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« Une politique globale cohérente pour la montagne »

La loi n°72-12 du 3 janvier 1972 relative à la mise en valeur pastorale fête ses 50 ans. L’occasion de rappeler les objectifs de cette loi précurseur dont les outils sont toujours utilisés aujourd’hui. Entretien avec Corinne Eychenne, géographe.

La loi dite pastorale a-t-elle atteint ses objectifs ?

Corinne Eychenne - Oui, la loi pastorale est une réussite, dès sa mise en œuvre en 1972, et encore aujourd’hui. Avec l’indemnité spéciale montagne (ISM) adoptée en 1973, devenue plus tard l’ICHN que nous connaissons, une politique globale cohérente pour la montagne s’est mise en place. L’idée était d’avoir un cadre simple et clair qui s’articule autour de l’organisation collective des éleveurs, de l’organisation du foncier et la création d’une forme de mise à disposition du foncier plus durable que les accords verbaux. Ainsi sont nés les groupements pastoraux (GP), les associations foncières pastorales (AFP) et les conventions pluriannuelles de pâturage (CPP). 50 ans après, ils répondent toujours à des problématiques actuelles.

Quels sont les intérêts de ces trois outils ?

C. E. - Les AFP sont des associations de propriétaires qui permettent de créer des structures foncières cohérentes dans des zones très morcelées et plus ou moins en déprise. Elles organisent collectivement le foncier avec souvent des propriétaires absents ou qui ne savent pas qu’ils le sont. Une commune peut ainsi accompagner la consolidation d’un élevage ou une installation.

Les GP donnent un cadre au fonctionnement de collectifs d’éleveurs. Ils gèrent non seulement la ressource pastorale (règles de fonctionnement, dates de montée et de descente, embauches, approvisionnements…), mais se chargent aussi des déclarations Pac sur les surfaces collectives et sont directement bénéficiaires des MAEC et des mesures d’aide au pastoralisme.

Les CPP, qui sont des conventions plus légères que le fermage, facilitent la mise à disposition officielle du foncier.

« La loi pastorale donne un cadre simple et clair grâce à trois outils fondateurs »

Si ces trois outils ont été pensés pour fonctionner ensemble, on observe que les GP sont plus utilisés pour les estives en altitude où le foncier appartient aux communes ou à l’État, même si cela dépend des massifs. Il n’y a alors pas besoin d’AFP, contrairement aux étages intermédiaires, plus souvent morcelés. Les CPP sont utilisées sur les deux étages, assez fortement sur les AFP. En estive, l’accès au foncier se fait aussi très largement par l’intermédiaire des droits d’usage.

Les AFP, GP et CPP ont-ils vocation à être utilisés en dehors des zones de montagne ?

C. E. - Plusieurs enjeux nécessitent que ces outils puissent être saisis dans tous les territoires : déprise, gestion des espaces naturels, recréer une culture pastorale… à l’exemple du marais de Brouage (Charente-Maritime), qui a créé une AFP en 2019. Mais les AFP peuvent être clivantes : bien qu’elles ne touchent pas à la propriété, le passage en gestion collective peut être mal vécu.

Il y a par ailleurs depuis le début une vraie difficulté pour identifier les surfaces pastorales dans la Pac. Elles ne correspondent pas bien à la vision européenne de l’agriculture, et pas uniquement en zone de montagne, c’est aussi le cas des surfaces pastorales à dominante ligneuses du pourtour méditerranéen, dont les équivalents ne sont pas reconnus dans le Nord de la France. Il faut sans cesse réexpliquer les surfaces agricoles. La prochaine Pac aurait pu reconnaître davantage les services environnementaux rendus par le pastoralisme, par exemple à travers les écorégimes, mais ce n’est pas le cas.

Toutes les formes de mise en valeur du pastoralisme tels le travail mené pour inscrire la transhumance au patrimoine mondial de l’Unesco (voir encadré ci-contre), ou l’année internationale des parcours et des éleveurs pastoraux en 2026, donnent des arguments pour le défendre et étendre son usage.

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