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Inflation
Consommation en berne, crise conjoncturelle et explosion des charges : pourquoi l’endive est dans la tourmente

Entre baisse lente mais continue de la consommation d’endive et l’inflation qui pèse sur les fruits et légumes, l’endive souffre. D’autant plus que le marché subit surplus de volumes : l’endive est en crise conjoncturelle depuis l’automne. Difficile donc de valoriser l’endive pour absorber l’explosion des coûts pour les producteurs.

Le conditionnement de l'endive se fait à la main. Ici : effeuillage de jeunes pousses d’endive, avant la mise en barquette, chez le producteur Clément Hénard.
© Julia Commandeur - FLD

Deux tiers des Français achètent de l’endive au moins une fois par an ! Avec une pénétration de 74,1 % (CAM P5 2022 Kantar, Total endives, Total Distribution) et la 4e place en tant que légume hors pomme de terre le plus acheté par les Français (après tomate, carotte et salades), l’endive accuse pourtant une baisse de consommation depuis 10 ans.

 

Des années Covid à l’inflation : du soleil fixe à la tempête

Les années Covid avaient été plutôt bénéfiques à l’endive : légume donc bénéficiant de la mode du fait maison et du report de la consommation RHD (l’endive est très peu consommée en restauration et 90 % du chiffre d’affaires de Perle du Nord se fait en GMS), produit emballé… En parallèle, les aléas climatiques des dernières années (mauvaise reprise des semis) et surtout une problématique de reprise des exploitations d’endives (« le ticket d’entrée dans la profession endive est déjà très cher, avec des investissements conséquents », rappelle Vincent Choteau, producteur et adhérent à la coopérative Marché de Phalempin) ont eu pour conséquence une offre de moins en moins importante sur le marché.

Conséquence logique : le marché avait été plutôt porteur. « Pendant le confinement, l’endive a pu atteindre des prix de vente consommateur extrêmement hauts, 4 €/kg, alors que le prix moyen et psychologique reste autour de 2,50 à 3 €/kg », témoigne Caroline Basset, responsable marketing et communication chez Perle du Nord.

 

L’inflation rebat les cartes dans les deux sens

Aujourd’hui, les consommateurs sont lassés du fait-maison et surtout boudent les fruits et légumes dans les arbitrages d’achats, car inquiets de l’inflation. Ceux qui avaient arrêté d’acheter l’endive car trop chère pendant le confinement n’ont pas encore réalisé que l’endive leur était à nouveau accessible en prix.

Perle du Nord espère qu’avec l’inflation et la hausse du prix de l’essence, les consommateurs reviennent à l’habitude du gros plein de courses dans un seul lieu d’achat, ce qui pourrait jouer en faveur de l’endive, peu vendue en magasin de proximité et au contraire très concernée par les hyper-super (90 % de l’activité de Perle du Nord se fait par le circuit GMS). En parallèle, la marque a lancé une stratégie de refonte de son identité visuelle pour redonner de la visibilité à son produit en rayon et toucher davantage de magasins.

 

 

Un marché qui passe d’un manque d’offre à un sur-approvisionnement

Dans ce contexte de consommation en berne, à la fois pour l’endive (structurellement) et pour les fruits et légumes (conjoncture), le marché de l’endive, qui était jusqu’ici plutôt sous-approvisionné, a vu cette campagne son offre en forte hausse.

« Nous avons eu plusieurs années plutôt sèches, avec des semis pas très réussis et donc des volumes sortie endiverie limités, explique Clément Hénard, producteur de jeunes pousses d’endives et adhérent à la coopérative Marché de Phalempin. Pour compenser ces pertes, les producteurs en mai 2021 ont donc eu tendance à semer plus. Sauf que cette fois, les semis ont été très réussis, avec une météo très favorable été 2021, une alternance entre pluies et périodes chaudes. On a donc pour cette campagne une surabondance de l’offre. »

 

L’endive, 18 centimes plus chère à produire au kilo, non répercuté en aval

Avec la hausse des charges fixes, le coût de revient de l’endive a bondi de 0,15 €/kg en moyenne (logé départ), selon les chiffres établis par Perle du Nord : le coût de l’énergie a parfois été jusqu’à doubler, entraînant une hausse de +0,10 €/kg d’endive, la revalorisation du Smic (+5,2 % sur un an) a fait prendre à la main d’œuvre +0,015 €, et l’emballage, selon le type, a pris +0,05 à 0,10 €/kg entre la campagne précédente et la prochaine. En y rajoutant la hausse des coûts du transport (+0,03 €/kg), le coût de revient franco de port a pris +0,18 €/kg.

« En parallèle, la campagne en cours (septembre 2021-août 2022) n’a pas été à la hauteur en termes de valorisation », regrette Caroline Basset. Selon les chiffres Kantar CAM P5-2022 (c’est-à-dire en cumul au 15 mai 2022 comparé à la même période l’année précédente), l’endive a gagné +2,2 % en volume (dans un contexte de marché où les fruits et légumes frais en général sont boudés, à -6,6 % en volume) mais a perdu en valorisation -13 % ! « On a perdu de la valeur alors que les coûts et les charges en production explosent », traduit Caroline Basset. L’endive est d’ailleurs en crise conjoncturelle depuis l’automne dernier.

 

Des investissements et des projets en pause

De nombreux producteurs ont revu à la baisse leurs emblavements pour la campagne à venir. Sur 113 ha de SAU (dont 17 ha de prairies), Vincent Choteau emblave généralement 33 à 35 ha d’endives chaque année. Mais ce printemps, « vu la conjoncture difficile après la hausse de volumes, due aux bons rendements des campagnes précédentes », le producteur n’a emblavé que 29 ha.

Les projets sont aussi en pause. Clément Hénard, qui avait énormément investi depuis son installation en 2016 (diversification dans les jeunes pousses, investissements dans les machines adéquates, agrandissement, nouvelle chaîne pour développer la capacité de production de 30 à 50 bacs…), a mis tous ses projets de développement à l’arrêt, à l’instar de nombreux autres producteurs. « Je voulais m’agrandir en production. Je prévoyais un nouveau bâtiment à côté de celui des pommes de terre pour stocker et déterrer les racines d’endives sur place et libérer de l’espace sur le bâtiment principal car jusqu’ici je devais louer des espaces frigorifiques à la coopérative… Cela va devoir attendre. »

 

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