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Trois façons de grouper les vêlages

Amélioration des performances zootechniques, sanitaires, économiques et de l’organisation du travail sont autant d’avantages permis par le regroupement des vêlages et ce, sans investissement. Dans ce dossier, nous avons observé les pratiques de trois éleveurs.

« Le groupage des vêlages représente l’un des deux leviers techniques qui donnent des résultats économiques, au même titre que la réduction de l’âge au vêlage, et ce, sans investissement financier. Cette pratique pleine d’intérêts reste toutefois encore trop confidentielle et son utilisation variable selon les races. Certes, dans certaines situations, les vêlages étalés se justifient lorsqu’ils sont en lien avec une vraie stratégie de valorisation des animaux. Mais il ressort des analyses des données que les élevages avec mises bas groupées sont toujours mieux placés que ceux en vêlages étalés et ce, quelles que soient la zone d’élevage et la race concernée », observe Philippe Dimon, de l’Institut de l’élevage. Les races rustiques (Aubrac, Salers) ont davantage recours à cette pratique, suivies par la Charolaise, la Limousine et la Blonde d’Aquitaine.

Le regroupement des vêlages sur une courte durée (trois mois maximum) est le meilleur moyen de garantir de bonnes performances technico-économiques et d’améliorer l’organisation du travail. Les diverses études réalisées sur la concentration des vêlages ont mis en évidence l’impact positif sur les critères techniques que sont l’intervalle vêlage-vêlage (IVV), le taux de mortalité et le poids à 210 jours des veaux : 17 jours d’IVV en moins et une mortalité inférieure de 3,5 % pour des vêlages groupés (plus de 80 % des vêlages sur deux mois) par rapport à des vêlages qui le sont moins (en dessous de 60 %), selon les résultats 2015 des élevages bovins viande suivis par Bovins croissance. Ainsi, ces progrès techniques se traduisent par des gains économiques (voir tableau). « Plus les vêlages sont concentrés, plus ces critères techniques s’améliorent. De ce fait, la productivité globale est supérieure de 2 points en moyenne et la prolificité de 4 à 5 points, conséquence d’une meilleure alimentation, tout le monde étant au même stade », explique Pascal Bisson, de la chambre d’agriculture des Deux-Sèvres.

Un élément structurant pour gagner du temps

« Les éleveurs qui passent le moins de temps par vache sont aussi ceux qui pratiquent le plus de vêlages groupés (sur trois mois au maximum). C’est un des éléments les plus structurants pour gagner du temps. Il offre l’accès à la conduite en lots qui, par la concentration des activités, rationalise le travail. Dans le cadre d’une étude(1), s’appuyant sur 96 diagnostics TraviBov(2) en exploitations, on a montré que le groupage des vêlages permettait de gagner en moyenne deux heures de travail par vêlage et par an », souligne Pascal Bisson. Grouper les vêlages limite la période pénible de leur surveillance. On se lève moins souvent la nuit, ou du moins on se lève une fois pour plusieurs vaches. Ce système facilite la surveillance des chaleurs, des saillies, de la santé des veaux et de leurs mères. De nombreux autres rouages de fonctionnement de l’élevage s’en trouvent améliorés sur le plan de l’organisation du travail. Les pointes d’activités concurrentielles sont étalées. « Le nombre de lots en bâtiments et au pâturage est réduit. Le rationnement des différentes catégories d’animaux est précis. Les interventions sur les animaux (vaccinations, écornage, déparasitage, sevrage...) sont groupées. Ceci a aussi l’avantage non négligeable de faciliter la valorisation commerciale des animaux par la présentation de lots plus importants et homogènes », note Bénilde Lomellet, conseiller viande à Élevage conseil Loire Anjou.

« Par ailleurs, les éleveurs portent une plus grande attention aux vêlages du fait de leur concentration. La vigilance peut faiblir et l’accident survenir lorsque la période de vêlages est longue », rapporte Bernard Lafon, du herd-book Salers. « Il est admis que sur le plan sanitaire, il y a moins de problèmes du fait de veaux du même âge avec un niveau d’infestation parasitaire proche », souligne Philippe Dimon.

Éviter le chevauchement des périodes de vêlages et de reproduction

« L’idéal est de faire en sorte que la fin de la période des vêlages ne chevauche pas le début de celle de la reproduction, autrement dit, avoir une période de mises bas contenue sur deux mois et demi », précise Pascal Bisson. En pratique, grouper les vêlages demande d’être vigilant à trois niveaux : la conduite, l’alimentation et la génétique.

« La mise en place nécessite d’être rigoureux. Il est important de se fixer une date de début et de fin des vêlages. Celle-ci doit être cohérente avec le système fourrager, les bâtiments, le mode de reproduction et les objectifs techniques et commerciaux de l’élevage. Si on manque de places en bâtiment, on privilégiera par exemple des vêlages de printemps. Pour la commercialisation des animaux ou pour faire du vêlage à 30 mois, on peut faire le choix d’une double période de vêlages groupés, choix déterminé par la disponibilité en main-d’œuvre sur l’exploitation si d’autres productions sont présentes... Chaque éleveur doit choisir sa ou ses périodes de vêlages en tenant compte de ses objectifs et des avantages et limites de chacune », souligne Bénilde Lomellet. Ensuite, on calcule la date de début de mise à la reproduction (jour J) en considérant la durée moyenne de gestation de la race des vaches. Au moins un mois avant le jour J, « il faut commencer à surveiller et à noter les dates de chaleurs. Ceci facilite la détection des chaleurs suivantes qui interviendront entre 18 et 23 jours plus tard. Le jour J, sont mises à la reproduction les génisses et les vaches ayant vêlé depuis plus de 45 jours. Noter à partir de ce moment-là les IA ou les saillies et les éventuels retours en chaleur peut aider ».

Mettre davantage de génisses à la reproduction au départ

À la fin de la période de reproduction (trois mois plus tard, pour un groupage sur une période de trois mois par exemple), on arrête les inséminations et/ou on retire le taureau pour les vaches. « Ceci donne à la vache en moyenne deux à trois possibilités pour être fécondée et vêler dans la période souhaitée. Pendant la période de transition, on doit mettre un maximum de génisses à la reproduction car ce sont les seules femelles pour lesquelles on peut décider de la date de vêlage. Le regroupement des vêlages impose de réformer systématiquement les vaches qui se décalent de la période choisie. Au bout de 100 jours d’intervalle vêlage-saillie fécondante, la vache doit être éliminée. Pour compenser ces réformes, le taux de renouvellement doit être majoré de 10 à 15 %. Grouper les vêlages favorise par ailleurs la sélection des vaches sur le critère de fertilité », poursuit Pascal Bisson

« Après la période de reproduction, un diagnostic de gestation s’effectue à 40 jours pour éliminer les animaux vides. La maîtrise de la phase reproduction reste la plus compliquée à gérer », ajoute Bernard Lafon. Les primipares sont à séparer des multipares pour satisfaire leurs besoins de croissance. « La période de reproduction nécessite également une alimentation soutenue. Côté génétique, le choix des reproducteurs (taureaux et vaches) sur la base de critères génétiques fiables (AVel et IFNAIS) doit permettre de minimiser le nombre de vêlages difficiles », souligne Pascal Bisson.

(1) Etude réalisée par les chambres d’agriculture des Pays de la Loire/Deux-Sèvres, le Campus des Sicaudières, Élevage conseil Loire Anjou et Ter’Elevage.(2) TraviBov est un outil de mise au point sur les pratiques d’élevage. Il permet de mesurer le temps de travail lié au troupeau en lien avec la conduite, l’organisation et les équipements utilisés.
Des intérêts zootechniques, sanitaires, économiques et d’organisation du travail
Mise en garde

« Certains éleveurs ont peur que la saisonnalité des ventes augmente si le groupage des vêlages devient une pratique commune. Mais groupage des vêlages ne veut pas dire groupage des périodes de vêlages », observe Pascal Bisson, de la chambre d’agriculture des Deux-Sèvres. En effet, entre le 1er août et le 31 mars, on compte sept périodes de vêlages de deux mois. Par ailleurs, les conduites très diverses des troupeaux allaitants français permettent également d’étaler les mises en marché.

 

Trois reportages en élevage à lire :

Deux périodes de vêlage rapidement mises en place

100 % des vêlages en deux mois

Des vêlages à plus de 80 % en décembre

 

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