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Miser sur les vaccins pour réduire la facture d’antibiotique

Une large couverture vaccinale pour optimiser la productivité numérique et réduire les frais vétérinaires liés aux pathologies respiratoires. Telle est la stratégie choisie par Olivier Maroiller, éleveur en Côte-d’Or.

À Pothières, dans le nord de la Côte-d’Or, la conduite du troupeau charolais d’Olivier Maroiller est en grande partie calée sur le calendrier des façons culturales de ses quelque 200 hectares de culture. Avec un assolement qui repose sur le colza et les céréales à paille, la volonté est d’avoir pour les soixante vaches le plus possible de vêlages à compter de fin octobre quand la plupart des semis sont terminés. Cela permet d’avoir suffisamment de temps pour bien les surveiller. « J’ai une cinquantaine de naissances entre fin octobre et fin décembre puis une petite quinzaine en début d’année », précise Olivier Maroiller. La productivité numérique est satisfaisante. « L’un dans l’autre, les vêlages gémellaires compensent les pertes de veaux naissants. Pour la campagne 2016-2017, quatre veaux sont morts (écrasés, malformés, jumeau chétif…) pour trois paires de jumeaux. » Ce choix de date de mises bas est ensuite bien en phase avec la cinétique de la pousse de l’herbe. Les veaux sont suffisamment âgés pour la valoriser au printemps et bénéficient simultanément de la légère reprise de lactation de leur mère liée à ce changement de régime. La plupart des mâles atteignent le poids objectif de vente de 400 kilos en cours d’été, quand la sécheresse estivale – précoce et intense cette année – transforme les prairies en paillasson.

Le préventif plus que le curatif

Depuis plusieurs années, la volonté est de miser sur le préventif pour lutter contre les pathologies susceptibles de nuire à la productivité numérique et pondérale. Cela passe d’abord par des animaux bien nourris, bien logés, bien minéralisés. Sur l’exploitation, l’essentiel des stocks est composé de foin. « Je fais un peu d’ensilage de maïs pour finir les réformes et un peu d’enrubannage, prioritairement réservé aux primipares. J’essaye de bien les nourrir, mais 2017 est un mauvais exemple compte tenu de la piètre qualité des fourrages récoltés l’an dernier. »

Sur le volet sanitaire, une grande prudence est de mise pour les rares animaux achetés à l’extérieur en se bordant avec des analyses afin de ne pas prendre le risque d’acheter par la même occasion des pathologies. « Pour cette même raison, je redoute les visiteurs en période de vêlage par crainte qu’ils introduisent des pathologies extérieures avec des chaussures sales. J’ai toujours à leur disposition quatre paires de bottes de différentes pointures », souligne Olivier Maroiller. « Il est important de bien insister sur ces fondamentaux. Cela fait partie du b.a.-ba de la prévention que de minimiser tout risque d’introduction de pathogène », ajoute Christophe Bertrand, vétérinaire de longue date de l’exploitation, avec lequel s’est installée une bonne complicité. « Quand ces équilibres sont rompus, tout s’enchaîne. Les animaux sont plus fragiles et sensibles. » Côté bâtiment, ce dernier présente des conditions d’ambiance satisfaisantes. C’est une grande stabulation tout en longueur (110 m) construite sur le haut d’une colline.

Bonne couverture vaccinale

L’importance accordée à la prévention démarre par le suivi des mères dans les semaines précédant le vêlage. Tous les broutards de la campagne précédente sont sevrés au moins trois mois avant le vêlage suivant, soit courant septembre pour les vaches les plus tardives.

Les vaches sont allotées selon la date de fécondation et le verdict du diagnostic de gestation réalisé 35 jours après l’IA ou la saillie est confirmée au moment du sevrage par un renouvellement de ce travail pour quelques rares femelles douteuses. Celles dont la gestation est la plus avancée sont rentrées début octobre, une bonne quinzaine de jours avant leur terme. Elles sont alors vaccinées de façon à optimiser la qualité de leur futur colostrum. « Je procède par lots de vingt compte tenu du nombre de doses dans un flacon », précise l'éleveur. Tous les veaux naissent en bâtiment pour faciliter une éventuelle intervention et s’assurer qu’ils ingèrent le colostrum au plus tard trois heures après vêlage en allant traire les mères s’ils ne sont pas debout suffisamment tôt pour aller téter seuls. « J’ai toujours trois à quatre litres de colostrum au congélateur « au cas où ». » Il est évidemment issu des seules vaches de l’exploitation pour éviter toute contamination croisée. « Christophe a toujours un réfractomètre dans la voiture pour connaître le taux d’anticorps. À l’occasion, il contrôle sa qualité lors de ses passages sur l’exploitation. »

Les vaches suitées ne sont pas remises à l’herbe. Elles sont allotées de façon à ne pas avoir plus de trois semaines d’écart entre le veau le plus âgé et le plus jeune au sein d’une même case. Pour faciliter les choses, les veaux issus des dernières mises bas – forcément plus étalées – sont par cases de dix vaches suitées. Affourragées avec du foin à raison de dix kilos par tête – partiellement substitué par de l’enrubannage pour les primipares – elles ont en permanence accès à un râtelier garni de belle paille. Elles ne sont complémentées en céréales et tourteaux qu’un mois après vêlage car la sélection très axée sur le lait fait que certaines sont presque « trop » laitières si elles sont complémentées trop tôt.

La couverture vaccinale des veaux couvre les principales pathologies classiquement rencontrées. Dans les jours qui suivent le vêlage, ils bénéficient d’un vaccin intranasal de façon à prévenir l’apparition de pathologies respiratoires dans les premières semaines. À signaler que pour être bien certain de pouvoir vérifier en permanence de quelle vache est issu tel ou tel veau, Olivier marque « à l’ancienne » vaches et veaux en coupant avec des ciseaux les poils sur le haut de la cuisse de façon à apposer pour chaque couple un même numéro correspondant à l’ordre de naissance. Toutes les vaches et génisses sont vaccinées contre le BVD en décembre, un mois avant la mise à la reproduction.

Pour les veaux, après l’intranasal, un vaccin injectable prend le relais deux mois plus tard. « En pathologies respiratoires, les évolutions peuvent être très rapides. Quand on prend la température sur un veau dont le comportement fait suspecter qu’il n’est pas au mieux de sa forme, on a déjà pris du retard dans le traitement, d’où l’intérêt de faire du préventif avec une bonne protection vaccinale », précise Christophe Bertrand. Suit l’incontournable vaccin FCO pour pouvoir les vendre pour l’export avant de terminer cette série de vaccins avec celui contre l’entérotoxémie juste avant leur mise à l’herbe.

Lors de leur première rentrée en stabulation, les broutardes, les quelques mâles conservés sur l’exploitation en vue d’une vente pour la reproduction et les tardifs n’ayant pas atteint le jour du sevrage le poids objectif de vente sont à nouveau vaccinés pour prévenir pathologies respiratoires et entérotoxémies.

« Je le fais systématiquement dans la mesure où l’année où j’ai fait l’impasse j’en ai perdu une, souligne Olivier Maroiller. Je préfère investir dans les vaccins plutôt que prendre le risque de voir émerger des pathologies que j’aurai pu éviter. À côté des pertes sèches liées aux animaux qui partent à l’équarrissage, il y a aussi celles – difficilement chiffrables – liées aux pertes de GMQ sur les animaux malades. De toute façon, je déteste prendre des risques dans la mesure où justement ces risques peuvent être évités. »

Côté éco

Privilégier la prévention

Le total des frais vétérinaires pour la campagne 2016-2017 s’élève à 2 530 € pour les vaccins (FCO non compris), répartis de la manière suivante : entéro 250 € ; grippe 1 125 € ; BVD 525 € ; diarrhée 630 €.

Il convient d’y ajouter : antiparasitaires 870 € ; antibiotiques 320 € ; obstétrique 730 €.

Les frais vétérinaires 2016-2017 (du 1er juillet au 30 juin) peuvent sembler conséquents pour un cheptel de 60 vaches où les mâles ne sont pas finis. Cette somme doit être mise en parallèle avec une faible mortalité, laquelle ne fait pas suite à des diarrhées ou pathologies respiratoires.

À souligner également le faible recours aux antibiotiques pour l’ensemble du cheptel au cours de la dernière campagne, essentiellement lié à de l’obstétrique et à des gros nombrils.

30 à 35 % de renouvellement

Le taux de renouvellement oscille entre 30 et 35 % selon les années et permet de réformer sans hésitation. La sélection très orientée sur les aptitudes laitières a eu, selon Olivier Maroiller, un impact sur les performances de reproduction. « Sur mon troupeau, les vaches qui extériorisent les meilleures aptitudes laitières tendent à être moins fertiles ou tout du moins à avoir des chaleurs plus discrètes. » Il y a encore quelques années l’élevage était en 100 % IA. Des difficultés pour détecter les chaleurs sur les primipares se sont traduites par un mauvais IVV entre le premier et le second vêlage. Pour leur deuxième veau, les vaches se décalaient, avec des vêlages tardifs qui compliquaient la gestion des travaux de l’atelier culture. « J’ai opté pour un taureau, essentiellement utilisé dans la case des vaches au premier veau avec depuis une amélioration des résultats pour l’IVV moyen du troupeau », conclut l'éleveur.

Avis d’expert

Stéphanie Bernheim, responsable vétérinaire, laboratoire Zoetis

" Parmi les premiers participants à la Farmer Academy »

« Le binôme Olivier Maroiller et Christophe Bertrand a participé en 2015 à la première édition de la Farmer Academy, jeu éducatif télévisé visible sur une web TV (http://www.farmeracademy.fr). Un bon souvenir dans lequel le binôme affrontait dans la bonne humeur trois autres binômes éleveur + vétérinaire sur les différentes façons de prévenir les pathologies respiratoires chez les ruminants, et où ils avaient terminé seconds. Olivier avait particulièrement bien développé sa conception de la prévention dans le dernier épisode face au jury. Les épisodes des deux premières saisons sont toujours en ligne sur le site."

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