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DNC : pourquoi la France et l’Italie appliquent-elles l’abattage total des foyers confirmés ?

La stratégie d’abattage total des foyers confirmés de dermatose nodulaire contagieuse, conjointe à la France et à l’Italie, est critiquée. Elle s’appuie toutefois sur des obligations réglementaires et des recommandations scientifiques. « L’abattage total est un drame pour les éleveurs touchés, mais laisser la maladie diffuser et s’installer sur le territoire en serait un pour l’ensemble des éleveurs », explique Kristel Gache, vétérinaire et directrice de GDS France. 

<em class="placeholder">vache atteinte de DNC</em>
Face à la DNC, l'Italie et la France appliquent la même stratégie de gestion : dépeuplement de l'ensemble des animaux des foyers confirmés, vaccination rapide et massive, restriction des transports d'animaux au sein de la zone réglementée.
© Michael Patching

Depuis le début de l’épizootie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC), des voix s’élèvent contre l’abattage total des lots d’animaux dont au moins un individu est détecté positif à la maladie. Parmi elles, la Confédération Paysanne et la Coordination Rurale demandent la suspension de cette mesure, qu’elles remplaceraient par un abattage sélectif, touchant seulement les animaux malades.

Pour étayer cette demande, la Confédération Paysanne s’appuie sur un avis de l’EFSA de 2016(1), qui estime qu’une fois la vaccination bien engagée, les stratégies d’abattage total des foyers d’infection et d’abattage partiel présenteraient la même efficacité.

Toutefois, les résultats de cette étude sont ceux d’un modèle de prédiction mathématique. Ses conclusions précisent qu’il faudrait vérifier ces données en conditions réelles. « Avec la densité d’élevages bovins en France, c’est prendre le risque de la voir diffuser très rapidement », estime Kristel Gache, vétérinaire et directrice de GDS France.

95 % de risque d’infection dans les 4,5 km alentours

En effet, la DNC est une maladie vectorielle, transmise par les stomoxes et les taons. Sa période d’incubation est en moyenne de 4 à 14 jours, mais peut aller jusqu’à 28 jours. Ainsi, dans un même lot, il peut y avoir des animaux présentant des signes cliniques, des animaux en période d’incubation, mais aussi des animaux asymptomatiques.

« Certains animaux ne réagissent pas aux tests, car il est difficile de détecter des animaux infectés en cours d’incubation ou subcliniques. Conserver ces animaux, c’est conserver un réservoir de virus, que les stomoxes et les taons peuvent propager. En période d’activité de ces insectes, la probabilité d'une infection dans un rayon de 4,5 km autour d'un établissement infecté est supérieure à 95% », précise Kristel Gache.

Un risque élevé, pour une maladie classée catégorie A, à éradication immédiate. « La réglementation européenne nous impose l’abattage total, par l’article 12 du règlement 2020/687. Les dérogations ne concernent pas nos types d’élevage. Par exemple, il y a une dérogation pour les animaux en bâtiments fermés, mais il s’agit de bâtiments hermétiques aux vecteurs, et nous n’en avons pas », explique la vétérinaire.

Sans bâtiments hermétiques, le confinement des animaux ne peut être une mesure efficace pour une maladie vectorielle. En effet, les insectes vecteurs peuvent entrer et sortir des bâtiments, et ainsi continuer de répandre la maladie.

Même gestion en France et en Italie

Autre controverse au sujet de la maladie : sa gestion par les autres pays touchés. Sur les réseaux sociaux, des posts affirment que l’Italie n’appliquerait pas la stratégie d’abattage total.

Sur ce point, le ministère de l’agriculture est formel : « Face à la maladie, l'Italie et la France appliquent la même stratégie de gestion, basée sur les mêmes motivations d'ordre scientifique et réglementaires : dépeuplement de l'ensemble des animaux des foyers confirmés, vaccination rapide et massive (dès le 18 juillet en France) dans la zone touchée, restriction des transports d'animaux au sein de la zone réglementée. Du fait du caractère insulaire de la Sardaigne, l'Italie a choisi de vacciner tous les bovins présents sur l'ensemble du territoire sarde. L'objectif, en France comme en Italie, est l'éradication rapide et totale de la maladie. La Suisse, dans sa zone frontalière avec la Haute-Savoie, a instauré une politique de vaccination de l'ensemble des bovins. »

A propos de l’épisode de DNC survenu en 2015 dans les Balkans, la directrice de GDS France reste mesurée : « Il est difficile de comparer les situations entre elles. Il semble ressortir malgré tout que la Bulgarie, qui a appliqué le triptyque abattage total, vaccination et restriction aux mouvements le plus strictement, conformément à la réglementation européenne, est le pays qui a éradiqué la maladie le plus rapidement ».

Plus de 80 % des animaux de la zone réglementée vaccinés

Reste que pour les éleveurs victimes de la maladie, et qui voient tout ou partie de leur troupeau abattu, c’est une tragédie, car il faudra remplacer des animaux sélectionnés parfois depuis plusieurs générations pour répondre à des conditions d’élevage et des objectifs spécifiques. « Pour les éleveurs touchés, c’est un drame, il n’y a pas de débat là-dessus, affirme la directrice de GDS France, mais ce serait un drame pour l’ensemble de la communauté des éleveurs si nous laissions la maladie diffuser et s’installer sur le territoire. Les animaux atteints souffrent, beaucoup en meurent. On ne peut pas vivre avec cette maladie. Elle pose trop de problématiques de bien-être animal, de pertes de production, de pertes de marchés ».

Grâce à la campagne de vaccination, très rapide malgré les contraintes liées à un vaccin vivant, fragile et dont les stocks se trouvaient en Afrique du Sud, la vétérinaire espère que la maladie sera bientôt circonscrite. Plus de 80 % des animaux de la zone réglementée, sont désormais vaccinés. « Nous aurons probablement des foyers jusque fin août, mais l’incidence devrait diminuer rapidement », indique Kristel Gache.

Rédaction Réussir

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