Aller au contenu principal

Véronique Louazel, chargée d’études pour Solidarité Paysans
« Rompre le silence sur les difficultés des agriculteurs »

Une étude réalisée pour Solidarité Paysans pointe la somme de pressions que subissent les agriculteurs d’aujourd’hui. Rompre le silence et une aide pluridisciplinaire permettent de prévenir la souffrance psychique.

Véronique Louazel, est chargée d'études en santé publique. Solidarité Paysans est une association présente aujourd'hui sur toute la France. Elle accompagne et défend les agriculteurs et les familles qui lui font appel.
© Solidarité Paysans
Les pressions que subissent les agriculteurs ne sont-elles que financières ?
Véronique Louazel - L’importance de l’endettement est à l’origine de la demande d’aide à Solidarité Paysans dans les trois quarts des cas. Il y a vingt ans, il était plus facile pour les agriculteurs de faire changer l’exploitation de trajectoire si des difficultés se présentaient. Aujourd’hui, le montant des investissements engagés et les logiques de fonctionnement des filières agricoles ont réduit leurs marges de manœuvre.

Mais trois autres sources de pression sont aussi très importantes. Notre étude (1) a montré que la pression familiale est particulièrement forte pour les agriculteurs. Les conditions d’installation ne sont pas neutres bien souvent, avec un patrimoine à préserver, et il faut se montrer à la hauteur du savoir-faire familial. Les conditions de travail sont une autre source forte de pression. Enfin, « la loi du silence » en milieu rural et la rupture des liens sociaux à partir du moment où les agriculteurs sont en difficulté, les enferment dans leurs problèmes.

Pourtant, un grand nombre d’agriculteurs sont fragilisés, n’est-ce-pas ?
V. L. - Quand on a des difficultés, on a l’impression d’être seul dans cette situation. On pense que c’est de sa faute, que l’on n’a pas bien fait son travail. Mais à partir du moment où on commence à en parler, on s’aperçoit que nombreux sont les éleveurs que l’on connait qui vivent la même chose, et même certains que l’on pensait loin de cela. Quand on s’aperçoit que l’on n’est pas seul à souffrir, il est plus facile de demander de l’aide.

Il est parfois plus facile de demander de l’aide à un conseiller ou à un vétérinaire par exemple, qui n’est pas impacté directement par la situation de l’élevage, qu’à des proches. Il convient donc d’intensifier la collaboration et de développer les complémentarités possibles entre tous les acteurs pour construire collectivement entre bénévoles de Solidarité Paysans, responsables professionnels, services sociaux de la MSA, et experts divers, des réponses susceptibles d’améliorer le bien-être des agriculteurs et de leurs familles.
La réponse à ces situations de détresse sera d’autant moins lourde qu’elle interviendra le plus possible en amont. Prendre des nouvelles, s’inquiéter d’un changement, sont des interventions de prévention qui ont montré leur utilité. Les signes d’alerte à repérer sont l’irritabilité chez quelqu’un qui n’était pas spécialement irritable auparavant, les troubles du sommeil, la déclaration de problèmes de santé et la survenue d’un accident du travail. Les hommes, plus que les femmes, n’ont pas l’habitude de réagir à ces signes d’alerte et peuvent aller jusqu’au point de rupture. Ce n’est qu’alors qu’ils reconnaissent le surmenage.

Comment l’écoute permet-elle de sortir de l’engrenage des difficultés ?
V. L. - Les éleveurs en difficulté et leurs familles essaient seuls de s’en sortir, mais ils ont l’impression d’être dans un tunnel et de ne pas en voir le bout. Le fait de parler à une association d’aide ouvre le champ des possibles. Il y a toujours des solutions. Négocier avec la MSA pour des cotisations en retard, négocier avec la banque, étaler des dettes fournisseurs, augmenter son autonomie alimentaire, modifier ses pratiques en général et apaiser les tensions sur l’exploitation… L’objectif est d’arrêter l’engrenage. Quand cette étape est franchie, c’est un soulagement énorme. Il apparait alors d’autres voies d’évolution pour l’exploitation, qui n’étaient pas visibles auparavant. Le fait de faire ses propres choix de vie et de savoir où on va permet de se reconstruire.

(1) Étude qualitative de 2015 avec l’université de Lille, auprès de 27 agriculteurs qui avaient sollicité l’association en Basse-Normandie, Pas-de-Calais et Provence Alpes-Côte-d’Azur.

« Quand on sait que de nombreux agriculteurs souffrent, il est plus facile de demander de l’aide. »

Les plus lus

Camion d'abattoir mobile du Boeuf ethique
L’abattoir mobile du Bœuf éthique vendu aux enchères 152 000 euros

Plus d’un an après la liquidation du Bœuf Ethique, premier outil d’abattage mobile en France, son matériel a été mis en vente…

parage fonctionnel des pieds bovins
Boiteries : « Je me suis formé au parage fonctionnel »

Guillaume Sansoit, éleveur de charolaises dans la Nièvre, a suivi avec un de ses salariés une journée de formation sur le…

L’implantation de la cage est à raisonner pour qu’un homme seul puisse y amener ses bovins en sécurité.
Boiteries : choisir une cage de parage adaptée aux vaches allaitantes

La cage de parage devient un équipement incontournable pour les exploitations touchées par la dermatite digitale. Veillez à…

Les prix d'honneur ont été difficiles à départager au concours de Varennes-sur-Allier (Allier), tenu les 15, 16 et 17 mars en race charolaise. « Une série d'une vingtaine de génisses, aux conformation et qualité de viande hors-normes, s'est particulièrement démarquée. Le lot était très homogène, avec des volumes de carcasse qui dépassaient les 650 kg », rapporte Olivier Chaveroche, responsable au concours.
Bovins de boucherie : les concours de Pâques enregistrent de belles ventes

Après une édition 2023 en demi-teinte, les organisateurs des traditionnels concours de Pâques tirent un bilan plutôt positif…

jeunes bovins charolais boiteries morbihan bretagne
Boiteries : « Nous avons dû jouer sur plusieurs fronts pour lutter contre panaris, Mortellaro et fourbure »

Gwendal Marchand a résolu une bonne partie des problèmes de boiteries sur son exploitation grâce à un audit approfondi avec…

Assurance prairies : l’indice Airbus doit encore convaincre

Les interrogations sur la fiabilité de l’indice satellitaire d’Airbus qui mesure la pousse de l’herbe freinent le…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site bovins viande
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière bovins viande
Consultez les revues bovins viande au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière bovins viande