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Post-récolte : lever le verrou des monilioses des fruits

Les monilioses sur fleurs et fruits constituent un verrou technique pour la production de fruits en arboriculture biologique. Le sujet a été débattu lors de neuvième édition des rencontres techniques fruits bio, co-organisée par le CTIFL et l’Itab en 2019.

En Espagne comme en France, les monilioses sur fruits provoquent des pertes au verger et en conservation pouvant être très importantes. Une étude espagnole récente sur des fruits en conservation a précisé que les trois espèces de Monilinia sont présentes sur ce territoire avec des proportions variables : 82 % de M. laxa, 17 % de M. fructicola et 1 % de M. fructigena.

Les phases clés de contamination se produisent au verger

Ainsi Carla Casals, chercheuse à l’Irta, spécialisée en post-récolte, a présenté les travaux concernant l’épidémiologie et les méthodes de lutte des monilioses du pêcher. Le groupe de pathologie en post-récolte de l’Irta a montré que les conidies observées sur des fruits momifiés au verger survivent au moins un an, et sont donc capables de contaminer des fruits au cours de l’année suivante. Par ailleurs, la dispersion moyenne des conidies au verger est concentrée dans un rayon d’un mètre autour du fruit infecté et peut aller jusqu’à 16 mètres. Ce résultat suggère donc que la prophylaxie (ramasser et détruire les fruits momifiés) permet de limiter les sources de contamination au verger. Un large éventail d’échantillons a également été analysé pour identifier la présence de Monilinia spp. dans l’atmosphère et la surface des équipements en station de conditionnement. Etonnamment, la présence de Monilinia spp. était extrêmement faible (0,28 % des champignons observés) par rapport aux autres espèces identifiées (Penicilium spp., Rhizopus spp. Cladosporium spp. etc.). Par ailleurs, ils ont montré que la diminution de la température et l’augmentation de l’humidité relative, comme c’est le cas durant le stockage des fruits, augmentent drastiquement la durée de survie des conidies de M. fructicola. La survie des conidies à la surface des fruits est supérieure à celle observée sur des matériaux inertes tels les équipements des stations de conditionnement. Les fruits sains qui arrivent en station de conditionnement ont donc un faible risque d’être contaminés par Monilinia ssp. en comparaison avec les autres champignons observés. Ainsi les résultats de Carla Casals et son équipe tendent à montrer que les phases clés de contamination et d’infection se produisent essentiellement au verger. En revanche, le développement de la maladie se joue essentiellement en post-récolte durant la conservation des fruits.

Méthodes innovantes et variées en cours d’évaluation

En collaboration avec l’Institut Inia et l’Université de Lleida, l’Irta a développé un modèle de prévision des risques d’infection par les monilioses au verger. Basé sur les conditions climatiques enregistrées localement, ce modèle a été testé pendant six années en verger commercial. Dans les conditions d’utilisation décrites, ce modèle permet de visualiser les périodes à risque durant la saison et de limiter les traitements de conservation en agriculture conventionnelle. Son utilisation requiert de renseigner le stade de développement des fruits, la présence de monilioses au verger et les données météorologiques (précipitations, température et humectation foliaire). Différentes pistes par lutte directe, par des méthodes physiques ou biologiques sont actuellement testées par l’Irta comme stratégies de contrôle des monilioses. Les méthodes innovantes en cours d’évaluation sont très variées : ensachage des fruits, traitements à base d’huiles essentielles, la recherche de nouveaux antagonistes, incluant la domestication de micro-organismes indigènes pour rendre son application plus facile, le « curing » ou conservation des fruits à hygrométrie et température élevée pendant un temps réduit… Des travaux sur le matériel végétal pour explorer les sources de résistances aux monilioses dans des populations hybrides pêcher x amandier sont également entrepris.

Tiré d’Infos CTIFL octobre 2019

D’autres pistes à suivre

La sensibilité croissante du stade bouton blanc à la fleur ouverte et l’intérêt de la pulvérisation d’un champignon antagoniste en post-récolte ont été démontrés par des travaux d’expérimentation.

En France, les monilioses sur fleurs et rameaux d’abricotiers peuvent être responsables de pertes de production et de dégâts importants en agriculture biologique. Ils sont causés par Monilinia laxa et/ou M. fructicola. Il est admis que les attaques de monilioses sont dépendantes de conditions climatiques humides sur la fleur. Aussi l’équipe de Laurent Brun (Inra Gotheron) a mis en place un dispositif expérimental spécifique afin de mieux connaître les niveaux de sensibilité des différents stades phrénologiques des bourgeons à fleur, et les conditions climatiques précises permettant les contaminations. Dans le cadre des projets Climarbo et FAN de Bio, un essai a permis de montrer que le stade bouton rouge (stade C) est peu sensible, et que cette sensibilité est croissante du stade bouton blanc (stade D) à la fleur ouverte (stade F). Le stade chute des pétales semble également assez sensible. La pluviométrie et la température pendant la pluie ont été les paramètres climatiques identifiés comme prépondérants dans cet essai pour expliquer les contaminations sur fleurs. Et un modèle phéno-climatique de contamination est en cours de validation.

La pulvérisation en post-récolte

En 2017 et 2018, Valérie Gallia (Sudexpé) et son équipe ont testé diverses stratégies de contrôle des monilioses sur fleur d’abricotier à l’aide de produits biologiques (Curatio, Serenade, Amylo-X et Julietta) dans le cadre du projet Fan de Bio. Les résultats sont mitigés selon les produits avec, dans certaines conditions, des résultats intéressants à confirmer (Curatio par exemple). Concernant le contrôle des monilioses sur fruits en pêcher, une nouvelle approche est expérimentée depuis 2016 : la pulvérisation en post-récolte du champignon antagoniste Clonostachys rosea en conditions contrôlées. Sept essais, menés sur trois années sur nectarine et prune américano-japonaise, montrent une efficacité intéressante, pouvant aller jusqu’à environ 50 % sur la conservation en chambre climatisée à 20-22 °C. Des évaluations sont prévues durant l’année 2019 pour valider l’intérêt de la méthode sur des volumes de fruits plus importants.

Conservation des fruits en AB

Le bilan de deux projets de recherche (D2Biofruits et TEC) et d’expérimentations menés sur des techniques alternatives en post-récolte compatibles avec l’agriculture biologique a été présenté par Sébastien Lurol, CTIFL. Ces techniques alternatives concernent des traitements physiques (température, anoxie, lumière) et/ou des formulations de biocontrôle (levure antagoniste, huiles essentielles) étudiées sur quatre espèces : pêche, raisin de table, châtaigne et mangue. Les traitements thermiques se sont révélés les plus efficaces pour lutter contre le développement de pourritures ou pour lutter contre la présence d’insectes. En pêche et nectarine, l’efficacité des traitements à l’eau chaude n’est plus à démontrer, mais les conditions d’utilisation en station doivent être bien précisées. Il a été montré par exemple la nécessité d’un nettoyage et désinfection minutieux de la calibreuse en aval du doucheur. Des expérimentations sont en cours sur abricot et mirabelle pour valider les paramètres de traitement sans impacter la qualité. En effet, la machine testée n’est pas encore opérationnelle sur abricot et mirabelle car le traitement accentue les problèmes de brunissement externe (abricot) ou interne (mirabelle). Des machines d’application d’eau chaude par douchage ou trempage sont en cours de développement dans la filière pour la pomme et la pêche. L’application de lumière UV-C, validée à petite échelle pour les monilioses sur nectarine, le botrytis sur raisin et l’anthracnose de la mangue, peut apporter une efficacité supplémentaire mais nécessite le développement d’un équipement adapté.

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