Aller au contenu principal

Maîtriser les Pseudomonas sans les éliminer

Les fromages envahis par les Pseudomonas sont difficilement vendables. Plutôt que d’éliminer ces bactéries résistantes et naturellement présentes, il faut apprendre à les maîtriser en fromagerie fermière comme en élevage.

En se développant sur les fromages fermiers, les Pseudomonas peuvent provoquer une amertume prononcée, des taches, fluo ou non, allant du jaune au marron-orangé et un aspect poisseux. Or, ces bactéries sont naturellement présentes dans l’environnement, dans le lait et dans les fromages. « Il semble illusoire de vouloir les éliminer, explique Cécile Laithier de l’Institut de l’Élevage. Par contre, comme c’est l’excès de l’activité de ces bactéries qui peut engendrer des accidents sur les fromages, il faut plutôt tenter de limiter leur contamination et leur multiplication ».

Les 230 espèces de ce groupe ne sont pas considérées comme pathogène alimentaire. Pourtant, certaines peuvent entraîner des maladies des végétaux, des animaux voire des hommes. D’autres, au contraire, sont appréciées et utilisées par exemple pour la production de neige artificielle, la réduction des volumes de boues d’épuration, l’assèchement des litières, l’enrobage des semences ou la protection des racines.

Les Pseudomonas ont pour habitat naturel les environnements aquatiques, eaux de source, de surface, souterraines et saumâtres. Présentes dans tous les milieux humides (eaux, sols, air…), elles sont capables de survivre dans des milieux extrêmes variés : environnement humide, sol, surface des végétaux, litière… Elles seraient même présentes dans les nuages. Dans les exploitations caprines, on en trouverait, d’après les quelques analyses existantes, autour de 3 500 bactéries sur les deux trayons des chèvres ou dans l’air à hauteur de 11 bactéries pour 100 litres d’air. « Dans nos études, nous avons trouvé des Pseudomonas dans tous les laits et tous les fromages, même là où aucun accident n’avait été déclaré » avertit Cécile Laithier. Les niveaux de Pseudomonas dans les laits varient de 1 000 à 10 000 unités formant colonies (UFC) par ml. Pour les fromages, la contamination moyenne observée voisinait les 15 000 UFC par gramme. « Mais il est à ce jour impossible de déterminer un seuil critique au-delà duquel la concentration induit une altération organoleptique rendant le fromage impropre à la commercialisation ; cette valeur dépendant des souches de Pseudomonas, de leur activité et de la nature du fromage. »

Très résistantes, ces bactéries peuvent s’attacher aux surfaces en inox, en caoutchouc, en plastique, en verre ou en bois. Et former en quelques dizaines minutes un biofilm résistant au frottage et aux désinfectants. Or, ce biofilm est un réservoir de micro-organismes susceptible de contaminer de nouveau l’eau, le lait ou les fromages.

Difficile donc de s’en débarrasser. Surtout que ces bactéries sont capables d’acquérir une résistance aux produits désinfectants, en particulier au chlore. Les Pseudomonas sont susceptibles de mettre en œuvre des mécanismes adaptatifs vis‐à‐vis de différentes molécules désinfectantes conduisant à la sélection progressive de souches résistantes. Ce phénomène d’acquisition de résistance par la sélection est stimulé par le contact prolongé avec des molécules désinfectantes.

Les Pseudomonas peuvent se développer entre 0 et 32 °C avec une température optimale de 28 °C. Ils se développent donc très bien aux températures de transformation et de conservation des laits et des fromages. Cependant, le maintien des laits et des fromages à 4 ou 6 °C ralentit la croissance des bactéries ainsi que l’activité des enzymes lipolytiques et protéasiques. De même, un pH inférieur à 4,5 et une concentration en sel supérieur à 3,5 % semblent inhiber le développement des Pseudomonas.

Pour éviter de devoir jeter des fromages, l’Institut de l’Élevage et de nombreux partenaires ont étudié les bonnes pratiques qui limitent le développement des Pseudomonas. Ces conseils en fromagerie mais aussi en élevage sont présentés dans ce dossier.

Une bactérie tenace et pénalisante

En savoir plus

Un guide et des fiches pratiques

Suite à une vaste étude de l’Institut de l’Élevage et de ses partenaires, un Guide d’appui technique pour l’accident de fromagerie à la ferme lié à Pseudomonas spp — Facteurs de maîtrise en élevage et en fromagerie pour la technologie lactique — a été édité par Technipel (www.technipel.idele.fr) pour les techniciens fromagers. Pour les producteurs fermiers et les producteurs livrant leur lait pour la fabrication de fromage au lait cru, deux fiches plus accessibles sont en ligne sur www.idele.fr. Ces fiches synthétiques permettent de mieux reconnaître l’accident lié à la bactérie et proposent toute une série de démarches pour maîtriser la contamination.

Les plus lus

Bouc de race saanen
Quels boucs choisir en 2024 ?
Le catalogue Capgènes des semences de boucs alpins et saanen vient de paraître. Le meilleur de la génétique caprine française est…
Elise, Jérôme et leurs deux filles, de 8 et 11 ans, vivent au milieu des animaux. Lapins, cochons, chèvres, chevaux, vaches, oies, ânes et chiens cohabitent à la ferme ...
« Mon mari boucher vend de la viande de porc et de chevreau de la ferme »
Élise et Jérôme Happel élèvent des chèvres et des porcs en Alsace. Boucher de métier, Jérôme valorise la viande caprine issue de…
Répartition régionale du cheptel français de chèvres au 1er novembre 2023 et évolution par rapport à 2022
Recul du cheptel caprin quasi généralisé en 2023
Le cheptel caprin français est en recul dans quasiment toutes les régions. Analyse et graphique de l’Institut de l’élevage.
Chèvrerie vue d'avion
« On veut travailler dans de bonnes conditions et que les chèvres soient bien »
L’EARL des Tilleuls a investi dans un bâtiment tout confort pour travailler dans de bonnes conditions. Salle de traite, stalle de…
Émilien Retailleau et ses chèvres poitevines
« Je vends des chevreaux élevés sous la mère »
Émilien Retailleau, éleveur d’une cinquantaine de chèvres poitevines à la ferme de la Bonnellerie dans la Vienne, commercialise…
Améliorer le bien-être des chèvres via l’aménagement des bâtiments
Un mini-guide pour enrichir l'espace de vie des chèvres
L'Anicap édite une plaquette qui montre quatre types d'aménagements à installer facilement dans une chèvrerie.
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 89€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Chèvre
Consultez les revues Réussir Chèvre au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Réussir Chèvre