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Défense des systèmes herbagers
Rééquilibrons les aides en faveur des ruminants

Le contraste devient choquant entre les revenus des exploitations céréalières et les trésoreries tendues des fermes herbagères. Les éleveur insistent sur la nécessité de réorienter les aides du premier pilier.

Pour les systèmes herbagers, le défi est de persuader consommateurs,
politiques, citoyens et contribuables du bien-fondé d’une réforme de la PAC plus
équitable.
Pour les systèmes herbagers, le défi est de persuader consommateurs,
politiques, citoyens et contribuables du bien-fondé d’une réforme de la PAC plus
équitable.
© F. D’ALTEROCHE

"Les charrues sont dans les prairies. Il y a urgence ", tempêtait Jean-Pierre Fleury, éleveur bourguignon et vice-président de la Fédération nationale bovine à l’occasion d’une journée sur l’herbe organisée début juin à Paris, sous l’égide de la Confédération nationale de l’élevage (CNE). Une journée qui, une fois n’est pas coutume, rassemblait toutes les filières de ruminants (bovins lait, bovins viande, moutons et chèvres) autour d’une même table et que Pierre Chevalier, président de la CNE n’a pas hésité à qualifier de « journée historique ».

Traduit en termes météorologiques, Jean- Claude Guesdon, de l’Institut de l’élevage résume la situation conjoncturelle actuelle par « un bel anticyclone pour l’agriculture et une belle dépression pour l’élevage ». Une évidence tout d’abord. L’analyse de l’évolution du résultat courant avant impôts par Unité de travail agricole non salarié montre clairement une différence flagrante entre le revenu des éleveurs herbagers et celui des producteurs de grande culture. De plus, les premiers indicateurs pour l’année en cours laissent présager une amplification de ce phénomène.

L’ÉLEVAGE EST EN DANGER

« L’élevage est en danger. Le prix de la viande ne s’est pas effondré, mais actuellement les revenus sont tellement minables qu’ils découragent les éleveurs. » Conséquence logique de la conjoncture, après que le « trou de l’herbe » lié à la PAC de 1992 ait incité à retourner de nombreuses surfaces en herbe, celles actuellement en prairies s’apprêtent à vivre une nouvelle période difficile. Dans beaucoup d’exploitations, dès que la céréaliculture est encore agronomiquement possible, la charrue tend à nouveau à chasser les bovins et les ovins des surfaces en herbe. Et ceci d’autant plus que produire des céréales est à la fois moins astreignant et sans comparaison possible avec les productions animales sur le volet du temps de travail. « Il y a comme une prime à la charrue qui est accordée par le marché lui-même », ironise Jean-Claude Guesdon. Mais plus le prix des céréales s’envole, plus il entraîne avec lui, celui de l’aliment du bétail, renchérissant toujours plus les coûts de production des éleveurs. Un phénomène qui pour cet automne pourrait faire réfléchir bien des engraisseurs qu’ils soient français ou italiens. « Quant à la fin du mois d’août, des engraisseurs de la vallée du Pô vont avoir le choix entre ensiler leur maïs ou le vendre en grain autour de 200€ la tonne, certains vont certainement s’interroger pour savoir si cela vaut vraiment la peine de prendre des risques en allant acheter des broutards en France ! », s’interroge Jean-Claude Guesdon.

Autant de données qui dans le contexte actuel suscitent bien des inquiétudes sur la pérennité des quantités de viande et de lait qui à l’avenir seront produits par les systèmes de production herbagers français et européens. L’Union européenne est déjà déficitaire en viande bovine et ovine alors même qu’elle a à sa porte 500 millions de consommateurs qui disposent dans l’ensemble d’un pouvoir d’achat encore confortable. Faut-il dans ces conditions agraver encore un peu plus le déficit ?

PERMETTRE À L’ÉLEVAGE HERBAGER DE RETROUVER SA LÉGITIMITÉ

Pour les défenseurs des prairies, la révision de la PAC à l’automne sous présidence française doit absolument être l’occasion de lui redonner du sens et de la légitimité. Il s’agit de permettre à l’élevage herbager de retrouver de la compétitivité par l’instauration d’un soutien spécifique aux prairies. C’est du moins la volonté exprimée par les différents responsables professionnels composant la CNE. Une réflexion encore appuyée quelques jours plus tard à Clermont- Ferrand, par une journée de mobilisation en faveur de l’élevage herbager qui a réunie quelques 600 éleveurs du grand bassin allaitant sous l’égide du syndicalisme majoritaire. « Si l’on s’entête dans des répartitions injustes des soutiens publics, il sera difficile après 2013 de les justifier », a ce jour-là précisé Daniel Prieur, producteur laitier en Franchecomté et responsable du groupe montagne et zones défavorisées à la FNSEA. Le redéploiement d’une partie des soutiens du premier pilier de la PAC en tenant compte des actifs pour permettre une plus grande équité entre les systèmes de production et les territoires pour la répartition de ces soutiens est donc une priorité pour les éleveurs herbagers.

BESOIN D’UN RÉÉQUILIBRAGE

« Lorsqu’en 1992, la réforme de la PAC avait mis 5 milliards d’euros sur les productions végétales et 3,5 milliards aux productions animales, la répartition n’était pas forcément très équitable, mais cette réforme avait une cohérence dans la mesure où elle avait permis au secteur de l’élevage d’avoir des céréales à 100 € la tonne. Mais quand on en arrive à une situation où la répartition des aides est toujours la même, mais où la céréale est passée à 200 voire 250 € la tonne, et que nous, éleveurs devons payer la note, alors là ça ne peut plus durer ! », s’irrite Patrick Benezit, éleveur allaitant dans le Cantal. Et ce dernier de réitérer la demande déjà formulée lors du dernier congrès de la Fédération nationale bovine pour la mise en place d’une aide de 300€/ha de surface fourragère. Des revendications encore appuyées par Pierre Chevalier, président de la FNB.

« On a besoin d’un rééquilibrage. Notre demande de 300 €/ha de surface fourragère est basée sur des simulations économiques qui ne sont pas contestables. Quand pour 11 millions d’hectares de prairie, on demande 300 €/ha en prenant sur l’enveloppe des 5 millliards d’euros qui vont actuellement aux productions végétales, on ne fait que du rééquilibrage des soutiens. Si demain on veut garder de l’herbe qui fixe le carbone dans un intérêt environnemental et des animaux qui broutent cette herbe. Si on veut garder une politique d’aménagement du territoire, il faut permettre le maintien des éleveurs dans les régions herbagères. » ■

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