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Transmission d'exploitation
Assumer le poids du capital engagé

La faible rentabilité et l’importance du capital engagé sont les deux principales caractéristiques de l’installation en production de viande bovine. S'il ne semble pas exister de solution miracle, quelques éléments de réflexion peuvent aider.

Les capitaux nécessaires à la reprise d’une exploitation viande bovine ont fortement augmenté depuis environ cinq ans. Ceci s’explique par la taille des structures reprises et l’impact de la mise aux normes des bâtiments d’élevage.
Les capitaux nécessaires à la reprise d’une exploitation viande bovine ont fortement augmenté depuis environ cinq ans. Ceci s’explique par la taille des structures reprises et l’impact de la mise aux normes des bâtiments d’élevage.
© S. LEITENBERGER

La transmission des exploitations « viande bovine » a toujours été difficile, mais elle devient encore plus rude. « Les exploitations sont plus grandes et nécessitent des capitaux de plus en plus importants » , note Alain Denieulle, président de la Commission professionnelle recherche appliquée des Pays de la Loire. « L’installation moyenne dans la Nièvre est passée de 150 000 euros en 2003 à 250000 euros depuis 2005 », commente de son côté Bertrand Jamet du Crédit agricole Centre Loire. Cette progression s’explique par la taille des structures reprises et l’impact de la mise aux normes des bâtiments d’élevage. Le contexte actuel dans l’élevage bovin, avec la fièvre catarrhale et le niveau des cours de la viande, n’est vraiment pas favorable. « Certains jeunes s’interrogent sur le décalage de leur installation en fin d’année. »

Au-delà de ce contexte, la difficulté spécifique au secteur viande bovine pour la transmission des exploitations est liée à la vitesse de rotation du capital, c’est-à-dire le nombre d’années nécessaires à l’exploitation pour revenir sur ce capital. « Il est d’environ huit ans pour l’élevage de vaches allaitantes, en système naisseur extensif ou naisseur engraisseur semiintensif, alors qu’il est de cinq ans pour la production de lait ou pour l’engraissement de jeunes bovins » , explique une étude des réseaux d’élevages et de la Draf des Pays de la Loire. Le cheptel représente 45 à 60 % de l’actif. « Même si cet actif est quasiment toujours réalisable, il nécessite des capitaux propres importants. » S’entendre sur la valeur des biens et en particulier sur celle du cheptel a toujours été ardu, et depuis la mise en place des DPU en 2006, cela ne s’est pas simplifié. L’étude des réseaux d’élevage et de la Draf des Pays de la Loire a permis de donner quelques points de repères sur la valeur économique (niveau d’actif de reprise par vache allaitante) qu’il faudrait ne pas dépasser, en fonction des apports personnels du jeune et du niveau de revenu disponible ou de trésorerie fixé comme objectif. "Pour un système naisseur-engraisseur, il ne faudrait pas dépasser 3200 à 3700 euros par vache allaitante reprise » , d’après cette simulation. (voir notre article sur cette étude dans le numéro de décembre 2007 p. 38).

Le principal frein dans le secteur viande bovine demeure bel et bien de trouver les capitaux nécessaires. « La dimension foncière et la réglementation économique en production de viande bovine, avec les droits PMTVA, n’est pas favorable à l’entrée de capitaux extérieurs » , estime Eric Mastorchio de Gaec et sociétés, « alors que l’utilisation d’une holding est à l’inverse envisageable pour la production de porcs ou de volailles. »

UN ALLONGEMENT DE LA DURÉE DES FINANCEMENTS

Le croît interne est un moyen avantageux d’autofinancer la capitalisation du cheptel, que l’on dispose des aides PMTVA objectif dès le début ou bien qu’on les obtiennent au fur et à mesure de l’augmentation du nombre de mères. Un prêt complémentaire s’avère de toutes façons nécessaire en fin de troisième année. A l’inverse, l’achat de toutes les vaches dès l’installation nécessite de pouvoir mobiliser un financement complet dès le départ, mais alors le troupeau est tout de suite en pleine production. A l’éleveur aussi de voir s’il prend les risques inhérents aux achats d’animaux. Selon l’étude des Pays de la Loire, ces deux options aboutissent après remboursement des emprunts à un revenu disponible équivalent. La loi d’orientation agricole ouvre depuis 2006, la possibilité d’étaler sur dix ans le paiement d’une reprise par un jeune installé, assortie d’une réduction d’impôt incitatrice pour le cédant. Ces crédits transmission sont encore très peu répandus ; probablement car ils représentent un risque aux yeux des cédants. « Dans certains cas, le cédant peut consentir au repreneur un crédit vendeur en complément des prêts bancaires. Ce type de prêt peut être soumis à des conditions de durée et de remboursement: reprise par un prêt bancaire après une ou deux années d’exercice, quand les premiers résultats de l’installation du jeune agriculteur le permettent » , explique Bertrand Jamet du Crédit agricole Centre Loire. « Plus rare, le bail à cheptel commence à apparaître pour faciliter la reprise. Attention, cela pose la question de la durée du bail et des modalités de reprise du cheptel. » Tôt ou tard, la reprise du capital laissé par le cédant dans l’affaire va devoir être financée. Quoi qu’il en soit, l’allongement de la durée des prêts est vouée à devenir plus courante. « Nous constatons un allongement de la durée des financements : d’une durée moyenne de douze à quinze ans, il y a cinq ans, les prêts d’installation passent à quinze, vingt ans, du fait de l’augmentation des reprises, voire vingt-cinq ans dans certains cas sur le foncier », explique Bertrand Jamet du Crédit agricole Centre Loire. « C’est une nécessité pour assurer la faisabilité de l’installation et préserver une marge de sécurité suffisante pour se développer. C’est important d’avoir cette approche le plus tôt possible pour sécuriser le projet et la trésorerie. » Les propositions de financement sont adaptées en intégrant des différés d’amortissement, des prêts à paliers et des remboursements modulables pour coller à chaque exploitation et chaque activité. « Ce type de durée peut être mal perçu car bloquant les possibilités d’investissement sur une très longue période. Il peut par contre permettre d’améliorer les possibilités de prélèvement sur les premières années » , selon l’étude des réseaux d’élevage et de la Draf des Pays de la Loire.

LE PROGRÈS TECHNIQUE POUR AMÉLIORER LA RENTABILITÉ DES CAPITAUX

Car il semble que finalement, une grande partie des candidats à l’installation trouvent des solutions de financement. Mais les prélèvements privés constituent souvent la variable d’ajustement chez les jeunes installés. « Mais est-il normal de bâtir le plan d’installation sur l’hypothèse de faibles prélèvements? », remarque Richard Baber du Crédit Mutuel du Limousin. Cela peut permettre effectivement de passer une année difficile, mais ne doit pas occulter la nécessité de dégager un revenu correct pour l’exploitant. « Nous rencontrons très peu de projets de diversification pour améliorer le revenu et valoriser la main-d’oeuvre ; les quelques cas sont le prolongement « naturel » de l’activité en cohérence avec ses atouts et ses contraintes que sont la transformation et la vente directe », remarque Bertrand Jamet du Crédit agricole Centre Loire. Pour Richard Baber du Crédit mutuel du Limousin, les ateliers créés pour dégager un complément de revenu doivent être bien réfléchis sur le plan de l’organisation du travail et de la structure de l’exploitation si l’on veut obtenir un résultat. « La solution magique qui permettra de faciliter la transmission d’exploitation en viande bovine n’est pas encore trouvée. Le crédit d’impôt, l’allongement des durées de prêts ne sont que des palliatifs au problème de fond qui est la rentabilité du capital. Mais il existe une certaine marge de progrès grâce au progrès technique. » La productivité du travail, la maîtrise des coûts de production, l’amélioration génétique, la productivité numérique du troupeau… cela permet de gagner quelques pourcents de rentabilité des capitaux.

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