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Des solutions pour raisonner l'utilisation des antibiotiques

Comment utiliser moins d’antibiotiques en gardant des bovins en bonne santé. Tour d’horizon des solutions pratiques pour les pathologies les plus concernées : boiteries, mammites, diarrhées et maladies respiratoires des jeunes.

L’ANTIBIORÉSISTANCE est le
thème retenu pour la visite
sanitaire bovine en 2016.
L’ANTIBIORÉSISTANCE est le
thème retenu pour la visite
sanitaire bovine en 2016.
© J.-M. Nicol

Reconnue comme un sujet majeur, la question de l’antibiorésistance a été prise à bras-le-corps par les filières d’élevage. À travers le plan Écoantibio puis la Loi d’avenir agricole d’octobre 2014, le législateur a fixé des objectifs de réduction d’utilisation des antibiotiques vétérinaires.

À mi-parcours du plan Écoantibio, la moitié du chemin a effectivement été faite. Des solutions pratiques existent pour utiliser mieux et moins d’antibiotiques en élevage. Les chambres d’agriculture de Bretagne, en collaboration avec les GDS, GTV et le GIE élevages de Bretagne les ont présentées lors d’une journée organisée autour de quatre grandes problématiques : boiteries, infections mammaires, diarrhées et maladies respiratoires des jeunes. Morceaux choisis.

Boiteries : pas d’antibiotique sans lever le pied

Pour Rémy Vermesse, vétérinaire au GDS Bretagne, « beaucoup trop de traitements antibiotiques non justifiés sont faits contre les boiteries, et notamment avec du ceftiofur. Ce dernier est très apprécié en raison de son délai d’attente nul, mais qui n’en est pas moins un antibiotique critique, utilisable en dernier recours en médecine humaine, donc à préserver absolument ».

« Seul le panaris nécessite un traitement antibiotique systématique par voie générale », a rappelé le vétérinaire. Et un panaris c’est une douleur intense et brutale, une inflammation symétrique et une vache qui a de la fièvre. Si vous ne retrouvez pas l’ensemble de ces symptômes : levez le pied de la vache, nettoyez-le et commencer à dégager la corne pour essayer de voir quel est le problème, si vous pouvez le traiter seul et, si oui, comment, ou s’il est nécessaire de faire appel à un spécialiste.

« Même les boiteries infectieuses comme le fourchet ou la maladie de Mortellaro peuvent se traiter avec un soin local. »

Établir un plan d’actions au-delà de 15 % de « boiteuses »

Les boiteries sont des affections multifactorielles. Lorsqu’elles interviennent de façon récurrente sur un élevage, il est nécessaire de faire une analyse globale pour améliorer de façon durable la situation. Et mieux vaut ne pas attendre qu’elles prennent trop d’importance car les boiteries coûtent cher.

En regardant vos vaches au cornadis ou à la marche, si vous en avez plus de 15 % qui ont des soucis d’aplombs, ou si plus de 15 % des vaches sont traitées pour boiteries et/ou contre la maladie de Mortellaro, il est intéressant de faire intervenir un spécialiste pour réaliser un parage diagnostic. Il permettra de recenser les principales causes de boiteries de l’élevage et les actions prioritaires à mettre en oeuvre, au niveau du logement, de l’alimentation ou de la conduite sanitaire.

Diarrhées des veaux : priorité à la prévention

Les problèmes digestifs représentent un peu plus de 10 % des causes de recours aux antibiotiques, mais les voies orale ou générale utilisées pour leur administration sont les plus « à risque » en matière d’antibiorésistance. « Les antibiotiques critiques, notamment les fluoroquinolones, sont trop largement utilisés. Et des résistances commencent à apparaître vis-à-vis d’antibiotiques récents, ont souligné les intervenants. Pourtant, la mise en place d’une bonne prévention reposant sur quelques règles simples permettrait d’éviter nombre de ces diarrhées. »

Une diarrhée peut être liée à des causes alimentaires et/ou infectieuses. Et dans ce cas, elle survient si les capacités de défenses du veau sont dépassées par la charge infectieuse. Il est donc essentiel de tout mettre en oeuvre pour limiter cette pression infectieuse, en assurant notamment une hygiène sans faille des lieux de vêlage et d’élevage des veaux, du matériel de buvée. La pratique du vide sanitaire est fortement recommandée. « Après avoir nettoyé et désinfecté avec un produit adapté et homologué, l’idéal est de laisser le bâtiment vide pendant un mois. Mais huit jours valent mieux que rien ! »

Autre priorité : la qualité du transfert colostral. Le veau doit recevoir 2 litres de colostrum de bonne qualité à 50 g/l dans les deux heures après vêlage et 4 litres au total au cours des 12 premières heures.

La prévention peut aussi reposer sur une vaccination des vaches gestantes destinée à enrichir le colostrum en anticorps spécifiques pour limiter la fréquence et la gravité des diarrhées touchant l’élevage.

Penser aux kits de diagnostic rapides

Si malgré les mesures de prévention, la diarrhée survient : isoler rapidement le malade — s’il s’agit d’une diarrhée infectieuse, il peut excréter de très importantes quantités de germes — vérifier que l’on a bien affaire à une/des bactéries et déterminer la(les)quelle(s) pour cibler au mieux l’antibiotique à utiliser.

« Les bactéries, seules ou en association, ne sont présentes que dans un quart des cas de diarrhées. » Dans une majorité de situations, l’antibiotique n’est donc pas utile. Il existe aujourd’hui des kits d’analyses rapides testés pas les GDS et GTV de Bretagne qui permettent en une quinzaine de minutes de mettre en évidence avec une précision suffisante les principaux agents des diarrhées (E. coli K99 ou CS 31a, rotavirus, coronavirus, cryptosporidies).

Homéopathie, huiles essentielles : des résultats mitigés

■ Des essais ou suivis ont été réalisés avec des spécialités homéopathiques ou des huiles essentielles en intramammaire ou massage externe. Ils montrent des résultats intéressants en termes d’amélioration des signes cliniques, à l’origine d’une satisfaction des éleveurs. Mais ils semblent plus mitigés concernant les comptages cellulaires et la guérison bactériologique. « L’utilisation des huiles essentielles en intrammamaire, notamment, pose question, a estimé Marylise Le Guenic. Car si les huiles essentielles retenues avaient bien un pouvoir antibactérien ou antiinflammatoire in vitro, l’effet antibactérien était inhibé en présence de lait. »

■ De plus, si le recours à l’homéopathie pose peu d’interrogations en matière d’innocuité et de risques de résidus — les spécialités diluées à au moins un millionième (3 CH) ne nécessitent d’ailleurs aucun délai d’attente — il n’en est pas de même avec les huiles essentielles. « Très concentrées, ces huiles essentielles nécessitent une vigilance pour l’animal, l’utilisateur et le consommateur. Seules les huiles essentielles inscrites au tableau 1 du règlement LMR sont autorisées et en l’absence d’AMM, les délais d’attente à respecter sont de 7 jours pour le lait, 28 jours pour la viande. »

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