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Echalote et oignon : du vinaigre contre la fusariose

Le traitement au vinaigre des plants d’échalote et d’oignon avant plantation montre des effets intéressants pour assurer un bon état sanitaire au départ de la culture et ouvre la voie à une solution durable contre la fusariose, en conventionnel comme en AB.

La fusariose est due à un champignon sus­ceptible de se transmettre par le sol ou par les plants, aussi bien sur échalote que sur oignon. Si la transmission par le sol peut être limitée par des rotations espa­çant d’au moins trois ans les cultures suc­cessives d’allium, la transmission par le plant reste problématique. Le trempage à l’eau (2 h à 42-43°C) montre une efficacité contre les nématodes, le mildiou, Botrytis et la pourriture blanche, mais pas contre la fusariose.

Pour garder les bénéfices du bain à l’eau sans laisser le problème fusa­riose sans solution, l’ajout d’une subs­tance anti-fongique à l’eau du bain est nécessaire. Or, le Topsin (thiophanate méthyl), dernier fongicide autorisé pour cet usage, n’est plus utilisable depuis octobre 2021. Une solution de remplacement au Topsin est donc urgente pour l’en­semble des producteurs d’oignon et d’échalote. Les recherches ont commencé dès fin 2019 à Vegenov et au Caté.

 

Vegenov a testé différents produits alternatifs dont le vinaigre (qualité alimentaire, 10 % d’acide acé­tique). Le vinaigre est déjà au­torisé comme substance de base pour le traitement des graines de céréales. Il a été évalué à des doses de 1 à 10 % et a montré dès 2 % une efficacité intéres­sante. La croissance mycélienne du champignon, placé en culture liquide après passage de 2 h à 42°C, a été éva­luée et comparée à celle d’une culture témoin sans vinaigre. A la concentra­tion de 2 %, il inhibe la croissance de la fusariose in vitro.

La dose de 2 % efficace et sélective

La phase suivante a été de tester le vinaigre en traite­ment de bulbes dans des conditions aussi proches que possible des situa­tions professionnelles, à des doses comprises entre 2 et 10 % dans l’eau des bains. Pendant l’automne 2020 et l’hiver 2021, deux essais en pots ont été réalisés au Caté sous abris. Les bulbes d’échalote ont été trempés à l’eau pendant 2 h à 42°C. Les bulbes ont ensuite été séchés avant d’être plan­tés en pots dans du terreau horticole.

Un premier essai en pots avec des bulbes présumés porteurs de fusa­riose n’a pas permis de confirmer l’ef­ficacité du vinaigre à 5 %, mais a mis en évidence un retard à la levée avec cette modalité. Ce retard faisant pen­ser à une phytotoxicité, il fallait d’autres données avec d’autres concentrations. De plus, le pourcentage de bulbes avec fusariose était bas (4 à 6 % dans les té­moins) et irrégulier. En lien avec les phytopathologistes d’OBS Innovation, un second essai a été conduit par la technique d’inocula­tion artificielle des bulbes.

Dans cet essai, le vinaigre a été testé à des concentrations de 2, 5 et 10 % et a été comparé à Topsin. Les ré­sultats confirment que le vinaigre est efficace dès 2 %. Des nécroses de plateaux résultant d’une phytotoxicité, plus fréquentes que dans le témoin ou la référence, ont été observées à 5 et 10 %. La dose de 2 % a donc été rete­nue comme efficace et sélective.

Pas de retard signi­ficatif de la levée

Des essais de plein champ ont égale­ment été conduits au Caté. Dans le premier essai (2020), le vinaigre était utilisé à la seule dose de 5 %. Cet essai a montré son efficacité par rap­port aux témoins et à la référence Topsin, mais a également permis d’ob­server un retard à la levée, rattrapé par la suite. Dans le second essai (2021), en tenant compte des résultats des essais en pots, la dose de 2 % a été testée, mais aussi une dose plus faible à 1,5 %.

On a observé au cours de cet essai qu’une dose de 2 % de vinaigre dans le bain n’entraînait pas de retard signi­ficatif de la levée et gardait un niveau proche de la référence. L’efficacité du vinaigre étant intéres­sante sur échalote, la sélectivité de cette substance de base a été évaluée au printemps 2021 sur des quantités de plants plus importantes d’échalote et oignon. Cet essai organisé par la Chambre d’agriculture de Bretagne, avec la Cuma de trempage de Saint-Pol-de-Léon, l’OBS et le Caté a confirmé la bonne sélecti­vité d’un trempage quelques semaines avant plantation.

Aurélie Le Goff-Prat (Caté), Jean-Michel Collet (CTIFL/Caté), Claire Gouez (Chambre d’agriculture de Bretagne), Claudie Monot (Vegenov), Jean-Luc Tanguy (OBS)

Echalote et oignon - Du vinaigre pour gérer la fusariose ? Aujourd’hui & Demain n°149 Décembre 2021

Un usage bientôt autorisé ?

En tant que substance de base, le vi­naigre n’est pas soumis à homologa­tion et peut être utilisé aussi bien en AB qu’en conventionnel. Cependant, la recette (trempage à l’eau à 42-43°C à la dose de 2 %, durée de 2 h) doit encore être approuvée au ni­veau européen. Une démarche en ce sens est en cours, portée par la sec­tion échalote nationale, animée par le Cerafel. Un dossier a été transmis à la DGAL et la demande a été remontée à la Commission des Usages Orphelins co-animée par le CTIFL. La profes­sion espère une issue favorable sous quelques mois.

Actuellement, l’usage n’est pas autorisé car la recette est dif­férente de celle utilisable en AB en trai­tement de semences de céréales. Les expérimentations se poursuivent pour confirmer ces résultats prometteurs, trouver les doses de rajouts adaptées entre bains et tester l’efficacité du vi­naigre sur les autres pathogènes de l’échalote et de l’oignon. L’incorporation du vinaigre dans l’eau du bain permettrait de conserver tous les bénéfices de ce dernier sur les autres maladies transmissibles par le bulbe. Ce mode d’application éviterait d’ajouter une étape au traitement des plants.

Un besoin urgent en bio

En AB, sans moyen de lutte contre la fu­sariose, les taux de perte sont plus éle­vés qu’en conventionnel et atteignent fréquemment 5 %. Sur des parcelles à risques, certaines années à climat fa­vorable (chaud et humide), le taux peut atteindre 20 %. Les seules solutions li­mitant la fusariose sont la rotation des cultures, l’épuration systématique des touffes contaminées en fin de culture et le tri soigneux des plants avant trem­page.

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