Luzerne, fétuque élevée, ray-grass hybride : quelle valorisation de l’eau d’irrigation ?
Arvalis a étudié, sur des microparcelles expérimentales et en ferme, l’impact de l’irrigation sur des espèces fourragères prairiales. Les résultats sur trois ans montrent une amélioration du rendement sans perte de valeur alimentaire.
Arvalis a étudié, sur des microparcelles expérimentales et en ferme, l’impact de l’irrigation sur des espèces fourragères prairiales. Les résultats sur trois ans montrent une amélioration du rendement sans perte de valeur alimentaire.



Les références sur l’irrigation des prairies et luzernières étant obsolètes, Arvalis a mené de 2022 à 2024 le projet Prair’Irr. Dans un objectif du maintien de la production de fourrages, il visait à mesurer quantitativement et qualitativement la réponse à l’eau d’irrigation de trois espèces de fauche : la luzerne, la fétuque élevée et le RGH. « L’efficience de l’eau était définie par le gain de biomasse apporté par l’irrigation, c’est-à-dire la différence de rendement entre un système irrigué et un système en sec, ramené à la quantité d’eau d’irrigation apportée en mm », présente Pierre Larsonneau d’Arvalis.
40 à 50 euros par tMS/ha supplémentaire
La réponse moyenne à l’irrigation a été dans ces essais du même ordre de grandeur pour les trois espèces. Elle est de 23,5 kg MS/mm/ha pour la luzerne, 20,6 kg MS/ha/mm pour la fétuque élevée, et 18,1 kgMS/ha/mm pour le ray-grass hybride. « Avec un prix de l’eau d’irrigation de 1 €/mm main-d’œuvre comprise, le coût d’une tonne de rendement supplémentaire revient à 42,5 euros pour la luzerne, 48,5 euros pour la fétuque élevée et 55,2 euros pour le ray-grass hybride », calcule Pierre Larsonneau.
Lire aussi : Élevage bovins viande : «Nous allégeons l'empreinte carbone avec plus de luzerne et un séchoir»
De très fortes hétérogénéités ont été mesurées entre le type de fourrage, les coupes, les parcelles et les années. L’efficience de l’eau a pu varier de 10 à 50 kg MS/ha/mm. « Plus l’année est sèche, plus l’efficience de l’eau d’irrigation a tendance à être élevée », note Pierre Larsonneau.
Sur la valeur alimentaire en revanche, les résultats ont été assez redondants. L’effet de l’irrigation sur les teneurs en MAT et en UFL par kg MS était faible. Une baisse de 0 à 5 % maximum – rarement significative – a été mesurée sur les fourrages irrigués par rapport à ceux en régime pluvial.
Perte de pieds de la luzernière
Sur la luzerne, un effet important de l’irrigation a été constaté à l’issue des trois ans d’essai. « Entre la modalité « très bien irriguée » (130 % de l’ETM(1)) et la modalité « régime pluvial, le nombre de tiges et pivots s’est réduit de 20 à 30 % », signale Audrey Tabone d’Arvalis. « La luzerne s’est-elle épuisée en produisant plus ? Il faudrait poursuivre l’expérimentation pour valider cette hypothèse. » Il a été aussi mesuré qu’après une année en « très bonne irrigation », le rendement de la première coupe de l’année suivante est impacté à la baisse.
Lire aussi : « Notre système naisseur-engraisseur de limousines est totalement autonome en protéines »
Concernant la fétuque élevée, les essais montrent une réponse à l’irrigation proche de celle de la luzerne en moyenne. La baisse de la teneur en MAT par kg MS a atteint 8 % sur certaines coupes en modalité « très bien irriguée » pour cette espèce, mais même dans ce cas, la quantité totale de protéines produites à l’hectare restait supérieure à celle d’une culture non irriguée.
« Sur le ray-grass hybride, des problèmes récurrents ont été rencontrés. Le niveau de production est très élevé sur la première coupe irriguée, et baisse très fortement dès la coupe suivante. Le RGH a dû être ressemé chaque année dans cet essai », explique Pierre Larsonneau.
Des microparcelles expérimentales et des mesures en ferme
Les mesures ont été réalisées sur des microparcelles en stations expérimentales d’Arvalis dans le Rhône, en Charente-Maritime et en Loire-Atlantique. Quatre régimes hydriques ont été comparés. Un régime « bien irrigué », à l’ETM avec pilotage par sondes tensiométriques, servait de témoin. Y étaient comparés, un régime irrigué à 130 % de l’ETM dit « très bien irrigué », un régime « stressé » correspondant à 50 % de l’ETM, et un régime non irrigué dit « pluvial », la microparcelle recevant seulement les précipitations.
Cinq essais en bandes sur luzerne chez des agriculteurs en région Auvergne-Rhône-Alpes ont complété le dispositif avec un régime « bien irrigué », un régime non irrigué, et un régime « stressé ».
Ces essais du projet Prair’Irr ont été financés par la Région Aura et la CNR et conduits avec CA69, 01, 07, 63, Rhône Conseil élevage, Loire Conseil élevage, Adice.