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Trois idées reçues sur l’installation en élevage de chèvres

L’élevage caprin reste attractif auprès des porteurs de projets. Laitiers ou fromagers fermiers, ils sont nombreux chaque année à se lancer le défi entrepreneurial de l’agriculture. À condition d’anticiper la charge de travail, de fixer des prix rémunérateurs et d’anticiper l’astreinte et le travail, il est possible de s’installer comme fromager fermier avec un faible volume de lait transformé. De même, le métier s’ouvre à des profils variés et il n’est pas nécessaire d’être issu du milieu agricole pour devenir éleveur ou éleveuse de chèvres. Par ailleurs, s’installer en élevage caprin ne signifie plus nécessairement y consacrer toute sa carrière. Les parcours peuvent évoluer, et certains choisissent — ou doivent parfois — arrêter leur activité avant la retraite.

<em class="placeholder">Vente de fromages de chèvre sur un marché en été</em>
La filière caprine accueille de nouveaux profils d'installés qui commencent plus ou moins gros et qui restent plus ou moins longtemps dans le métier.
© B. Morel

La filière caprine recrute et de nombreux porteurs de projets s’installent chaque année comme éleveur laitier ou fromager fermier. La filière caprine est même aujourd’hui la seule filière d’élevage où il y a plus d’installations que de départs. Cette vitalité ne doit pas faire oublier que l’élevage caprin est un métier exigeant, où il faut savoir être polyvalent, notamment en fromagerie fermière où l’on est à la fois éleveur de chèvre, fromager et commerçant.

De nombreux fromagers commencent petit ce qui peut avoir un intérêt pour limiter les investissements et maîtriser la charge de travail. Mais gare à commencer dans de bonnes conditions et ne pas se faire manger par la multiplicité des taches. Parfois, viser un peu plus gros permet de s’équiper correctement et d’envisager de faire appel à de la main-d’œuvre extérieure pour souffler occasionnellement.

Plus peur d’arrêter

Les profils des nouveaux installés se sont diversifiés et les exploitants sans ancrage familial sont de plus en plus nombreux. Ces reconvertis s’épanouissent dans l’entrepreneuriat et dans le contact avec la nature.

Lors de son discours de clôture à l’assemblée générale de la Fnec fin avril à Rodez, Jacky Salingardes témoignait du changement de mentalité dans les générations : « Maintenant, les nouveaux éleveurs n’ont pas peur d’arrêter ce métier. C’est très différent ma génération où le métier d’éleveur était considéré comme un engagement de toute une vie ». Les jeunes générations osent davantage envisager de s’arrêter, de changer de voie, de quitter l’élevage s’ils en ressentent le besoin ou s’ils ne s’y retrouvent plus.

Finalement, déconstruire ces idées reçues, c’est aussi mieux accompagner les porteurs de projet vers une installation choisie, réfléchie et pérenne. Le caprin n’est plus un refuge pour les rêveurs, mais un terrain d’expression pour des entrepreneurs exigeants, en quête de sens autant que d’équilibre.

Lire aussi : Idée reçue n° 1 – Il faut s’installer fromager avec un gros volume

Lire aussi : Idée reçue n° 2 : Quand on s’engage éleveur, c’est pour la vie

Lire aussi : Idée reçue n° 3 : Il faut être enfant d’agriculteurs pour s’installer éleveur de chèvres

« Renouvellement des actifs plutôt que renouvellement des générations »

L’installation en élevage caprin, notamment en fromager fermier, déjoue les difficultés classiques du renouvellement agricole. Christophe Perrot, économiste à l’Institut de l’élevage, décrypte les dynamiques à l’œuvre.

<em class="placeholder">Christophe Perrot, économiste à l’Institut de l’élevage</em>

« Les chiffres sont sans appel : le secteur caprin figure parmi les plus attractifs de l’agriculture française. Il se distingue notamment par un taux de remplacement supérieur à 100 %, au même titre que le maraîchage, les plantes aromatiques ou l’élevage équin. Cela signifie qu’il y a plus de personnes qui s’installent qu’il n’en part. Mais cette attractivité cache un fort turnover, qu’il ne faut ni sous-estimer ni surestimer.

Plus de la moitié des installations en hors cadre familial

Plutôt que de renouvellement des générations, je préfère parler de renouvellement des actifs car les agriculteurs ne veulent pas tous s’installer pour une génération et qu’il faut prendre en compte la transformation du travail et la montée en puissance du salariat agricole sous différentes formes. En comptant les fermiers et les laitiers, 10 % des éleveurs caprins arrêtent après moins de quatre ans d’activité et 25 % après moins de 10 ans. Des chiffres qui grimpent encore si on ne considère que les fromagers fermiers. Une étude est en cours pour suivre les éleveurs recensés en 2020. 40 % des éleveurs fromagers caprins de 2020 s’étaient installés après 2010 ! Ils semblent encore très nombreux en activité.

Le profil type du nouvel éleveur caprin s’est diversifié avec 54 % d’installation hors cadre familial. 72 % lorsqu’il s’agit d‘installations en individuel, et 37 % pour les installations en Gaec. Les installations en individuel et sur de petites surfaces (47 chèvres en moyenne au démarrage) ne sont pas sans risques. Isolement professionnel, notamment dans les cas de reconversions, charge mentale et de travail et faible revenu peuvent conduire à des arrêts choisis ou subis. On peut hélas facilement y perdre sa santé, sa famille et son argent…

Des installations accessibles… mais peu aidées

Cependant, la filière caprine offre une grande accessibilité économique : un petit capital de départ permet de se lancer en fromagerie fermière avec des circuits courts. Mais cela joue contre l’accès aux aides à l’installation (DJA). Seulement 38 % des installations caprines sont aidées, contre 49 % en bovins laitiers et 53 % en ovins lait. Deux raisons principales : des profils atypiques avec des porteurs de projets en reconversion plus âgés et des projets trop modestes pour répondre aux critères de la DJA.

Si la filière caprine veut consolider son avenir, elle doit encourager et sécuriser la diversité des parcours, et penser en termes de flux d’actifs, plus que de générations. Les salariés sont plus présents dans le secteur caprin (notamment fermier) que dans les élevages bovins. Et la porosité entre les statuts de salariés ou d’apprentis et d’exploitants ou coexploitant est un atout spécifique des filières de ruminants. Paradoxalement, la taille globale modeste du secteur caprin livreur, est aussi une force : quelques dizaines d’installations annuelles supplémentaires suffiraient pour rééquilibrer la démographie à moyen terme et pérenniser une sous-population qui ne se renouvelle pas assez actuellement. »

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