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Energie, emballages, interdiction du désherbant... : La filière endives française vraiment en état d’urgence

Avec la hausse conséquente des coûts de l’énergie, les endiviers français se retrouvent en situation critique. Une partie des producteurs est acculée et pourrait déposer le bilan si l’État n’intervient pas, et pour certains c’est une question de jours, rappelle l'Association des producteurs d'endives de France.

Pour un producteur qui produit 3 000 t par an : en 2021, sa facture d’électricité était de 157 000 €, en 2022, elle est grimpée à 340 000 € et on lui demande entre 600 000 et 700 000 € pour 2023.
Pour un producteur qui produit 3 000 t par an : en 2021, sa facture d’électricité était de 157 000 €, en 2022, elle est grimpée à 340 000 € et on lui demande entre 600 000 et 700 000 € pour 2023.
© Apef

« Notre filière endives est dans une situation d’urgence », déclare Stéphane Jacquet, directeur général de l’Apef, association des producteurs d’endives de France. En effet, les endiviers doivent aujourd’hui arracher les racines qu’ils devront conserver au frais pour les ressortir progressivement en chambre de pousse pendant toute l’année. Aux dires de Stéphane Jacquet, des endiviers ont déjà vendu leur production sur pied, soit à de plus grosses structures, soit à destination de l’alimentation animale.

Certains doivent renouveler leur contrat d’électricité fin octobre, avec des tarifs impossibles à assumer. « Prenons l’exemple d’un endivier qui produit 3 000 t par an. En 2021, sa facture d’électricité était de 157 000 €, en 2022, elle est grimpée à 340 000 € et on lui demande entre 600 000 et 700 000 € pour 2023, c’est absolument impossible, détaille le directeur. Certains de nos producteurs sont désespérés et envisagent de ne pas arracher cette année, de tout arrêter et déposer le bilan. Ils n’ont pas d’autres possibilités ». C’est pourquoi l’État doit prendre la mesure de la difficulté et de la spécificité des endiviers, sinon, c’est toute une région qui va en pâtir. Le secteur endives génèrent 4 000 emplois directs dans une région où l'emploi n'est pas florissant.

En effet, les endives sont produites à plus de 90 % dans les Hauts-de-France et leur cueillette, réalisée à la main, nécessite beaucoup de main-d’œuvre, laquelle risque de se retrouver sans emploi du jour au lendemain.

« Nous avons été reçus à plusieurs reprises par le ministère. Nous avons été compris et entendus. Mais on les sent un peu dans l'impasse, tenus par l'Europe », poursuit le directeur. Bruxelles patine en effet mettre d’accord les pays européens pour plafonner le prix du gaz utilisé pour produire de l'électricité.

L'incertitude demeure et pour l'Apef, le bouclier énergétique mis en place continue de ne pas être adapté à la situation. « Les aides ont été basées sur l’excédent brut d’exploitation, pour nos agriculteurs, c’est irréaliste et de toute façon pas suffisant. De plus, impossible d’avancer les sommes en attendant d’être remboursés », poursuit Stéphane Jacquet.

La production d'endives françaises est d'environ 145 000 t : 50 producteurs en produisent environ 100 000 t. Ce sont ceux-là qui sont en danger. Les « petits » producteurs, les 400 qui produisent les 45 000 t restantes sont plus épargnés grâce au bouclier tarifaire qui protège les plus petites entreprises. 

Toute la filière fruits et légumes est sur le pied de guerre. « Avec Interfel, nous avançons groupés, en tant que petite filière nous nous serrons les coudes avec les autres, notamment les producteurs de tomates sous serre qui ont, eux aussi, de graves problèmes économiques à résoudre. Mais nous gardons notre spécificité et continuons de demander une solution adaptée à notre activité ».

 

Emballage et interdiction du désherbant : les autres points noirs

Autre dossier, moins chaud mais très important, celui de la loi Agec et des emballages. « Nous avons obtenu un report jusqu’au 31 décembre 2024, et nous travaillons pour trouver une alternative à nos sachets plastique transparents et respirants. Nous avons testé le carton, la cellulose… et à ce jour, nous n’avons toujours pas trouvé le bon matériau qui réunit les qualités de l’emballage actuel », se désole Stéphane Jacquet. Face à ce manque de perspectives, l’Apef a essayé le vrac dans quelques magasins. « Résultat, -40 % d’actes d’achat. Les consommateurs veulent leurs endives bien propres et bien blanches en sachet, point ».

La dernière difficulté qui occupe la filière endives française, c’est le sujet de l’interdiction annoncée du désherbant Bonalan. « S’il doit être retiré, OK, mais à ce jour nous n’avons rien d’équivalent pour le remplacer et il faut absolument désherber pour cultiver des endives, rappelle Stéphane Jacquet. Nous comprenons parfaitement la nécessité de diminuer la dispersion de produits chimiques dans la nature, avons d’ailleurs déjà fait de nombreux efforts de recherches pour limiter nos intrants, notamment avec Air liquide, pour apporter l’oxygène aux racines, directement dans l’eau. Mais il y a des pratiques incontournables ».

L’endive française en quelques chiffres

L’Apef compte plus de 400 producteurs, dont 140 réalisent 90 % de la production française, laquelle s’élève à 145 000 t sur 8 000 ha. Plus de 90 % de ces endives sont commercialisées et consommées en France, le reste est exporté vers les pays d’Europe voisins. Les producteurs français cultivent majoritairement de l’endive blanche, adulte ou plus récemment en jeunes pousses à garnir pour l’apéritif. Ils obtiennent également quelques milliers de tonnes de Barbucine, de Carmine et d’endives rouges, des variétés qui restent marginales pour le moment. Les endives françaises sont commercialisées à presque 100 % en GMS avec lesquelles les négociations tarifaires restent compliquées, surtout dans cette période d’inflation. Mais l’endive demeure attractive pour les consommateurs de tous âges (une campagne de promotion est prévue dans les magasins courant octobre), ainsi que pour les jeunes producteurs qui continuent à reprendre des exploitations mais sont aujourd’hui très exposés à des faillites.

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