Désherbage : une solution pour tester la résistance aux herbicides dans ses champs
Les échecs de désherbage ne sont pas rares en situation de grandes cultures. Comment savoir si cela est dû à la résistance d’adventices aux herbicides appliqués ? Des services de diagnostics de l'efficacité herbicides sont proposés par des prescripteurs.
Les échecs de désherbage ne sont pas rares en situation de grandes cultures. Comment savoir si cela est dû à la résistance d’adventices aux herbicides appliqués ? Des services de diagnostics de l'efficacité herbicides sont proposés par des prescripteurs.
« Pour les agriculteurs qui suspectent un défaut d’efficacité d’herbicides sur leurs parcelles, nous proposons une analyse de résistance de graminées (vulpin, ray-grass) depuis 2023 », présente Jean-François Barot, coordinateur technique chez Soufflet. Notre service propose un check-up complet de la performance de plusieurs herbicides pour montrer ce qui est encore efficace sur sa parcelle et ce qui ne fonctionne plus. »
Deux packs sont ainsi proposés par Soufflet. Dans le pack 1, des tests sont effectués pour 9 matières actives sous forme de produits herbicides du marché (parfois mis en association) pour représenter tous les modes d’action herbicides disponibles sur céréales. Le pack 2 porte sur 14 matières actives avec les modes d’actions que l’on trouve sur colza et maïs en plus des céréales à paille. Le coût s’élève à 320 euros pour le pack 1 et 450 euros pour le pack 2 pour des tests sur une parcelle.
Le tarif peut paraître élevé. « 450 euros, c’est le prix d’un Atlantis Pro sur une douzaine d’hectares. C’est cher, mais si c’est ramené à un prix de traitement qui n’a pas fonctionné, cela peut être rentabilisé », justifie Jean-François Barot. L’objectif est de permettre aux agriculteurs de miser sur des solutions efficaces de désherbage.
Le flufénacet encore efficace associé au diflufenicanil
À titre d’exemple, plusieurs analyses chez des agriculteurs montrent des résistances du ray-grass au flufénacet (produit Sunfire). « Dans notre pack, nous avons Antilope dans les produits testés, associant le flufénacet au diflufenicanil (DFF). Ce produit a montré des efficacités de 90 % ou plus sur ray-grass quand le flufénacet seul n’était efficace qu’à 20 ou 30 %. On passe ainsi du rouge au vert en termes d’efficacité entre les deux herbicides à base de flufénacet. » La synergie entre le DFF et le flufénacet dans des produits est confirmée avec ce type de tests.
La coopérative Axéréal présente le même type de service. « Pour un coût de 600 euros, nous proposons un panel complet de 18 matières actives, avec certaines testées à deux doses, pour un panorama des utilisations sur les cultures d’hiver et de printemps de la rotation, précise Jérémy Isaac, responsable agronomie et santé des plantes de la coopérative. Par exemple, chez des agriculteurs en rotation colza blé orge qui connaissent des échecs de désherbage sur graminées, nous remarquons qu’une molécule comme le DMTA-P fonctionne encore dans ces situations. Nous leur conseillons d’introduire une culture comme le maïs dans la rotation si possible pour utiliser le DMTA-P contre le ray-grass notamment. »
Des antigraminées foliaires encore efficaces dans une situation sur deux
Sur la base de 120 analyses réalisées chez des agriculteurs en 2024, le spécialiste peut déjà faire un état des lieux global des efficacités herbicides sur ray-grass ou vulpin sur la zone couverte par Axéréal. « Nous avons la bonne surprise de constater que des molécules montrent encore une bonne efficacité sur ray-grass comme le foramsulfuron utilisable sur maïs. Par ailleurs, les antigraminées foliaires à base de mésosulfuron et iodosulfuron-méthyl (Atlantis Pro…) montrent encore une efficacité supérieure à 50 % sur une parcelle sur deux, alors que pour le pinoxaden (Axial Pratic…), cette proportion tombe à 15 %. »
Des remontées de terrain mettent en avant des échecs de désherbage sur graminées avec la propyzamide utilisée sur colza, avec des suspicions de résistance. Jérémy Isaac a pu réfuter cette hypothèse au travers des tests réalisés chez des agriculteurs. « Les résultats montrent que l’efficacité de la propyzamide ne se dégrade pas. Il n’y a donc pas de résistance à cet herbicide. Les échecs de traitement sont liés à un problème de positionnement de la propyzamide et de la température au moment de l’application. »
Plus de 1 000 tests herbicides en France en 2025
Ce service de diagnostic repose sur une société allemande qui réalise les tests, Agris42. « Cette société développe ses services de diagnostic depuis trois ans en France, proposés pour toutes les adventices et l’ensemble des molécules, présente Guillaume Leclercq, consultant en France pour Agris42. Aujourd’hui, les diagnostics de résistance concernent à 90 % des graminées adventices dont le ray-grass tient une large part : 80 % (vulpin à 20 %). 600 analyses ont été réalisées en France en 2024 et le chiffre a été multiplié par 2 en 2025. »
Le diagnostic proposé par Agris42 présente un inconvénient : son temps de réponse. Les analyses reposent sur des échantillonages de graines de graminées prélevées à maturité (avant moisson) et testées à l’automne qui suit après leur levée de dormance et germination. Les résultats sont disponibles en décembre et ne sont donc exploitables que pour la campagne qui suit, soit deux années après le constat d’un échec de désherbage s’étant traduit par la commande d’analyse. Mais cette durée de test est incompressible et les résultats sont tangibles aux dires des utilisateurs.
Des diagnostics rapides pour un panel limité de molécules
Il existe des diagnostics rapides de résistance, réalisés sur analyses génétiques de feuilles. Bayer propose un de ces tests sur vulpin et ray-grass, Herbisecur, avec des résultats sous cinq semaines après l’envoi des échantillons. Il ne s’applique qu’à deux familles d’herbicides antigraminées foliaires (inhibiteurs de l’ALS et de l’ACCase). Il coûte 675 euros HT. Le service est mis à disposition via la distribution agricole. La société Nufarm a proposé un test de ce type, pour déceler les résistances de coquelicot aux herbicides inhibiteurs de l’ALS à un moment où ce type de phénomène émergeait. Mais le service a été mis en suspens depuis que de nouvelles solutions de désherbage se montrent efficaces contre le coquelicot. Les diagnostics peuvent donc s’appliquer à toutes les adventices, au-delà du vulpin et ray-grass.