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Patate douce : Comment augmenter la durée de conservation ?

La technique du curing améliore la durée de conservation de la patate douce tout en limitant les pertes de tubercules. Elle permet d’allonger la période de commercialisation d’un produit français de plus en plus recherché.

La patate douce est une culture en plein développement. Bien que nécessitant certaines attentions, sa production est relativement aisée et son itinéraire technique est éprouvé et présenté dans plusieurs fiches techniques en fonction des conditions de cultures : plein champ, sous abri, agriculture biologique. Après récolte, les tubercules de patate douce doivent être conservés afin d’étaler leur commercialisation sur une large période. « De manière conventionnelle et naturelle, il est possible de conserver la patate douce deux à trois mois après sa récolte », mentionne Laurent Camoin, ingénieur-conseil maraîchage de la Chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône.

Néanmoins, la qualité des tubercules peut déjà s’altérer avec le développement de moisissure à partir de blessures très souvent subies à la récolte. L’allongement du délai de conservation, au-delà du mois de janvier, présente le double avantage de proposer un produit origine France sur une longue période et de bénéficier de prix souvent plus rémunérateurs. C’est pour cela qu’à la demande de la production de son département, Laurent Camoin s’est intéressé à comment augmenter la durée de conservation de la patate douce.

« J’ai travaillé à partir de synthèses de travaux de plusieurs universités américaines dans la publication Postharvest handling of sweetpotatoes [Gestion post-récolte des patates douces, ndlr] ainsi que d’échanges avec Philippe Vernier, agronome spécialiste des plantes tropicales à racines et tubercules au Cirad de Montpellier », rapporte l’ingénieur dans Treiz’Maraîchage. Dans une note technique, il y décrit les techniques du curing et de stockage qui permettent de renforcer l’épiderme, de cicatriser les tubercules rapidement, d’éviter le développement de pourritures de conservation, d’augmenter considérablement la durée de conservation et de commercialisation des tubercules. « Mais cette technique est inutile si la commercialisation est immédiate, sans phase de stockage », fait-il remarquer.

Attention à ne pas abîmer les tubercules

Les préconisations pour améliorer la durée de conservation de la patate douce commencent aux champs. « Lorsque le stade de récolte est déterminé, en général lié à la taille moyenne des tubercules par rapport à la demande du marché, la végétation est broyée a minima sept à dix jours avant la récolte », précise Laurent Camoin (voir encadré). Cette action est similaire en culture de pomme de terre et permet de fortifier l’épiderme et de démarrer la phase de maturation de l’amidon en sucre. Lors de la récolte, il faut faire très attention à ne pas abîmer l'épiderme très fragile et les tubercules qui se cassent facilement.

Eviter les frottements et chocs. « Les récolteuses utilisées pour les grandes surfaces doivent être adaptées dans ce sens. Cela permettra une conservation plus aisée », commente-t-il. Faire sécher les tubercules au champ au moins 12 h et jusqu'à 24 h avant l’entrée en chambre chaude, car ce temps d’attente au champ permet une meilleure efficacité de la technique de curing pratiquée par la suite. « Si les tubercules ne sont pas complètement secs (contact avec la terre), ce n’est pas grave car l’étape suivante est le lavage », mentionne le spécialiste. Au moment de leur lavage, les tubercules doivent être versés dans une cuve remplie d’eau, et non dans une cuve vide, afin de limiter les chocs préjudiciables par la suite et d'éviter de les casser et d’abîmer la peau des tubercules.

Le curing en chambre chaude

 
La chambre chaude doit être absolument ventilée avec un débit d’air de 6 à 12 l d’air par heure et par kg stockés. © L.Camoin

Une fois lavés, les tubercules sont conditionnés en palox ou caisses et sont disposés dans une chambre chaude à une température constante de 29°C et une hygrométrie (humidité de l’air) de 85 à 90 % pendant sept jours. « Il s’agit là de la phase de curing proprement dite qui doit permettre le durcissement ou la cicatrisation de la peau des tubercules », précise Laurent Camoin. La température, l’hygrométrie et la durée sont très importantes à respecter. Si la température est plus basse, les tubercules peuvent se mettre à germer. Si la durée est trop courte ou l’hygrométrie est trop basse, la cicatrisation est incomplète. « La durée ne doit pas dépasser sept à dix jours, sinon il y a aussi un risque de germination », prévient-il.

La chambre chaude doit être absolument ventilée. L’idéal est une ventilation négative horizontale, c’est-à-dire un extracteur d’air à flux horizontal. A défaut, un ventilateur classique à débit d’air adapté peut suffire. Le débit d’air est important : 6 à 12 l d’air par heure et par kilogramme de patates douces stockées. Il est très important que les tubercules sèchent pendant toute la phase de curing pour favoriser la cicatrisation et l’épaississement de la peau. « Ainsi, il ne doit pas y avoir d’eau sur les murs de la chambre chaude, et encore moins sur les tubercules », conseille le spécialiste. La perte de poids normale après cette phase ne doit pas dépasser 5 à 8 % du poids fraîchement récolté.

 

Un stockage en chambre froide

A la fin des sept jours de curing, la phase de conservation et stockage démarre. Les palox ou caisses sont disposés en chambre froide à une température de 13°C et une hygrométrie toujours comprise entre 85 et 90 %. La chambre de stockage doit être ventilée correctement, les tubercules doivent rester secs. « Il faut que la baisse de température soit brutale entre la fin du curing en chambre chaude (29°C) et la mise en chambre froide (13°C). Sinon, il y a risque important de germination des tubercules », prévient Laurent Camoin pour conclure sur cette technique. Selon ses observations réalisées chez des producteurs l’ayant déjà mise en application, le curing permet de conserver les tubercules de patate douce jusqu’aux mois de mars-avril sans perte de poids liée au dessèchement. Certains producteurs ont ainsi conservé des tubercules jusqu’en juin.

Calibre et couleur des tubercules

Le calibre des tubercules de patate douce est fonction du marché visé. En production conventionnelle, et pour une commercialisation auprès de distributeurs, le calibre tend à être « moyen ». « Soit l’équivalent d’un volume de deux bananes », image Laurent Camoin, ingénieur-conseil maraîchage de la Chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône. Pour la vente directe et les productions issues d’agriculture biologique, les calibres des tubercules sont souvent plus hétérogènes avec des tailles et diamètres beaucoup plus importants. La demande des consommateurs est essentiellement orientée sur la patate douce à chair orange. « La couleur de la peau peut varier de l’orangé, comme avec la variété Beauregard, traditionnellement cultivée, au rose avec Orléans, variété plus récente », précise le spécialiste.

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