Dans les DOM-TOM
La démarche qualité pour développer la production locale
Guyane, Guadeloupe, Martinique et Mayotte se sont réunis au Sommet de l’élevage pour exposer les caractéristiques de leur élevage bovin. S’ils prônent son développement, c’est finalement via des marchés de niche qu’ils arriveront à le rentabiliser.
«Enjeux et atouts de l’élevage de l’Outre-mer français dans le contexte de globalisation et de crise alimentaire », tel était le thème abordé à l’occasion d’un colloque organisé par les Dom-Tom lors du Sommet de l’élevage. « Nous avons des caractéristiques communes quel que soit les territoires - insularité, petitesse du territoire sauf pour la Guyane, éloignement de la métropole - qui peuvent être un frein au développement de notre élevage », commence Firmin Lodin de l’interprofession guadeloupéenne de la viande et de l’élevage.
RAISONNER EN TERME DE SYSTÈME DE PRODUCTION
Pour tous les intervenants, l’élevage constitue un potentiel de développement pour ces régions. Il participe à la sécurité alimentaire, à l’aménagement du territoire, à la protection de l’environnement et à la préservation de la biodiversité, particulièrement riche dans ces zones. La création d’emplois, le maintien d’activités en milieu rural, l’entretien des paysages ou la protection du milieu sont des enjeux tout aussi valables en Outremer qu’en métropole pour promouvoir l’élevage bovin. « Produire localement évite les importations et les surcoûts qui leurs sont liés. Cela permet aussi de mettre en valeur nos races bovines locales et notre savoir-faire », explique Stéphanie Jock de l’Unité de sélection bovin créole (Antilles). Pour développer l’élevage, « il faut changer de conception, sortir de l’approche filière et raisonner en terme de système de production. Le cheptel ne doit pas être pris seul, mais intégré aux autres productions de l’exploitation. Il n’existe donc pas un système de production type. Il doit s’adapter à chaque situation ». Et les situations sont nombreuses, de l’élevage extensif en Guyane à l’élevage au piquet à Mayotte ou à la Guadeloupe. Au-delà de l’aspect production, l’élevage bovin d’Outre-mer doit trouver son marché. « Nous devons arriver à une démarche de qualité pour mettre en valeur la production et les ressources locales et arriver sur des marchés auquels nous n’aurions pas accès autrement. Il faut aussi encourager l’innovation en matière de valorisation des ressources locales. C’est par la valeur ajoutée de nos produits que nous tirerons un revenu de notre production ». Il est évident que par rapport à la banane ou à la canne à sucre, la viande bovine doit se battre pour se faire une place, surtout quand le foncier devient difficile d’accès, pris d’assaut par le développement de l’immobilier, les cultures de rentes ou le maraîchage.
METTRE EN PLACE UNE POLITIQUE FONCIÈRE
Entre 1989 et 2005, un quart de la superficie agricole de la Guadeloupe a diparu. À la Martinique, le foncier disponible pour l’agriculture a baissé de 30 %, entre 1989 et 2006. « Il faut mettre en place une politique de protection du foncier, avec par exemple des instruments juridiques et la reprise des installations » Que faire aussi des viandes importées à très bas prix ? « À la Martinique, on ne peut pas suivre ce type de marché. Nous sommes bloqués entre les importations du Brésil et celles de l’Argentine. Il nous faut développer un autre type de production », constate Serge Numeric de l’Observatoire des filères viandes et lait de la Martinique. « À la Guadeloupe, ce sont les viandes de métropole qui bloquent nos marchés », rappelle Firmin Lodin. Si Marc Jousset de l’Odeadom parle d’autosubsistance en viande des pays d’Outremer, il est probalement plutôt juste de parler de marché de niche. Comme pour la production de viande en métropole, la conclusion reste la même, selon Nadiège Carel-Longlade de l’Observatoire des filères viande et lait de la Martinique : « Il faut permettre au consommateur de faire son choix : acheter de la viande importée ou de la viande produite dans le pays. De toute façon, nous ne pouvons rentrer en concurrence directe avec les importations. »
DES SITUATIONS TRÈS DIFFÉRENTES
Au-delà des chiffres, des connaissances plus approfondies concernant les migrations clandestines, le coût de la maind’oeuvre, le taux de chomage, la pluri-activité ou encore la distance entre production et abattoirs, l’outillage, les impacts de la législation européenne… aurait été les bienvenues pour éclairer de façon plus pertinentes les données fournies. Si les Dom-Tom se sont bien rassemblés pour la conférence, ils reconnaissent que la situation reste cependant très différente d’un territoire à l’autre.