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Maraîchage en Loire-Atlantique : « Nous semons très dense, à 70 kg/ha, pour que le sorgho couvre rapidement le sol »

Face à des problèmes de fatigue des sols, Olivier Terrien, maraîcher en Loire-Atlantique, a diversifié ses cultures et développé les couverts végétaux.

<em class="placeholder">Olivier Terrien, maraîcher à Divatte-sur-Loire</em>
Olivier Terrien, maraîcher : « Si nous n’avions pas fait tous ces changements, nous ne serions plus là aujourd’hui. »
© V. Bargain

« Par le passé, la désinfection des sols permettait de cultiver mâche sur mâche, rappelle Olivier Terrien, de la SCEA Saint-Simon, à Divatte-sur-Loire, en Loire-Atlantique. Mais avec le retrait des désinfectants, nous n’avons plus eu de solution de désinfection, à part la vapeur qui consomme de l’énergie fossile et est très lourde à mettre en œuvre. Le rendement en mâche a alors commencé à baisser. Chaque année, les bioagresseurs, notamment le Pythium, faisaient de plus en plus de dégâts. Il y a dix ans, le rendement était tombé à 600 grammes par mètre linéaire, contre 1 kilo auparavant. Nous avons alors décidé de changer de système. »

Avec ses associés Frédéric Olivier et Thierry Jousseaume, Olivier Terrien cultive 120 hectares de sols sablo-limoneux, dont 27 de grands abris plastiques. La SCEA, qui adhère à Nanteurop et emploie 40 ETP, produit 1 000 tonnes de mâche par an, en plein champ l’été et sous abri l’hiver, 1 800 tonnes de poireau de début mai à fin décembre et 1,5 million de bottes de radis, sous abri l’hiver et en plein champ l’été. S’y ajoutent de 150 à 200 tonnes de navet et désormais 150 tonnes d’épinard et 20 de roquette.

Casser le cycle des bioagresseurs

Une décision a été de rééquilibrer et diversifier les cultures. « Nous avons réduit la surface de mâche, indique Olivier Terrien. Alors que nous faisions en moyenne 2 à 2,5 cultures de mâche par parcelle par an, nous n’en faisons plus que 1,2 à 1,5. En contrepartie, nous avons augmenté les surfaces de poireaux et de radis, qui ont moins de soucis sanitaires, et introduit l’épinard et la roquette. » Une autre évolution a été l’introduction de couverts végétaux. « Nous voulions retrouver de la fertilité et casser le cycle des bioagresseurs, souligne le maraîcher. Couvrir le sol l’été permettait aussi de limiter l’enherbement que nous devions auparavant gérer par plusieurs passages d’outils. »

Différents engrais verts ont été testés. « Il fallait une espèce qui pousse bien l’été, car le plein champ n’est libre qu'à cette période ; qui ne nécessite pas d’irrigation, car il y a de plus en plus de restrictions d’eau ; et qui ne soit pas concurrentielle pour nos cultures. » Leur choix s’est finalement porté sur le sorgho. « Le sorgho aime la chaleur et produit beaucoup de biomasse sans nécessiter d’irrigation. Il casse le cycle des bioagresseurs de nos cultures. Et son système racinaire puissant structure le sol, qui est davantage aéré et drainant et donc moins favorable aux maladies. Et il va chercher l’eau et les minéraux beaucoup plus profond que nos cultures. »

Apporter de la matière organique

Désormais, la SCEA cultive chaque année 75 hectares de sorgho en couvert estival. La céréale est semée à partir de fin avril, au semoir à céréales. « Nous semons très dense, à 70 kilos par hectare, l’objectif étant qu’il couvre rapidement le sol pour éviter l’enherbement », précise Olivier Terrien. Après six à huit semaines, le sorgho est broyé et réincorporé au sol à la rotobêche, une ou deux fois selon le développement du couvert. « Les semis d’avril ont le temps de se développer avant la remise en culture. Il peut être nécessaire de broyer deux fois, car il ne faut pas que le sorgho devienne trop ligneux, ce qui retarde sa décomposition. » La culture produit 30 à 50 tonnes par hectare de matière fraîche. « Les sorghos qui se développent le plus sont ceux semés en mai-juin. Mais nous en semons jusqu’à début août. Même s’il ne produit que 10 à 20 tonnes par hectare, c’est toujours autant de matière organique apportée et le sol n’est pas soumis aux aléas climatiques. » Le coût du couvert est d’environ 200 euros par hectare, en semences principalement. « Nous avions déjà l’équipement et nous aurions de toute façon dû faire des passages d’outils pour limiter l’enherbement. »

Un impact agronomique très positif

<em class="placeholder">Racines d&#039;un plant de sorgho.</em>
Le système racinaire puissant du sorgho permet de casser les semelles de labour et d’avoir un sol plus aéré et drainant. © V. Bargain
En dix ans, la SCEA a ainsi reboosté ses sols. « Alors qu’il y a dix ans le taux de matière organique était de 0,8 %, voire moins, il est remonté à plus de 1,2 %, précise Olivier Terrien. Les plantes sont mieux nourries et se défendent mieux contre les bioagresseurs. Et comme le sol est plus aéré, leurs racines se développent mieux et il y a moins de bioagresseurs. L’enherbement est également limité. Nous sommes revenus à un rendement de 1 kilo par mètre linéaire. » Une perspective est l’introduction de légumineuses dans les couverts. « Nous testons différents mélanges avec le CDDM » précise Olivier Terrien. Une autre est l’installation de couverts sous les abris. « Nous avons parfois des soucis sanitaires sous abri et nous faisons quelques chapelles de sorgho. Les abris toutefois sont très sollicités l’été pour la mâche. Introduire un sorgho gardé six à huit semaines signifie deux mâches en moins. » L’enfouissement du sorgho laisse de plus des déchets de paille qui peuvent se retrouver dans la récolte de mâche, alors qu’en plein champ, le sorgho est souvent suivi d’un radis, la paille étant alors moins gênante du fait de la récolte manuelle. « Les couverts végétaux et la diversification sécurisent les itinéraires culturaux, la production et les clients, se réjouit Olivier Terrien. Nous avons retrouvé un équilibre qui nous permet de vivre. »

repères

Surface cultivée 120 ha

Couvert estival 75 ha de sorgho

Densité de semis 70 kg/ha

Coût 200 €/ha

La gamme évolue en région nantaise

<em class="placeholder">Production maraîchère à la Scea Saint-Simon en Loire-Atlantique.</em>
La SCEA Saint-Simon a réduit ses surfaces de mâche et augmenté celles en poireau. © V. Bargain
La diversification engagée par la plupart des maraîchers nantais pour éviter les problèmes de fatigue des sols entraîne une évolution de la gamme de légumes proposés. Alors que Nantes était il y a encore trois-quatre ans la première région européenne productrice de mâche, la production y a diminué à 28 000 tonnes, contre plus de 32 000 tonnes auparavant. La région est désormais devancée par l’Italie qui en produit plus de 30 000 tonnes. En parallèle, d’autres légumes s’y développent comme le fenouil, la patate douce, la pomme de terre, la carotte vrac ou botte, des choux (packchoï…) ou encore l’épinard et les jeunes pousses de salade. Le poireau et le radis, autres légumes importants en région nantaise, sont quant à eux plus stables.

Un large champ d’investigation

<em class="placeholder">Couvert réalisé avec du sorgho.</em>
Les couverts permettent de limiter l’enherbement. © V. Bargain
Les couverts végétaux sont testés depuis quinze ans par le Comité départemental de développement maraîcher (CDDM). « Au départ, l’objectif était de couvrir le sol pour limiter l’enherbement, indique Sylvain Gérard, directeur du CDDM. Puis les maraîchers y ont vu d’autres avantages, comme de lutter contre les pathogènes, d’avoir moins de lessivages, de mieux explorer le sol. » La principale espèce cultivée l’été est le sorgho sudan-grass. « Il y a aussi du moha et du millet, qui se développent moins, mais sont semés plus denses et couvrent rapidement le sol. Leur système racinaire est en revanche moins puissant que celui du sorgho et l’effet structurant moins important. » Le seigle et l’avoine sont également utilisés pour les périodes plus fraîches, au printemps.

Aujourd’hui, dans un objectif d’autonomie azotée, un axe est l’introduction de légumineuses. « Nous cherchons quelle légumineuse associer au sorgho. La base est d’occuper le terrain rapidement pour éviter l’enherbement. Les légumineuses ont toutefois du mal à se développer dans un couvert dense. Certaines vesces semblent y parvenir. Nous testons aussi le crotalaire, légumineuse tropicale. » Une autre piste est la biodésinfection par incorporation au sol de couverts de crucifères. « Des résultats encourageants sont obtenus avec le radis fourrager. » Les essais vont se poursuivre dans le cadre du projet Pulsar, financé par la région Pays de la Loire, avec des travaux sur les couverts végétaux, la biodésinfection et les composts.

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