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AG d’Aprifel 1/3
Consommation de fruits et légumes : peut-on faire bouger les habitudes alimentaires ?

Aprifel a tenu son assemblée générale le 13 juin. Les débats ont tourné sur le moyen d’aider à la transition -une alimentation plus végétale- dans un monde de turbulence : pandémie, guerre en Ukraine mais surtout crise économique.

Dominique Desjeux, anthropologue et sociologue, à l’AG d’Aprifel : « Dans le cadre des fruits et légumes, j’identifie des contraintes plus fortes que d’autres : la baisse du pouvoir d’achat c’est radical, ainsi que l’accès à l’énergie. Quant à l’expertise culinaire, c’est une expertise de l’usage qui demande un temps d’apprentissage : ça a tendance à bloquer les gens. »
© Julia Commandeur - FLD

Le changement est possible à condition d’identifier les contraintes, de s’autoriser à élargir le champ de questionnement, et de travailler à un niveau local. C’est la conclusion de l’après-midi de débat à l’occasion de l’assemblée générale d’Aprifel, l’Agence pour la recherche et l’Information en fruits et légumes, le 13 juin à la Maison des fruits et légumes à Paris, autour du thème “Comment explorer un nouveau monde de turbulences ?”.

Le ton est donné : la consommation de fruits et légumes ne fait toujours que baisser, les consommateurs ont subi une pandémie, une crise économique et certaines conséquences de la guerre en Ukraine. « La transition est donnée : c’est aller vers plus de végétal. Mais comment peut-on aider à ce changement dans un contexte de turbulences ? » : Delphine Tailliez, directrice d’Aprifel, a ainsi résumé les enjeux.

Peut-on changer un consommateur ?

Question difficile. Car le consommateur ne change pas facilement ni rapidement ses comportements, surtout quand ils sont alimentaires. Evoquant les populations immigrées et issues de l’immigration, l’anthropologue et sociologue Dominique Desjeux illustre : « La religion peut disparaître plus vite que les comportements alimentaires, c’est dire leur force ».

Il souligne aussi que dans une enquête qu’il avait menée en 2007 auprès des jeunes de 18-25 ans, le manque de praticité (découpe, épluchage, conservation…), le manque de connaissances et le manque d’apport énergétique étaient les principaux freins à l’époque à la consommation de fruits et de légumes.  « Ça fait plus de 15 ans. Je n’ai pas l’impression que cela ait beaucoup bougé ! »

 

11 contraintes à passer à l’acte

Pour l’anthropologue, il existe 11 contraintes qui expliquent l’écart entre les valeurs et les pratiques au moment du passage à l’action.

5 sont matérielles :

  • Temps ;
  • Espace ;
  • Budget ;
  • Système d’objets concrets (ustensiles de cuisine) ;
  • Accès à l’énergie.

3 sont sociales :

  • Apprentissage (expertise culinaire) ;
  • Normes sociales (ce qui est permis, prescrit, interdit) et la cacophonie alimentaire de Fishler (le fait de recevoir régulièrement des messages contradictoires en nutrition et de ne plus savoir comment les interpréter) ;
  • Circulation de l’information avec les réseaux sociaux pré-numériques et numériques ;

3 sont symboliques :

  • Identité personnelle ou professionnelle (“l’homme mange de la viande pour être fort”)
  • Risques perçus et montée des discours sur la frugalité ;
  • Charge mentale ;

 

Dominique Desjeux analyse : « Dans le cadre des fruits et légumes, j’identifie des contraintes plus fortes que d’autres : la baisse du pouvoir d’achat c’est radical, ainsi que l’accès à l’énergie. Quant à l’expertise culinaire, c’est une expertise de l’usage qui demande un temps d’apprentissage : ça a tendance à bloquer les gens. Enfin, la charge mentale : si votre produit demande plus de temps, de coût et d’énergie humaine, il ne marchera pas ».

Il ajoute néanmoins : « Ce sont des contraintes qui peuvent se transformer en potentialité. Par exemple, la montée des discours sur la frugalité va dans le sens des fruits et légumes ! »

 

S’adapter, à l’échelle locale aux contraintes de chacun

« On ne peut pas éduquer les gens sans comprendre leurs jeux de contraintes !, avertit Dominique Desjeux. Dans le cadre de l’alimentation, cela signifie connaître la structure de leurs repas, où s’y placent les fruits et légumes… Et tant que les gens ne sont pas sensibles au problème, on pourra éduquer autant que l’on veut, avec autant de campagnes de communication, cela ne fonctionnera pas ».

Thibault Deschamps, conseiller technique Sport & athlétisme au ministère chargé des Sports, responsable du Programme Vif (Vivons en forme), approuve : « Le sujet de la proximité est majeur aujourd’hui. On peut avoir des campagnes, de beaux messages, mais finalement c’est dans la proximité et les interactions que viennent les solutions pour un changement durable ».

Qu’est-ce que le programme Vif ? Le programme Vivons en forme a pour objectif d’accompagner les collectivités locales et territoriales en leur apportant des solutions concrètes pour la mise en œuvre d’actions de santé publique. Car il est possibilité de faire reculer la prévalence de surpoids et d’obésité en faisant évoluer progressivement et durablement les comportements et les habitudes, grâce à la mobilisation de l’ensemble des acteurs de proximité dans l’environnement des enfants et des familles. C’est ce qu’a montré l’étude FLVS Fleurbaix Laventie Ville Santé (1992-2004), qui a par la suite donné lieu à ce programme, qui concerne aujourd’hui 271 villes adhérentes (avec l’ambition d’atteindre les 500 villes).

Des solutions et des pistes sont possibles. Jérémie Lafraire, chercheur en sciences cognitives à l’Institut Paul Bocuse, est revenu sur la néophobie alimentaire des jeunes enfants. En expliquant les raisons assez surprenantes de ce phénomène, il a illustré des solutions pour dépasser ce rejet des légumes.

Benjamin Cavalli, directeur du Programme Malin, a lui fait part des avancées de ce programme qui permet un meilleur accès à une alimentation saine aux enfants en bas âge de familles aux bas revenus. Dernière actualité de l’association : un partenariat avec Bonduelle.

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