Devenir organisme collecteur pour vendre en direct ses récoltes
L’Hexagone compte près de 1 300 organismes stockeurs ou collecteurs. Ce ne sont pas que des coopératives et des négoces. Il s’agit aussi d’industriels, de meuniers… et d’agriculteurs. Quelles démarches faire pour avoir ce statut ? Quels intérêts ? Décryptage.
Vendre ses céréales en direct à un industriel ou à un éleveur n’est pas autorisé. La vente doit obligatoirement se faire au profit d’un organisme stockeur (OS), officiellement appelé organisme collecteur, qui doit être agréé par FranceAgriMer. C’est la raison pour laquelle certains industriels, meuniers, fabricants d’aliments ont choisi de demander ce statut pour pouvoir acheter en direct sans avoir à passer par l’intermédiaire de coopératives ou de négoces, les OS historiques et habituels. Une démarche qui a donné des idées à certains agriculteurs. Plus qu’on ne le pense, les agriculteurs qui demandent le statut de collecteur le font pour vendre au détail à des particuliers. Une façon de garder la marge de l’OS pour soi, ou encore de conditionner ou de transformer sa production sur l’exploitation. Pour avoir ce statut, il suffit de déposer une déclaration auprès de FranceAgriMer (voir encadré). La procédure s’est simplifiée : auparavant, les organismes stockeurs devaient obtenir un agrément, délivré par le même organisme.
Une gestion administrative consommatrice de temps
Même si vous ne prévoyez pas d’activité de négoce (achat-revente), mais que vous demandez le statut de collecteur uniquement pour vendre vos céréales et oléagineux en direct, vous devez créer une structure dédiée. En effet, l’activité de collecteur est une activité commerciale. La structure doit avoir la qualité de commerçant, donc être inscrite au registre du commerce. Cette obligation implique la nécessité de tenir une double comptabilité, de faire un certain nombre de déclarations en double. Elle a également des conséquences sociales et fiscales. Si la déclaration à déposer est facile à renseigner et qu’aucun volume minimum de collecte n’est requis, ce sont les obligations qui découlent de ce statut qui peuvent être plus compliquées à tenir, car contraignantes. "Je gagne 18 000 euros de marge, mais les frais de gestion supplémentaires s’élèvent à 15 000 euros", confie un agriculteur qui se sert de son statut d’OS pour vendre sa production seulement.
Tout d’abord, le collecteur doit tenir une comptabilité matières avec le détail des stocks et des mouvements de céréales, et ce, chaque mois. Cette comptabilité doit séparer les stocks en propriété (de collecte et de négoce), ceux en dépôt qui restent la propriété de l’agriculteur dépositaire, et les stocks intermédiaires. Ces derniers correspondent aux quantités stockées pour le compte de tiers ou chez un tiers avec location de capacité de stockage, ce qui est rarement le cas des agriculteurs. S’il collecte les céréales d’autres producteurs, le collecteur est tenu de respecter la réglementation relative au paiement comptant des céréales, c’est-à-dire qu’il doit impérativement régler le prix des céréales au moment du transfert de propriété. Il a l’obligation d’assurer les prélèvements et reversements des taxes et cotisations en vigueur, qui viennent donc en déduction du prix payé.
L’utilisation d’équipements spécifiques est requise
Le collecteur doit aussi fournir aux autorités nationales et communautaires (par le biais de FranceAgriMer) des informations permettant d’établir et de fiabiliser les bilans céréaliers. Ces derniers sont nécessaires au bon fonctionnement et au suivi des marchés. Ces déclarations statistiques, faites mensuellement, comprennent les flux, les stocks et les grandes utilisations de grains collectés. Enfin, l’utilisation d’équipements permettant d’assurer la loyauté des transactions commerciales est imposée aux collecteurs. Il s’agit notamment d’un système de pesée avec contrôle périodique. Ce contrôle est attesté par une vignette verte autocollante de la Dreal, Direccte, ou Driee (anciennement Drire). Des matériels homologués de dosage d’humidité et d’analyses physiques (poids spécifiques, impuretés et grains mitadinés pour le blé dur) doivent également être à la disposition du collecteur. Le statut de collecteur peut amener les services de la répression des fraudes (DGCCRF) à passer contrôler les silos afin de vérifier que le grain est stocké dans de bonnes conditions.
Le non-respect de ces obligations est puni par l’article D 666-9 du Code rural. Selon la gravité du manquement, la sanction peut aller de la suspension du droit de collecter des céréales pour une durée maximale de six mois, jusqu’à l’interdiction d’exercer cette activité. Dans ce cas, une nouvelle déclaration en qualité de collecteur de céréales ne pourra être déposée qu’à l’issue d’un délai de cinq ans. La décision de suspendre ou d’interdire l’activité est prise par le directeur général de FranceAgriMer et doit être motivée.
Un dossier de déclaration léger
Le dossier de déclaration doit être demandé auprès des services territoriaux de FranceAgriMer, à la direction régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DRAAF) dont dépend le collecteur. Ce dossier doit contenir :
- une pièce justifiant de votre qualité de commerçant, par votre inscription (ou celle de votre société) au registre du commerce ;
- si vous êtes en société, une pièce justifiant qu’elle est constituée conformément à la réglementation française ;
- une pièce justifiant que votre domicile, ou votre siège social, est basé en France ou dans un État membre de l’Union européenne
- une attestation sur l’honneur du déclarant de ne pas se trouver en état de liquidation judiciaire et de ne pas avoir fait l’objet, au cours des cinq dernières années, d’une condamnation à une peine correctionnelle pour vol, escroquerie, abus de confiance ou tous autres faits contraires à la probité, ou à une peine criminelle. Vous devez également préciser que vous n’avez pas été sanctionné pour avoir collecté, acheté ou cédé des céréales sans le statut de "collecteur", ou pour ne pas avoir reversé la taxe destinée au financement de FranceAgriMer.