La lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse engendre des difficultés dans les élevages bovin
Interdiction d'épandage, veaux bloqués dans les élevages ... commencent à peser lourd dans les élevages bovin de la zone réglementée de lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse. Des questions restent encore en suspens notamment sur la gestion des effluents.
Interdiction d'épandage, veaux bloqués dans les élevages ... commencent à peser lourd dans les élevages bovin de la zone réglementée de lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse. Des questions restent encore en suspens notamment sur la gestion des effluents.

- Des veaux qui s'accumulent dans les exploitations
- Pots trayeurs et barrières de contention envoyés d'autres départements
- Des ventes et accueils à la ferme fermés
- Des épandages interdits : est-ce un moyen de lutte efficace ?
- Inséminations et autres services suspendus
- Forte solidarité pour vacciner rapidement
« Les mouvements d'animaux de la zone réglementée sont interdits, sauf dérogation, ce qui veut dire, par exemple, que les veaux qui devaient partir à deux ou trois semaines sont toujours dans les exploitations. Chez moi, les plus âgés ont huit semaines. Nous leur donnons du lait ; c'est autant de lait qui n'est pas vendu, à une époque de l'année où le prix du lait est élevé », décrit Cédric Laboret, éleveur et président de la chambre d'agriculture Savoie Mont blanc, pour brosser les difficultés concrètes que vivent les éleveurs de la zone réglementée dans le cadre de la lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).
Des veaux qui s'accumulent dans les exploitations
Et ensuite ? « Il faudra bien les laisser partir à un moment, car la plupart des élevages comme le mien n'ont ni la place ni de quoi engraisser des animaux. »
Pour rappel, la zone réglementée, qui s'étend jusqu'à 50 km autour des foyers déclarés, applique un plan de lutte draconien pour faire disparaître cette maladie classée « à éradication immédiate » par l'Union européenne. La France a choisi d'agir vite et fort avec trois grands leviers : abattage des lots d'animaux ayant été en contact avec au moins un bovin positif à la DNC (cette mesure d'abattage est aussi appelée dépeuplement) ; blocage des mouvements d'animaux à partir ou à destination de la zone réglementée, y compris en interne à cette zone ; vaccination. Il est également interdit d'épandre les lisiers et fumiers de bovins de la zone. Des règles de biosécurité (désinsectisation, désinfection, changement de vêtement ...) doivent être appliquées.
Pots trayeurs et barrières de contention envoyés d'autres départements
Les vaches au pâturage sont également bloquées dans les prairies et alpages. « Quand il n'y a plus d'herbe, il faut affourager. Mais il y a des parcelles qui ne sont pas accessibles en tracteur. Il faut pouvoir obtenir des dérogations pour déplacer les animaux de ces parcelles. » Des dérogations sont prévues par les DDPP qui fournissent les formulaires de demande afin de pouvoir déplacer des animaux nécessitant des soins.
Quand une vache vêle, il faut venir la traire avec un pot trayeur. « Comme nous manquions de matériel, la solidarité s'est organisée et des éleveurs de zones indemnes et de départements voisins nous ont envoyé des pots trayeurs », relate Cédric Laboret. Pour vacciner au pâturage, des barrières de contention ont été envoyées par le réseau des Cuma notamment.
Des ventes et accueils à la ferme fermés
Les éleveurs en transformation et vente directe ont subi des pertes économiques quand il y a eu l'interdiction d'utilisation du lait cru et de vente des fromages. « Cette interdiction a été levée le 2 juillet étant donné qu'il n'y a pas de risque sanitaire lié à la manipulation et la consommation du lait cru. Mais certains éleveurs ont arrêté la vente et l'accueil à la ferme par précaution, pour éviter de transporter les insectes (stomoxes et taons) et le virus », indique le président de la Chambre.
Des épandages interdits : est-ce un moyen de lutte efficace ?
Il est interdit d'épandre du lisier ou du fumier de zone réglementée. Sauf si le fumier a été mis en tas, loin du bâtiment et des animaux, s'il a été aspergé de désinfectant et laissé exposé à sa propre chaleur (couvert ou retourné), au repos durant au moins 42 jours.
Pour le lisier, il est possible de l'épandre à condition de l'enfouir lors de l'épandage. Ou si l'effluent est traité à la chaux. « Mais les quantités nécessaires sont très élevées, ce qui rend cette solution infaisable. » Ou encore si l'effluent est traité grâce à la chaleur de la méthanisation. « Mais il faut une température supérieure à 70°C pour assainir le lisier, or dans le digesteur, la température ne monte pas si haut », indique Cédric Laboret.
Pour éviter que les fosses ne débordent, pour l'instant, « on peut passer le lisier au séparateur de phase et stocker la phase solide sous bâche comme pour le fumier ». Mais ce n'est pas une solution durable. Il y a urgence, et les éleveurs attendent une réponse de l'Anses. « Nous demandons à l'Anses s'il y a réellement un risque sanitaire à épandre nos lisiers et fumiers. Si interdire l'épandage n'est pas utile pour lutter contre la maladie, l'interdiction pourra être levée. »
Inséminations et autres services suspendus
Pour éviter la diffusion des insectes et du virus, « beaucoup d'éleveurs ont arrêté de faire venir des personnes de l'extérieur sur leur ferme. En plus, au début, il était interdit de procéder aux inséminations artificielles. Heureusement, aujourd'hui, une dérogation permet de réaliser les IA. Et grâce à une bonne avancée de la vaccination, les éleveurs commencent à faire revenir les techniciens d'élevage à partir de 2 - 3 semaines après la vaccination. » Pour rappel, le vaccin offre à l'animal un début d'immunité 10 jours après l'injection, totale à 3 semaines.
Forte solidarité pour vacciner rapidement
Vacciner tous les animaux concernés - environ 284 000 bovins sur la zone réglementée - permettra de desserrer l'étau de ces mesures très contraignantes. Pour l'heure, les mouvements d'animaux resteraient bloqués encore jusqu'à 45 jours après l'extinction du dernier foyer DNC. Mais la profession travaille pour trouver des solutions qui répondent aux difficultés en élevage tout en ne mettant pas en péril l'objectif sanitaire.
En ce 4 août, la vaccination aurait très bien progressé, selon Cédric Laboret. « D'après mes informations, tous les animaux de la zone de protection - 20 km autour des foyers - auraient reçu une injection. Et au moins 80% des animaux de la zone réglementée (zone de protection + zone de surveillance de 50 km autour des foyers) seraient vaccinés. Les réseau des Cuma, chambres d'agriculture et FDSEA ont fait appel à la solidarité pour récupérer des couloirs de contention, pour pouvoir vacciner au pâturage. Jeunes agriculteurs ont trouvé des volontaires pour aider. Des vétérinaires, actifs d'autres zones, retraités, étudiants sont venus prêter main-forte. »