ne peut être justifiée à ce titre. » De plus, les biocarburants de première génération sont indispensables au respect des engagements français en matière d’énergies renouvelables. Luiz Lula da Silva lui-même, président du Brésil, deuxième pays producteur d’éthanol derrière les États-Unis, est monté au créneau « Ne me dites pas que les biocarburants provoquent la hausse des prix. Aujourd’hui, il y a plus de gens qui mangent, les Chinois mangent, les Brésiliens mangent, et les gens vivent plus longtemps. » !

 

 

SÉMANTIQUE

Le poids des mots !

Biocarburant - n. m. désigne les carburants liquides issus de productions agricoles renouvelables et utilisés en complément ou en remplacement des carburants d’origine pétrolière. Synonyme: agrocarburants. Voir aussi phytocarburants et nécrocarburants. Pourra-t-on bientôt lire ces lignes dans le dictionnaire ?

Le mot biocarburant est apparu il y a une quinzaine d’années au moment du développement du Diester et de l’emploi de l’éthanol pour fabriquer de l’ETBE, composé oxygéné ajouté aux essences. Mais le préfixe « bio » est contesté par certains estimant que la production des biocarburants n’a rien de bio, au contraire, elle consomme des intrants dont l’azote coûteux en énergie pour sa synthèse. C’est ainsi qu’au Grenelle de l’Environnement certains ont voulu imposer « agrocarburant », voire phytocarburant (phyto = plante en grec). Quant aux opposants acharnés aux agrocarburants, ils parlent de nécrocarburants, nekros en grec voulant dire «mort ». À chacun son vocabulaire mais les mots ne sont pas neutres. Chantal Jouanno, présidente de l’Ademe, précisait récemment que « biocarburant est le terme employé dans les textes de loi et les réglementations ».

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