Entretien des haies : comment éviter la prolifération des adventices en bordure ?
Un bord de haie mal géré peut favoriser la prolifération de certaines adventices : des moyens existent pour éviter ce salissement tout en favorisant la biodiversité utile au sein de la haie et de sa bordure.
La bordure enherbée d’une haie peut-elle être un refuge à adventices, et en particulier de plantes vivaces comme des chardons ? Ces espèces indésirables peuvent profiter d’une mauvaise gestion du bord de la haie pour y proliférer. « Si la plantation des arbres et arbustes est mal préparée avec une bande laissée à nu, les adventices peuvent s’y développer avec des chénopodes, des chardons, des liserons…, prévient Arnaud Deltour, conseiller en agroforesterie à la chambre d’agriculture du Nord – Pas-de-Calais. Il faut anticiper en semant cette bande enherbée suffisamment tôt. Nous conseillons le trèfle blanc qui produit un couvert très dense. » Ce couvert tient le même rôle qu’un paillage en apportant de l’humidité au pied des arbres et en empêchant des adventices de se développer.
« Pour notre territoire de la Champagne crayeuse, nous recommandons l’implantation d’un mélange de graminées et de légumineuses (voire de fleurs sauvages) au niveau de la banquette herbeuse de part et d’autre de la haie, présente de son côté Solène Allart, de la Fédération départementale des chasseurs de la Marne (FDC51). Cette composition est stable dans le temps, couvre bien le sol et empêche des espèces indésirables de se développer. »
Attention aux dérives de produits sur la bande enherbée
En plus d’empêcher le développement d’adventices, un couvert est implanté en bordure de haie dans l’optique de favoriser la biodiversité. « Sur notre territoire, nous installons des haies avec 1,5 mètre de banquette herbeuse de chaque côté. Cela fait partie de notre cahier des charges. Cette bande favorise le développement d’une faune utile comme des insectes auxiliaires des cultures ou servant à alimenter les oiseaux », explique Solène Allart. La bande enherbée constitue aussi une zone de nidification de certaines espèces et la bande apporte de l’espace pour le développement de la haie proprement dite.
La présence d’adventices en bordure de haie peut être due à des applications de produits mal contrôlées : « Les problèmes d’adventices comme des ronds de chardon dans une bande enherbée viennent souvent de la parcelle cultivée elle-même. S’il y a une dérive du désherbage mettant la haie à nu, cela peut faire basculer du mauvais côté la banquette herbeuse », remarque Solène Allart. Il faut éviter les dérives de traitements sur la bande enherbée. Si on désherbe accidentellement une partie de celle-ci, des adventices se développeront dans les espaces où ne subsiste plus le couvert végétal d’origine.
Tout comme les traitements phytos, l’application d’engrais ne doit pas déborder sur les bandes enherbées. « Les dérives d’azote favorisent généralement les graminées au détriment des légumineuses et des fleurs », observe Solène Allart.
Pas d’herbicides contre les adventices en bordure de haie
Si une vivace comme du chardon commence à envahir la bordure enherbée malgré tout, Arnaud Deltour conseille la destruction manuelle ou mécanique au gyrobroyeur. « On doit intervenir juste avant la floraison du chardon. À ce stade, la plante n’a plus suffisamment d’énergie pour repartir du pied. » Précision : les herbicides tels le glyphosate ne sont pas autorisés pour un usage en bordure de haie pour détruire les ronds d’adventices.
Dans tous les cas, la bande enherbée nécessite un entretien mécanique régulier pour contenir la végétation et empêcher la haie de trop s’élargir avec le repiquage d’arbustes ou le développement de ligneux d’une façon plus générale. Un broyage pourra être réalisé en dehors de la période de reproduction des animaux. « Il est possible d’intervenir au printemps jusqu’à fin mars début avril et à partir de la fin juillet en été », conseille la spécialiste de la FDC51.
Quant au semis de la bande enherbée, il sera réalisé idéalement quand le sol est chaud, entre août et début septembre ou au printemps en avril quand les terres sont réchauffées. Les semences de couvert adaptées aux bordures de haies se trouvent facilement chez les distributeurs agricoles ou peuvent être fournies par des organisations comme les fédérations de chasseurs.
Un paillage possible avec du matériau biodégradable
Le paillage est une autre technique pour, entre autres, limiter le développement des plantes indésirables au niveau d’une jeune haie. Conseiller arbre et biodiversité à la chambre d’agriculture des Pays de la Loire, Emmanuel Montailler présente les différentes formes que peut prendre ce paillage avec du matériau biodégradable : un biofilm en rouleau (fibre végétale…), déroulé avant la plantation de la haie ou du matériau en vrac : paille, écorces, copeaux de bois… « La paille, qui ne doit pas être broyée ni désagglomérée, devra être appliquée à raison de 7 à 10 kg par mètre linéaire. Quant aux copeaux de bois, la couche devra faire au moins 15 centimètres d’épaisseur », conseille-t-il.
Le paillage permet de limiter les pertes en eau du sol, d’éviter son tassement, de réguler la température du sol et de l’enrichir pour certains en se décomposant. Le choix du paillage est conditionné à la disponibilité du matériau à proximité, à sa faisabilité de mise en œuvre en termes d’équipements et de personnel et à son prix. Faute de végétation, ces dispositifs se révèlent peu accueillants pour la biodiversité au contraire d’une bande enherbée.
Avec une éventuelle présence d’adventices en bordure, la croissance des ligneux dans la haie finit par en limiter le développement. « Leur ombre suffit à contenir ces plantes, observe Arnaud Deltour. Généralement, les adventices ne posent pas de problème au niveau de la haie au-delà des trois ou quatre premières années. »
Une abondance d’adventices limitée en paysage bocager
Les haies sont souvent perçues comme des sources de mauvaises herbes. Mais une étude des haies bocagères menée par des chercheurs français montre le contraire. Elle s’est basée sur l’échantillonnage de 74 parcelles cultivées dans des paysages plus ou moins denses en haies en Bretagne. Les haies favorisent la diversité végétale comme celle des adventices mais pas leur abondance, et aussi bien en agriculture conventionnelle que biologique. Surtout, le développement des adventices les plus compétitives est limité.