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[Interview] Amandine Muret Béguin : « Les réseaux sociaux ne remplacent pas le contact humain »

Amandine Muret Béguin est agricultrice et engagée dans la défense de son métier en tant que présidente des JA Ile-de-France Ouest. Elle est aussi femme d’agriculteur et mère de famille. Elle communique sur Twitter et considère que les réseaux sociaux peuvent aider les agriculteurs dans leur métier. Elle conseille cependant de les utiliser avec vigilance et de garder le contact humain. Sociale sur les réseaux et sociable sur le terrain, c’est peut-être ainsi que l’on peut résumer la démarche de communication de cette « AgriMama ».

Pour Amandine Muret Béguin, la communication passe par les réseaux sociaux et quelquefois la télévision. Le 13 avril 2021, elle était sur le plateau de Terra terre, une émission de la chaîne Public Sénat.
© Capture écran Public Sénat - Emission Terra terre « Agriculteur, un métier d’avenir ? » disponible sur YouTube

Amandine Muret Béguin est installée en agriculture depuis 2017. Au total, elle exploite environ 200 ha, en étant trois fois associée : avec son frère, avec son père et avec son oncle. Un parcours en agriculture au féminin, sur trois exploitations différentes. La jeune agricultrice des Yvelines cultive du blé, de l’orge de printemps et d’hiver, du colza et des pois protéagineux. Et son histoire de famille agricole ne s’arrête pas là puisque son mari est lui aussi agriculteur. Elle vit ainsi sur une ferme qui pratique la vente directe grâce à un système de distributeurs automatiques et consacre une partie de son temps à la commercialisation des légumes de l’exploitation et de viande et fromage pour des producteurs partenaires. Sa profession très prenante l’a menée aussi vers un engagement syndical. La jeune femme active a été élue en 2020 présidente des Jeunes Agriculteurs (JA) Ile-de-France Ouest. Et ce n’est pas tout. Quand elle parle de son métier, l’agricultrice militante parle aussi de ses deux jeunes enfants qui sont souvent à ses côtés, même quand elle travaille. C’est cette réalité qu’elle présente aussi sur les réseaux sociaux. Sa façon à elle de promouvoir l’agriculture française. Témoignage.

Pourquoi êtes-vous sur les réseaux sociaux ?

Amandine Muret Béguin - « Parce que je pense qu’il y a une méconnaissance incroyable du grand public sur nos pratiques. Beaucoup de nos détracteurs ne connaissent pas, voire diabolisent, notre métier. Souvent, quand on leur explique, les gens disent " ce n’est pas du tout ce que je pensais ". »

Sur quels réseaux êtes-vous présente ?

A. M. B. - « Je suis sur Facebook, mais surtout en privé, dans mon réseau d’amis. Pour communiquer en tant qu’agricultrice, je suis surtout sur Twitter, plus parlant pour notre métier que Facebook et qui touche tous les milieux parce qu’il y a moins d’algorithmes. Je suis aussi sur Facebook pour la partie commercialisation en vente directe sur l’exploitation de mon mari. En revanche, Instagram, je n’arrive pas à m’y faire. »

De quel post diriez-vous que vous êtes fière ?

A. M. B. - « Ce n’est pas un post en particulier mais les tweets où je montre comment j’arrive à être maman en étant agricultrice. Ce n’est pas facile. On ne peut pas avoir toujours quelqu’un pour garder les enfants. Il m’arrive d’être avec eux dans le tracteur un dimanche. Au moment des moissons, il arrive qu’ils dorment dans la moissonneuse. Je suis fière d’être une sorte d’AgriMama. »

 

Quelles sont vos meilleures audiences ?

A. M. B. - « C’est quand je poste une photo en situation avec mes enfants justement que je fais les meilleures audiences. Il y a aussi les photos prises lors d’émissions de télé. En tant que femme et présidente de syndicat, je suis souvent sollicitée. Le post sur La Quotidienne sur France 5 a fait beaucoup de clics. J’ai été sélectionnée aussi pour être un des portraits d’agricultrices et d’agriculteurs qui ont été exposés sur les grilles de l’assemblée nationale. J’ai posté une photo de l’événement qui a été vue aussi par un grand nombre d’internautes. »

Vous-est-il arrivé d’avoir un bad-buzz en tant que présidente des JA idf ouest ?

A. M. B. - « J’ai déjà reçu des messages d’insultes via les réseaux sociaux mais c’est en général quand ils m’ont vue dans les manifestations, en tant que présidente régionale des JA. Je n’ai pas subi de mauvaises réactions à mes tweets. J’essaie de ne pas être dans la provoc pour éviter les messages d’insultes en retour. J’en ai eu au départ mais je n’en ai plus. »

Regrettez-vous quelque chose dans votre communication ?

A. M. B. - « De ne pas en faire plus ! Sinon, rien. Ni ce que j’ai posté sur les réseaux sociaux, ni les émissions de télé auxquelles j’ai participé, même si certaines fois j’avais peur d’y aller. Je n’ai jamais subi la désinformation, avec montage ou déformation de mes propos. C’est toujours ce que je voulais faire passer comme message qui a été retranscrit. »

« Quand on leur explique, les gens disent souvent : " ce n’est pas du tout ce que je pensais ". »

Y-a-t-il des retombées qui vous ont amusée ?

A. M. B. - « Quand j’ai été suivie par Julien Denormandie, j’ai été surprise et amusée. Être likée par le ministre de l’Agriculture, c’est une belle forme de reconnaissance. 300 " J’aime " pour une photo où j’étais sur mon tracteur, postée pour la Journée internationale de la femme, ça m’amuse aussi. »

Qu’est-ce qui vous marque ou vous énerve sur les réseaux sociaux ?

A. M. B. - « Ce qui m’énerve, ce sont les gens haineux. C’est très facile de balancer des insultes sur les réseaux sociaux. Je ne comprends pas comment des gens derrière leur clavier peuvent proférer des menaces et nous traiter d’empoisonneurs. Je trouve ça triste. Ce n’est tellement pas notre but. On est là pour nourrir la population. C’est cette image positive que je veux montrer. »

Avez-vous un modèle sur les réseaux sociaux ?

A. M. B. - « Il y a 2 – 3 personnes qui communiquent sur Twitter qui sont pour moi des exemples. Mais mon modèle, c’est Clément Torpier, le président des JA pour toute la région Ile-de-France. Il trouve les mots et les photos pour faire de bonnes publications. Il a la bonne manière de montrer la fierté des agriculteurs qui pratiquent leur métier. Pour moi, c’est un très bon communicant qui a de l’avenir dans ce domaine. »

 

Quel a été votre déclic pour vous lancer ?

A. M. B. - « J’ai démarré en 2014 mais je ne me souviens pas trop pourquoi j’ai commencé. Sans doute parce que depuis longtemps, j’estime qu’il ne faut pas refuser quand on a l’occasion de communiquer sur le métier d’agriculteur. Sur les réseaux sociaux, ça ne pose pas de problème. Sur les plateaux télé, quand c’est trop politique, je n’y vais pas, mais quand il s’agit de valoriser notre métier, je veux y aller, en tant que femme agricultrice. »

Combien de temps passez-vous sur les réseaux sociaux ?

A. M. B. - « Pour la communication sur mon métier et l’activité de vente directe avec les casiers automatiques, je dirais en moyenne 2 h par jour. »

Quels conseils donneriez-vous à une agricultrice ou un agriculteur qui veut se lancer ?

A. M. B. - « De protéger sa vie privée. De ne jamais trop en dire, de ne pas dévoiler le lieu de la ferme par exemple. De bien maîtriser sa communication en restant vigilant. De faire attention aux visages sur les photos, il y a des dérives sur les réseaux sociaux. Je donnerais aussi le conseil d’expliquer des choses simples. Si je parle avec des sigles, je perds l’oreille attentive. Si je parle du prix du blé qui a augmenté et de la baguette qui va augmenter et aussi du prix du blé très bas avec un prix de la baguette qui ne descend pas, ça accroche mieux.  Je dirais aussi à ceux qui veulent se lancer que les réseaux sociaux sont des outils qui peuvent vraiment nous aider mais que ça ne remplacera pas le contact humain. Communiquer avec un clavier, il n’y a pas d’émotion dans tout ça. Il n’y a rien de mieux que de discuter avec les gens. Les réseaux sociaux, c’est une carte postale avec un ciel toujours bleu. J’invite les gens dans leur village à aller voir les agriculteurs. La plupart d’entre eux ne connaissent pas notre métier. Ils imaginent l’agriculteur un peu bourru qui va les envoyer bouler. Ce n’est pas le cas, la porte est ouverte. Avant le confinement, par exemple, j’accueillais des classes sur mon exploitation. Il y a des agriculteurs installés depuis très longtemps, bien souvent au centre du village, avec du matériel, des tracteurs qui circulent. Nous sommes au cœur de la vie d’un village et nous sommes assez sociables pour recevoir et expliquer notre métier… et bien souvent l’histoire de famille qui va derrière. » 

« Je ne comprends pas comment des gens derrière leur clavier peuvent proférer des menaces et nous traiter d’empoisonneurs. »

Retrouvez toutes les interviews des agriculteurs communiquant sur les réseaux :

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