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A Nantes, le maraîcher Olivier Durand livre des chefs étoilés

Avec 1 000 m² en hors-sol dans le centre de Nantes, en plus d'une exploitation comprenant 2 500 m² de serre en sol et 500 m² en plein air, Olivier Durand est sans doute un des plus petits maraîchers de France. La technicité et le choix de créneaux porteurs lui permettent d’en vivre.

En été, cinq personnes travaillent sur les deux sites, pour 3,5 Equivalents Temps Plein. © V. Bargain
En été, cinq personnes travaillent sur les deux sites, pour 3,5 Equivalents Temps Plein.
© V. Bargain

Basé aux Sorinières, à 10 km au sud de Nantes, Olivier Durand est un maraîcher plutôt atypique dans le paysage du maraîchage nantais. Installé en 2010, il exploite seulement 4 000 m² de surface de légumes, qui représentent 2,5 Equivalents Temps Plein à l’année. Ingénieur agronome de l’Hepia, en Suisse, qui forme aux métiers de l’horticulture, de la pépinière, de l’arboriculture, de la viticulture et du maraîchage, il a d’abord passé sept ans à faire de la recherche terrain sur les systèmes agricoles au Canada, au Japon, en Bolivie, en Thaïlande et en Côte d’Ivoire, puis comme technicien maraîcher en Suisse. « J’y ai beaucoup appris sur les techniques adaptées aux petites surfaces, la fertilité des sols, les maladies, les différents légumes, explique-t-il. Au Japon, la surface agricole ne représente que 11 % du territoire, les jardins familiaux font 2 m². En Bolivie, la ressource en eau est limitée à 4 000 m d’altitude, ce qui implique des techniques spécifiques pour garder l’eau. Puis j’ai voulu revenir dans ma région natale et mettre en pratique mon idée du maraîchage. Je voulais cultiver une diversité de légumes et produire sans aucun traitement, en favorisant les équilibres naturels. L’expérience a montré que ça peut fonctionner. » En 2010, il s’installe donc aux Sorinières avec 2 500 m² de serre et 2 500 m² en extérieur, surface réduite par la suite à 500 m². «Il est très difficile de trouver des terres en région nantaise, souligne le maraîcher. J’avais un espace très contraint et j’ai dû faire avec ! »

Associations de cultures et rotations

Olivier Durand exploite aujourd’hui sur son site principal 2 500 m² en sol dans une serre verre datant de 1973, de 2,5 m de hauteur sous chéneaux, certifié en AB. Il y produit une grande variété de légumes qui sont vendus principalement à des chefs de Nantes (Jean-Yves Guého, restaurant l’Atlandide, Lucie Berthier, restaurant Sépia…), au grossiste parisien Terroirs d’Avenir, qui livre des restaurants et a ses propres magasins, et à l’épicerie vrac Colégram à Rezé, tout près de l’exploitation. « Au départ, je cultivais 40 espèces, précise le maraîcher. J’ai un peu réduit par la suite. » La ferme produit tout de même une très large gamme de légumes (tomates, concombres, courgettes, poivrons, poireau, fraise, melon, mâche, navets, carottes…) ainsi que quelques espèces découvertes au Japon comme le pe-tsai et le pak choï, le shungiku, un chrysanthème comestible, le shizo, une herbe aromatique… Un gros travail est fait sur les variétés. « Je travaille à la fois le goût, la texture et la couleur des légumes. Les trois critères sont importants pour les chefs, en plus du fait que les légumes soient sains. Cela m’amène à tester de nombreuses variétés, pour évaluer leurs qualités gustatives et agronomiques, et à faire ma propre sélection. » Le maraîcher cultive ainsi une trentaine de variétés de tomate, indéterminées et déterminées. Il a relancé la carotte de Chantenay, variété ancienne de carotte courte, très gustative. L’espace étant contraint, tout est fait pour exploiter au maximum la surface disponible. Chaque planche de culture de 80 cm de large accueille en général deux, voire trois cultures associées occupant l’espace différemment : tomate-haricot vert, tomate-salade, concombre-haricot vert, maïs-melon-haricot vert… Les cultures se succèdent également dans l’année. Pour maintenir la fertilité du sol, celui-ci est analysé régulièrement et reçoit des apports de compost et fumier en pellets et des engrais verts (trèfle, sarrasin, phacélie, avoine noire). « Nous n’avons pas de problème de sol ni de maladies ou ravageurs, assure Olivier Durand. En 2018, nous avons eu des attaques de Tuta absoluta, mais le problème s’est réglé grâce aux Macrolophus naturellement présents dans la serre. »

Agriculture urbaine pour un restaurant

Une évolution en 2015 a été la création au centre de Nantes du Potager de la Cantine. « La Cantine est un restaurant éphémère situé près de l’espace très touristique des Machines de l’Île et qui sert 100 000 couverts par an de mai à octobre, indique Olivier Durand. Je lui fournissais déjà des légumes. Son fondateur m’a demandé si je pouvais créer près de la Cantine un potager qui puisse alimenter le restaurant et servir d’espace pédagogique. » Depuis, le maraîcher cultive 1 000 m² de fruits et légumes (salades, tomates, concombres, carottes, pommes de terre, fruits divers…) en plein centre de Nantes, sur les quais de la Loire. En 2019, il a notamment fourni 70 % des salades consommées dans le restaurant. « L’agriculture urbaine se développe en France, analyse-t-il. Les agriculteurs, avec leur savoir-faire, doivent avoir leur place dans ce développement qui permet de créer du lien entre les urbains et l’agriculture. » Enfin, en complément de son activité de maraîchage, Olivier Durand est aussi consultant en agriculture urbaine. Outre des formations, il a aidé à la création du potager du restaurant l’Atlantide, à celui de l’Abbaye de Fontevraud (Maine-et-Loire) qui fournit les restaurants du site… Au final, la vente des légumes apporte 67 % du chiffre d’affaires, celle de plants de légumes 5 % et le reste de l’activité 28 %. « Et nous avons très peu d’intrants, précise Olivier Durand. Nous produisons tous nos plants et une partie des semences, nous sommes très peu mécanisés et utilisons très peu d’énergie. Nos seuls achats sont du fumier, du terreau, des emballages… Les deux sites permettent ainsi d'avoir 2,5 ETP à l’année et 3,5 ETP en saison. »

 

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Parcours

2000 BTS Productions horticoles

2004 ingénieur agronome à l’Hepia (Suisse)

2004-2009 recherche terrain au Canada, au Japon, en Bolivie, en Thaïlande, en Angleterre et en Côte d’Ivoire

2009-2010 conseiller technique cultures maraîchères en Suisse

2011 installation

2015 création du Potager de la Cantine

Un suivi dans le cadre du projet FEW-meter

 
Les serres ne sont pas chauffées et la consommation d’eau est limitée au maximum. « Depuis 2019 et jusqu’en 2021, nous sommes suivis dans le cadre du projet européen FEW-meter, porté par AgroParisTech, qui vise à mesurer l’efficience de l’agriculture urbaine par rapport à l’énergie et l’eau, précise Olivier Durand. Nous mesurons toutes nos consommations d’énergie, en production, transport… et notre consommation d’eau. Nous notons aussi la production au m². Les premiers résultats sont encourageants. Produire sur une petite surface peut permettre une grande productivité. »

 

Le Potager de la Cantine : un défi technique

 
La création du Potager de la Cantine a été un vrai défi technique. « La demande était de créer un potager sur un parking bitumé, explique Olivier Durand. Nous avons donc dû nous organiser pour produire en hors-sol. Nous avons fait le choix d’utiliser des palettes et des bacs de substrat et de rehausser les cultures pour qu’elles soient à hauteur d’homme. » 2 660 palettes ont été nécessaires pour créer la structure accueillant les bacs. « Cela permet aussi de faire circuler l’air sous les bacs, un point important car, du fait de l’environnement bitumé et bétonné, nous sommes dans un îlot de chaleur. Il ne gèle pas et la température y est toujours supérieure de 2 à 5°C à celle de notre autre site. Le substrat peut monter à plus de 50°C. » Deux types de substrat, mis au point avec Tourbières de France, sont utilisés, à base de compost, terre et tourbe pour l’un d’entre eux. « Il faut une bonne technicité pour gérer la consommation en eau », souligne le maraîcher. Les cultures se faisant en hors-sol, l’espace n’est par contre pas certifié en bio.

 

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