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« 200 kg de lait en plus par chèvre en moyenne grâce au progrès génétique »

En Ardèche, l’EARL les Saapines du Ribon a gagné le trophée Gènes Avenir en alpine. La régularité dans l’investissement génétique et un enregistrement rigoureux des filiations ont permis un progrès génétique important du troupeau.

Christelle Dornes et Nicolas Soubeyrand étaient tout sourire le 1er mars dernier au Salon de l’agriculture. CapGènes leur remettait le trophée Gènes Avenir en alpine, un prix qui récompense les éleveurs les plus impliqués dans le schéma de sélection caprin français. Le choix des lauréats s’est fait en fonction de la régularité des investissements dans la génétique, du pourcentage de mères à boucs et de boucs sélectionnés pour les accouplements ou pour la production de semence et de l’évolution de la valeur génétique du troupeau sur la production et la morphologie mammaire.

L’EARL les Saapines du Ribon coche toutes les cases. L’élevage caprin a démarré en 2004 avec une centaine de chevrettes désaisonnées achetées chez Bruno Duchesne, leur ancien maître de stage. Ils commencent les inséminations dès 2006, puis adhèrent à CapGènes en 2010. Inscrits au CSO tremblante depuis 2017, ils voient très vite les premiers accouplements programmés et les premiers boucs issus de leur élevage partir en station. Depuis 2021, des boucs issus de leur élevage sont dans le catalogue de CapGènes. Actuellement, Tyson (alpin) et Tank (saanen) sont issus de leur élevage. « Cela nous fait quelque chose de voir des petits Soubeyrand partout », reconnaissent-ils fièrement.

Avec un index combiné caprin de 2,9 en 2022, on est bien au-dessus de la moyenne des troupeaux CapGènes à 1,3. « Quand l’inventaire génétique arrive, on aime bien regarder qui sont les meilleures, et si les chèvres qu’on aime bien sont aussi bonnes qu’on l’espérait. »

Un quart des chèvres à l’insémination

Environ un quart des 190 chèvres sont inséminées chaque année. Le plan d’accouplement est construit avec Alain Chalamet, l’inséminateur de XR Repro. « Il vient début mars et nous voyons ensemble quelles semences peuvent être placées sur les chèvres que nous avons sélectionnées, expliquent les éleveurs ardéchois. On privilégie davantage la morphologie, mais on cherche surtout des animaux bien équilibrés en lait, en taux, en cellules et en morphologie. » Dès janvier, les éleveurs commencent à les repérer à la traite en notant sur un carnet celles qui ont de bonnes mamelles. Ces observations sont bien sûr comparées avec la note de pointage.

Les chèvres à inséminer sont repérées dans le troupeau avec des colliers de couleurs. Elles sont inséminées fin mars et la réussite à l’IA est de 66 %, dans la moyenne nationale. Avec les retours, il ne reste qu’une quinzaine de vides qui sont généralement vendues à des fromagers.

Des petits lots de femelles pour chaque bouc

L’information de paternité est conservée pour le reste des chèvres et les chevrettes en monte naturelle. En effet, chaque chèvre ne rencontre qu’un seul bouc dans une petite case. « Avant, on tenait le bouc en laisse, mais certains boucs étaient très timides. Là, le bouc est en liberté, un peu chez lui et plus à l’aise. » Les résultats de fertilité, de 90 à 95 %, le prouvent.

Christelle et Nicolas ont préalablement choisi quel bouc irait le mieux avec quelle chèvre en fonction des attentes génétiques et des risques de consanguinité. « Pour chaque chèvre, nous avons trois choix de boucs. Quand on voit une chèvre en chaleur, on la note sur un tableau Velleda sur la porte de la chèvrerie. On se reporte ensuite au choix de boucs pour optimiser au mieux la génétique et limiter la consanguinité. »

Les chèvres sont placées par groupe de trois ou quatre en compagnie du bouc choisi dans un des petits enclos de trois mètres sur trois. Les accouplements sont notés sur la feuille, puis cet enregistrement est passé à Adice. Les montes naturelles se concentrent sur trois à quatre jours, toujours sous la surveillance des éleveurs. Quatorze boucs des deux races sont réquisitionnés pour assurer la reproduction des chevrettes et des chèvres.

Un pointage pour dresser un bilan

Au moment des mises bas, l’information de filiation est, là encore, bien conservée. Les naissances sont assez concentrées et les éleveurs passent régulièrement à la chèvrerie. « Cela nous est arrivé de revenir jusqu’à 2 heures du matin pour voir si tout allait bien, mais, généralement, les naissances ont surtout lieu le matin à partir de 6 heures. » Aussitôt nés, les chevreaux et chevrettes sont immédiatement identifiés en enregistrant le numéro de leur mère.

Antoine Gourdon, le pointeur de CapGènes, les visite deux fois par an. Une première fois en octobre-novembre pour évaluer les boucs et faire un prélèvement du cartilage de l’oreille pour faire une analyse génomique des potentiels boucs de sélection. Il passe ensuite en novembre-décembre pour pointer les primipares. À chaque fois, c’est l’occasion de regarder l’inventaire génétique. « J’aime bien travailler avec l’EARL Les Saapines, car ils suivent les conseils qu’on leur donne et ça marche, apprécie le technicien. Ils ont pu voir les effets de la génétique en trois ou quatre ans, et maintenant, ils ne peuvent plus s’en passer ! »

Des choix d’accouplement suivis en IA comme en monte naturelle

La production laitière moyenne est ainsi passée de 900 kg au début pour atteindre plus de 1 100 kg de lait par chèvre actuellement. « On a beaucoup progressé sur les taux, puisque avant, on avait des taux inversés avec plus de matières protéiques que de matières grasses. Maintenant, les taux sont équilibrés avec 39 à 40 de MP et 41 à 42 de MG. On suit aussi les cellules, mais le troupeau est plutôt sain, puisqu’on a fait la moitié de la campagne à moins de 800 000 de cellules. »

Une génétique qui se revend bien

Tous les boucs d’IA sont gardés, soit pour eux, soit vendus au prix de 85 euros à 15 jours. « Nous avons des clients réguliers ou des nouveaux qui viennent par le bouche à oreille. » Ils vendent aussi une vingtaine de chevrettes par an, au prix de 350 euros par animal livré. « On a de bons retours, apprécient les deux éleveurs. Notre acheteur nous a envoyé des photos sur le quai de traite et, comme il est en monotraite, cela fait des super grosses mamelles. » De quoi encore garder le sourire !

 

Chiffres clés

190 chèvres
1 100 kg de lait par chèvre
IPC : 126
IMC : 103
ICC moyen du troupeau : 2,9

Le saviez-vous ?

Les Saapines, contraction de saanen et d’alpine

Le nom de l’EARL, « Les Saapines du Ribon » n’a rien à voir avec les sapins mais plutôt avec un mélange de saanen et d’alpine ! Les éleveurs ont en effet deux tiers d’alpine et un tiers de saanen. Ils souhaitent à l’avenir revenir à un équilibre entre les races. Le Ribon correspond lui aux ruisseaux qui courent en contrebas des pâtures.

Une ration riche en luzerne pour assurer le lait

Avec l’aide du séchage en grange, la ration est à la hauteur de la génétique pour produire du lait pour le picodon AOP. Le pâturage ou le foin de prairie multi-espèces composent la base de la ration. Il est complémenté par de la luzerne achetée sur pied dans la Drôme, à une heure de tracteur de la ferme. Au pic de lactation, la ration est d’environ un kilo de foin de prairies, 1,8 kg de foin de luzerne, 700 grammes de chèvre laitière, 500 grammes d’un mélange avec maïs grain et luzerne déshydratée, 80 grammes de graines de tournesol et entre 80 et 100 grammes de correcteur azoté. Aux trois repas de fourrages quotidiens, s’ajoutent les cinq distributions d’aliments par le robot. Les chèvres sortent au pâturage à partir de fin mars-début avril jusqu’à début juillet.

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