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Les enjeux de la réforme de la PAC pour les éleveurs caprins

Dans la nouvelle PAC en cours de définition, les éleveurs caprins ont intérêt à défendre le maintien des aides couplées, une ICHN réservée à l’élevage et une reconnaissance de l’existant.

Le maintien des aides couplées est vitale pour les élevages de ruminants. C'est les signal fort qu’attendent les éleveurs de la part des pouvoirs publics qui reconnaissent ainsi l’importance de l’élevage tant dans la gestion agroécologique des territoires que dans la souveraineté alimentaire de la France. © D. Hardy
Le maintien des aides couplées est vitale pour les élevages de ruminants. C'est les signal fort qu’attendent les éleveurs de la part des pouvoirs publics qui reconnaissent ainsi l’importance de l’élevage tant dans la gestion agroécologique des territoires que dans la souveraineté alimentaire de la France.
© D. Hardy

« Les enjeux de la future politique agricole commune sont importants pour tous les éleveurs de ruminants car les aides publiques représentent une grosse part de leurs revenus », explique Philippe Chotteau, chef du département économie à l’Institut de l’élevage. Les éleveurs caprins ont un niveau d’aide par unité de main-d’œuvre (UMO) moins élevé que les autres filières de ruminants. Selon les calculs réalisés en 2018 à partir des données du réseau d'information comptable agricole (RICA), les livreurs de lait caprin touchaient en moyenne 16 000 euros de subvention globale pour 1,3 UMO. Les caprins fromagers étaient eux à 22 000 euros en moyenne, toujours pour 1,3 UMO. « Si les éleveurs caprins sont moins dépendants des aides de la PAC que les allaitants, elles représentent quand même en moyenne la moitié du revenu, prévient l’économiste. Les aides jouent un rôle irremplaçable, tout particulièrement en temps de crise ».

Des aides plus exigeantes sur le bien-être animal ou l’environnement

Dans le nouveau cycle de la PAC qui devait débuter en 2021, mais dont l’entrée en vigueur est désormais prévue pour 2023, certaines choses sont déjà connues. On sait ainsi que le budget global du premier pilier ne sera qu’en légère baisse. On connaît aussi le cadre général que sont le Green Deal et la stratégie Farm to fork.

Mais beaucoup de choses se jouent maintenant comme les règles de la prochaine PAC qui sont en cours de discussion dans la procédure de trilogue entre la Commission européenne, le Conseil européen et le Parlement européen. Une partie importante des paiements, de 20 à 30 %, sera liée au plan stratégique national (PSN). Celui-ci va être proposé par le Gouvernement français avant cet été, finalisé après échanges avec la Commission d’ici la fin de l’année. « Par nature, ces PSN seront très différents d’un pays à l’autre tout en répondant aux mêmes lignes directrices européennes, alerte Philippe Chotteau. Ces aides seront exigeantes sur la protection de l’environnement ou le bien-être animal, en allant au-delà des écoconditionnalités actuelles ». Rien n’est encore décidé mais les exigences pourraient par exemple porter sur l'accés des animaux à l'air libre ou la réduction de l’utilisation d’antibiotiques.

Les caprins profiteraient d’une plus grande convergence des aides

Pour limiter de nouvelles contraintes, les éleveurs de ruminants veulent faire reconnaître les aménités actuelles des systèmes existants ainsi que les efforts déjà effectués. Dans un communiqué du 11 janvier, la Fnec, la FNB, la FNPL et la FNO, réunis au sein d’Alliance, réaffirmaient leur volonté de préserver « un modèle durable caractérisé par une forte valorisation de l’herbe et des fourrages produits sur nos fermes pour tendre à l’autonomie alimentaire des troupeaux, à l’origine de nombreux services rendus aux territoires et à l’environnement. […] Dans le schéma vert du premier pilier, les productions les plus durables doivent être rémunérées en priorisant la valorisation des services environnementaux existants rendus par l’élevage de ruminants, tel que l’entretien des prairies (stockage de carbone, préservation de la biodiversité…), et la production des fourrages destinée à nos troupeaux pour tendre à l’autonomie alimentaire, notamment protéique. »

Pour les 70 à 80 % des aides restantes du premier pilier, les débats portent par exemple sur les plafonds d’aides couplées qui sont actuellement de 15 % dont 2 % pour les cultures de protéines. Ce débat se passe aussi au niveau français sur le niveau d’aides couplées qui bénéficient surtout aux secteurs des ruminants, caprins inclus. Les éleveurs de ruminants souhaitent conserver ce niveau d’aides couplées mais la FNSEA, dans un arbitrage de synthèse entre ses différentes familles, souhaite réorienter une partie de ces aides vers les zones intermédiaires, des zones céréalières où il y avait de l’élevage il y a 30 ans qui a progressivement laissé place aux seules grandes cultures, au détriment de la fertilité organique des sols et des prairies. Ces zones sont ainsi particulièrement vulnérables aux aléas climatiques et à des baisses de rendement des céréales. La vitesse de la convergence des aides découplées est aussi questionnée et les éleveurs caprins, qui sont historiquement sous dotés en aides, pourraient plutôt en profiter. De même, le paiement redistributif, c’est-à-dire la surprime aux 52 premiers hectares, sont aussi discutés. Avec des surfaces moyennes de 37 hectares pour les livreurs et de 49 hectares pour les fromagers (selon le Rica 2018), les éleveurs caprins en sont en moyenne bénéficiaires.

Appels à préserver l’ICHN

Les zonages d’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) ont été récemment revus, et on ne reviendra sans doute pas dessus à moyen terme. Ces aides profitent pour l’instant uniquement au secteur animal mais les productions végétales y prétendent dans les zones défavorisées hors montagne. Le budget n’augmentant pas, les aides des éleveurs de ces zones en seraient forcément impactés. Là aussi, les éleveurs de ruminants demandent que le service d’entretien des 13 millions d’hectares de prairies soit rémunéré, que les aides couplées soient maintenues à leur niveau actuel et que l’ICHN soit revalorisée et ciblée sur les productions animales. « L’élevage de ruminants est la seule activité économique à même de maintenir dynamisme et lien social sur des territoires subissant de forts handicaps naturels », précise le communiqué du 11 janvier. Les agriculteurs des massifs français confortent cette demande en rappelant que leurs « exploitations familiales et herbagères produisent, chaque jour, une multitude de produits d’excellence, tout en rendant des services inégalables en matière d’entretien des paysages, d’animation des territoires et de protection de l’environnement ».

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