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Dégâts d’oiseaux : déclarations simplifiées pour autorisations de réguler

Corbeau freux, corneille noire, pigeons… la régulation de ces oiseaux est un moyen de limiter les dégâts aux cultures, à condition d’établir la preuve de leur impact. Cela passe par les déclarations de dégâts avec une nouvelle appli qui les simplifie.

Sur les levées de maïs et de tournesol, pigeons et corvidés sont responsables de plusieurs dizaines de millions d'euros de dégâts selon les années.
Sur les levées de maïs et de tournesol, pigeons et corvidés sont responsables de plusieurs dizaines de millions d'euros de dégâts selon les années.
© Chambres d'agriculture France

Les dégâts d’oiseaux aux champs ne sont pas indemnisés au contraire de ceux de grands gibiers. Il est toutefois important de faire des déclarations de dégâts car elles permettent d’évaluer l’impact économique des dommages causés dans chaque département. Les pouvoirs publics s’appuient ensuite sur ces données pour procéder si besoin à un classement en espèce susceptible d’occasionner des dégâts (Esod) des oiseaux responsables. « Le classement est établi pour une période de trois ans et permet de mettre en œuvre des mesures de régulation (tirs, piégeages…) après arrêté préfectoral », précise Alexis Soiron, chargé de mission faune sauvage à chambres d’agriculture de France.

L’administration demande les preuves des réels dégâts aux cultures occasionnés par les espèces. La méthodologie de classement passe, entre autres, par la démonstration d’un impact significatif d’au moins 10 000 euros de dégâts par année sur une période de trois ans pour une espèce dans un département. « Un impact d’un tel montant, cela ne paraît pas grand-chose à démontrer à l’échelle d’un département, mais sans déclaration de dégâts, le classement en Esod est compliqué à justifier », souligne Alexis Soiron.

Une appli de signalement de dégâts de la faune sauvage

Les producteurs ont la possibilité de remplir des déclarations de dégâts auprès de leurs directions départementales des territoires (DDT), avec l’aide d’organisations comme les fédérations départementales de chasseurs. Le formulaire administratif fait quatre pages et peut paraître fastidieux à remplir. « En concertation avec les DDT, nous avons mis au point une application digitale nommée Signalement de dégâts de la faune sauvage, qui permet de remplacer les formulaires de déclarations de dégâts d’Esod, informe Alexis Soiron. Dans son champ, l’agriculteur a juste à prendre des photos des dégâts, à établir la localisation GPS et à remplir un petit questionnaire avec des informations sur la parcelle et sur l’exploitation. Cela ne prend que quelques minutes. La déclaration peut être envoyée de son champ. »

Lancée début décembre 2022, l’appli est ouverte dans plus de quarante départements. Son déploiement est en cours de négociation dans les régions restantes. L’outil est téléchargeable gratuitement sur son téléphone portable mais il faut se créer un compte pour l’utiliser. Attention, l’application n’est pas utilisable pour les dossiers d’indemnisation de dégâts de grands gibiers : les fédérations de chasse ont leurs propres procédures.

« En 2021 en Charente, nous avons recueilli près de 300 déclarations de dégâts d’oiseaux qui ont permis d’estimer un impact se chiffrant à plus d’un million d’euros, rapporte Christian Daniau, président de la chambre départementale d’agriculture et agriculteur à Saint-Ciers-sur-Bonnieure. Dans notre département, nous avons le pigeon ramier, la corneille noire et le corbeau freux dans notre liste des Esod puisque nous avons prouvé leur impact dommageable sur les cultures. Dans un département voisin, le corbeau freux ne figure pas dans cette liste, peut-être parce qu’il n’y a pas eu suffisamment de déclarations de dégâts pour établir la preuve de son impact. »

Un outil commun à tous, simple d’utilisation

La démarche départementale a été élargie à la région Nouvelle-Aquitaine en 2022. « Nous avons recueilli 500 déclarations, ce qui est un peu décevant, reconnaît Laetitia Seguinot, de la chambre régionale d’agriculture. La démarche déclarative individuelle se faisait via plusieurs outils, ce qui est un frein à mon sens. La mise en fonction de la nouvelle application sera une bonne solution, avec un outil commun à tous, simple d’utilisation. »

Chaque département contribue financièrement au développement de l’outil qui, début février, était développé dans dix des douze départements de la région. « L’appli est au service de tous les agriculteurs et pour toutes les organisations agricoles telles les coopératives et négoces qui peuvent s’en faire le relais, dans l’objectif de garder les moyens de défendre les cultures », ajoute Christian Daniau.

Les données récoltées au niveau départemental sont centralisées par la suite au niveau national à chambres d’agriculture de France. Elles enrichissent une base de données scientifiques relatives à la pression de la faune sauvage sur les cultures et les élevages. Ces signalements peuvent servir de base aux différentes mesures à mettre en place pour minimiser l’impact des oiseaux.

Des autorisations de tirs souhaitées toute l’année

Pour toujours mieux réduire l'incidence des volatiles, Christian Daniau souhaiterait « pouvoir tirer les oiseaux toute l’année car c’est quand le problème se pose qu’il faut pouvoir réguler ». Pour l’heure, les autorisations de tirs des Esod sont fixées sur une période qui prend fin le 31 juillet. Il est ensuite interdit de réguler du 1er août jusqu’à l’ouverture de la chasse.

Entre les systèmes d'effarouchement et les produits appliqués aux semences ou en cultures, il n’existe pas de moyens véritablement efficaces d’empêcher les oiseaux d’occasionner des dégâts aux champs, avait conclu le colloque sur les dégâts d'oiseaux du 24 novembre 2022 à Paris. La régulation peut être un palliatif localement.

 

 
Christian Daniau, agriculteur et président de la chambre d'agriculture de Charente : "En 2021 dans le département de la Charente, nous avons recueilli près de 300 déclarations de dégâts d’oiseaux qui ont permis d’estimer un impact se chiffrant à plus d’un million d’euros." © Chambre d'agriculture Nouvelle Aquitaine

 

La destruction des nuisibles est-elle rentable ?

Seize millions d’euros (M€) : c’est le coût estimé par Frédéric Jiguet, ornithologue au MNHN (1), pour détruire annuellement 500 000 corneilles. Selon le chercheur, « il n’est nullement évident que cet investissement permette de réduire les coûts des dégâts d’un montant équivalent. L’efficacité des destructions n’est ni prouvée, ni rentable ». Les dégâts déclarés imputés aux corneilles sont chiffrés en France à environ 3 millions d’euros par an sur la période 2015-2018 selon le MNHN. Mais la part de dégâts non déclarés est certainement autrement importante. La nuisibilité économique annuelle des corvidés et pigeons a été estimée par Arvalis et Terres Inovia entre 25 et 45 M€ sur maïs et 20 M€ sur tournesol.

(1) Muséum national d’histoire naturelle.

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