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Innovation et environnement
Eric Philippon, fondateur du challenge Famae : « Convaincre la finance de supporter les innovations technologiques durables »

La fondation Famae lance la troisième édition du « Famae challenge ». Le thème choisi cette année est « Food for Good ». Le prix sera doté de 2 millions d’euros. Clôture des candidatures le 14 février 2020. Entretien avec Eric Philippon, le président-fondateur de la fondation, à l’initiative de ce concours mondial dédié à l’environnement, dont l’objectif est de supporter les innovations technologiques pour accélérer la transition écologique.

Les candidatures sont ouvertes depuis le 14 novembre. Avez-vous déjà reçu beaucoup de dossiers ?

« Nous sommes surpris. Nous avons reçu 600 dossiers en trois semaines. C’est hallucinant. L’année dernière, sur le thème de la préservation de l’eau potable, nous avons eu près de 3000 dossiers.  Nous en aurons beaucoup plus cette année. Le sujet de l’alimentation concerne tout le monde. Et nous savons que les deux dernières semaines avant la clôture des candidatures, le nombre de dossiers est multiplié par 2 ou 3. Donc, on prend de l’avance. On est une dizaine à s’occuper de ça et les partenaires vont détacher des personnes. On travaille dès maintenant. »

Quels types de projets ont le bon profil et d’où viennent-ils géographiquement ?

« Les dossiers français représentent environ 25 % des candidatures. Toutes les régions du monde sont représentées : les pays hispanophones, l’Afrique, l’Asie, les Etats-Unis…  Pour le choix des projets présentés, nous n’avons pas de prérequis, nous sommes très agnostiques sur le secteur.

Le critère n°1, c’est l’innovation. En 2, l’impact, il faut que ça puisse vraiment changer les choses. En 3, il faut que ce soit faisable. On peut financer des projets émergents mais pas en R et D. A ce stade, on n’a pas capacité à juger si c’est pertinent. En 4, l’avis sur l’équipe du projet. 

L’équilibre entre production agricole, transformation, logistique et consommation se fera par rapport à nos différents partenaires et leur cœur de métier : la Fondation Carasso dans le domaine de l’agronomie et de la qualité des sols, surtout en France et Espagne, la Fondation Roquette sur l’alimentation des plus vulnérables (hors France) , la Fondation  Rockefeller plus tournée vers la refonte de la chaine alimentaire au sens large… »

Comment se passe le travail de sélection de la Fondation ?

« Au premier niveau de sélection, on retient environ 20-25 % des dossiers. Au deuxième niveau, c’est le Top 100. Ce sont des jeunes entreprises que l’on va suivre, y compris sur les années futures. On essaie de voir ces acteurs de l’écosystème en se déplaçant ou en les invitant à nous rencontrer. Par exemple, il y a deux ans, nous avions repéré un projet que l’on a jugé trop jeune, pas assez précis. Et deux ans après, Bingo !

L’étape suivante est le choix d’une quinzaine de finalistes et nous décernons en définitive 5 à 7 prix. »

Et au-delà de la fondation ?

« La Fondation est le premier étage de la fusée. Elle va continuer avec un concours tous les ans.  Et faire des dons tous les ans,  avec sa propre équipe et ses propres ressources. Et comme, il y a plein de projets, on va aussi lever des fonds pour les soutenir. C’est le 2ème étage de la fusée. Après avoir passé 20 ans dans le capital investissement et le conseil en stratégie, je sais mesurer la rentabilité-risque d’une entreprise. Le but est d’amener les investisseurs à miser sur ces entreprises et de convaincre la finance de se mettre dans la finance durable. C’est possible si je suis moi-même convaincu et que j’y investi mon argent.

Prenons le domaine des énergies renouvelables, par exemple. Il y a 15 ans, il a fallu les soutenir. Le marché mondial représentait 20 milliards de dollars par an alors que le chiffre est aujourd’hui de 300 milliards de dollars par an et qu’il n’y a plus besoin de soutenir les prix de marché. C’est colossal. »

Pourquoi avez-vous décidé, il y a trois ans, de créer cette fondation ?

« J’ai un peu tout remis en question à la cinquantaine. J’ai réalisé que je ne voulais pas laisser un monde abominable à mes futurs petits-enfants. C’est ça le truc qui me serre le cœur.  La maison de mes grands-parents à l’Ile d’Oléron a été envahi par l’eau lors de 2 tempêtes en 10 ans  alors que ça ne devait arriver qu’une fois par siècle. Les phénomènes météo, inconsciemment, ça nous alerte. Professionnellement, j’avais le luxe de pouvoir faire un peu ce que je voulais. Alors je me suis dit : je veux faire quelque chose. Et j’ai décidé de consacrer la moitié de ce que j’ai gagné à cet objectif. Je soutiens la fondation Famae depuis le début en payant les équipes et en payant les prix accordés aux lauréats, soit plusieurs millions d’euros. »

Vous investissez dans des innovations technologiques durables. Pensez-vous que ce type d’investissements doit aussi intégrer une dimension éthique ?

« La question de l’éthique est une des composantes, ça peut amener des disruptions. Il y a aussi la nouvelle conscience, la sensibilité des consommateurs. Leur comportement est très important. Et puis, il y a la réglementation qui fait changer des business entiers. On peut parler de la loi anti-gaspillage portée par Brune Poirson qui va contraindre les entreprises à produire différemment.  L’industrie s’adapte si tout le monde est soumis à la même réglementation. On peut citer l’exemple du packaging.

Pour sélectionner les initiatives innovantes, nous avons une approche holistique. On  regarde tous les impacts, y compris sociaux. On ne s’imagine pas donner un prix à des gens super bons sur le plan environnemental uniquement.»

 

 

« Food for Good », un concours des innovations technologiques « du champ à la fourchette »

Le concours « Food for Good » de la fondation Famae, reconnu à l'échelle internationale, est centré pour sa 3ème édition sur l'enjeu majeur de l'alimentation.
« Du champ à la fourchette », il s'adresse à tous les acteurs de la chaîne (entrepreneurs, PMEs, étudiants, chercheurs, travailleurs de la terre, collectivités), et couvre les secteurs de la production, de la transformation, de la logistique et de la consommation.
Dates clés
. 14 novembre 2019 – Ouverture des candidatures.
. 14 février 2020 – Clôture des candidatures.
. 13 juin 2020 – Remise des prix au salon Vivatech, à Paris Porte de Versailles.
Le prix 2020 est doté de 2 millions d’euros.
 

 

 

 

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