Interview
Projet d’accord USA - Aides PAC en baisse - Prix en chute «Les éleveurs bovins-viande ne laisseront pas passer !»
Jean-Paul Thénot, Président de la section bovine de l’UDSEA

La situation en production viande bovine semble particulièrement préoccupante en ce moment. Pour quelle raison ?
Effectivement, les éleveurs sur le terrain sont totalement désorientés et excédés par l’environnement négatif auquel ils sont confrontés. Trois raisons alimentent leurs inquiétudes. Il y a d’une part la venue du Président Obama à Bruxelles le 26 mars qui va accélérer le processus d’accord de libre-échange, pourtant inacceptable dans son volet viande bovine. Au-delà d’un discours lénifiant, ni les parlementaires ni l’Etat français ne se mobilisent réellement pour l’empêcher.
De son côté, le ministre de l’Agriculture continue de tergiverser sur les arbitrages PAC. Et « dans ses cartons », les options en préparation aboutissent à de sévères impacts sur les soutiens aux éleveurs bovins-viande, contrairement aux engagements pris.
Enfin troisième raison d’inquiétude : la pression à la baisse sur les prix des bovins s’accentue, emmenée par une Grande distribution qui vient de terminer les négociations commerciales avec une logique de guerre des prix comme seul tableau de bord. Cette vision passéiste destructrice tourne le dos à la supposée volonté de qualité et de proximité.
Les coûts de production des producteurs culminent toujours à des niveaux très élevés. Ils sont notamment calculés à 4,50 euros par kg/carcasse en Jeunes bovins. Or, cette catégorie menace d’être entrainée, à la suite des femelles en fin d’année dernière, dans une spirale de baisse du prix. Le niveau moyen est pourtant d’à peine 3,80 euros kg/carcasse payé éleveur.
Que pensez-vous de la création récente du Comité Export viande bovine ?
La création de ce Comité Export viande bovine, que la FNB a activement demandée, est une « pierre à l’édifice ». Mais il faut maintenant des résultats concrets et urgents. La confiance en l’avenir doit se bâtir avec une filière aval qui arrête de gémir et se projette dans les marchés mondiaux. Les places seront réservées aux ambitieux. Il faut que les industriels s’affranchissent de leur vision étroite « marché intérieur ». Ce n’est pas aux seuls producteurs de prendre des risques et de se restructurer.
Quant au marché national et européen, il y a aussi du travail et sans doute « du ménage à faire ». Les éleveurs veulent voir le logo « Viandes de France» dans les linéaires et en restauration. Et l’aval ne peut continuer à brader le Jeune bovin à prix cassés par rapport au marché italien, ni à jouer au plan national chaque jour plus encore une politique de prix bas dans un jeu complice avec la Grande Distribution. Les abatteurs doivent croire aux valeurs que portent nos produits, au lieu de nous emmener collectivement dans le mur !
Cette situation ne peut durer. La Fédération Nationale Bovine prépare d’ailleurs pour les prochaines semaines un «plan de bataille» sur les prix à la production. Et elle appelle les entreprises de la filière à la plus grande responsabilité.
Ces sujets seront abordés dans le détail lors de la prochaine section bovine de l'UDSEA qui se tiendra le 8 avril prochain.