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Vinification : ils récupèrent le CO2 fermentaire pour remplacer le CO2 fossile

Récupérer le CO2 fermentaire pour le réutiliser ultérieurement sur site : ils l’ont fait et ça fonctionne ! Mais l’investissement nécessaire reste un frein.

<em class="placeholder">chai avec cuves équipées d&#039;un système de récupération de CO2</em>
Les 24 nouvelles cuves du Château Grand Puy Lacoste sont équipées pour capter le CO2.
© Château Grand Puy Lacoste

Chaque hectolitre de vin vinifié dégage 8 à 10 kg de CO2. Même si ce CO2 est d’origine non fossile, la question de sa récupération titille les esprits. Quelques pionniers se sont équipés du système proposé par W platform, entreprise installée dans le Bordelais. « C’est très satisfaisant de se dire qu’une partie du CO2 émis par nos cuves sert à économiser de l’eau », confie Amélie Chatin, propriétaire du château Respide, dans les Graves, qui récupère le CO2 pour la troisième année sur six cuves.

<em class="placeholder">module d&#039;injection de CO2 dans l&#039;eau</em>
Le module CO2 water réinjecte le CO2 dans le réseau d’eau. © Château Respide
Au château Respide, le gaz capté est principalement évacué vers l’extérieur, ce qui améliore la sécurité des personnes à l’intérieur du chai. Mais pendant deux jours chaque année, une partie est récupérée et stockée. Le CO2 est ensuite réinjecté dans le réseau d’eau via le module CO2 water, pour rincer les cuves après détartrage. « Avec cette eau à pH 5,5, la neutralisation est beaucoup plus rapide et économise 40 % d’eau, selon nos mesures. Je suis très satisfaite, c’est un système très intelligent. Malheureusement un peu onéreux compte tenu de la conjoncture de la viticulture actuellement », résume Amélie Chatin.

Inerter en réduisant les émissions de gaz à effet de serre

<em class="placeholder">système de captage de CO2</em>
Il faut compter environ 1 000 euros pour équiper une cuve. © Château Respide
« Il faut compter environ 1 000 euros pour équiper une cuve du matériel de captage du CO2 » indique Matthieu Planté, cofondateur de W platform. Le traitement du gaz, quant à lui, est à partir de 25 000 euros. Il faut en effet analyser, sécher, filtrer et comprimer. Des sommes à mettre en relation avec un prix du CO2 fossile entre 1 à 2 euros le kilo actuellement, mais qui fluctue beaucoup et connaît des ruptures d’approvisionnement.

Hugo Drappier, du Champagne Drappier, en est à sa seconde vendange avec le système de captage CO2 winery. « Nous avons envisagé cette installation dans le cadre de notre démarche globale de réduction de nos émissions de GES, témoigne-t-il. Comme nous vinifions aussi avec peu de soufre, nous devons protéger nos vins et nous consommions un peu de CO2 d’origine fossile que nous achetions. » Une partie du CO2 fermentaire était déjà récupérée de manière artisanale depuis une cuve en fermentation pour inerter une cuve voisine. En 2023, à l’occasion d’une extension de cuverie, l’équipement fixe des quinze cuves supplémentaires a été décidé.

« Nous avons gagné en autonomie, ce qui fait partie de nos objectifs »

<em class="placeholder">bouteilles de stockage de CO2 et de réutilisation</em>
Le CO2 est stocké dans quatre bouteilles de 50 kg, puis réutilisé par le biais de petites bouteilles de 10 kg, plus maniables. © Champagne Drappier
Le CO2 est capté, analysé, traité et stocké dans quatre bouteilles de 50 kg. Puis il est réutilisé par le biais de petites bouteilles de 10 kg, plus maniables quand il s’agit de les déplacer dans le chai. « L’idée est très bonne mais nous essuyons un peu les plâtres sur le plan pratique », reconnaît le vigneron, qui demeure satisfait de s’être équipé. Cet investissement lui est revenu à environ 50 000 euros, pour une économie annuelle estimée à 3 000 euros.

<em class="placeholder">Hugo Drappier</em>
« L’étape ultime serait de revendre le CO2 en captant davantage », imagine Hugo Drappier en Champagne. © DR
Seule une partie du CO2 produit est captée, car les besoins du domaine sont très inférieurs à la production totale. « Pour l’instant, cela nous a coûté plus cher que ce que nous coûtait l’achat de CO2. Mais nous avons gagné en autonomie, ce qui fait partie de nos objectifs. L’étape ultime serait de revendre le CO2 en captant davantage », imagine Hugo Drappier, qui souligne : « dans ce dossier, nous ne sommes pas uniquement guidés par l’aspect économique, c’est plutôt la dimension éthique qui nous intéresse ».

« Extraire le CO2 de la zone de travail ? Une évidence à laquelle nous n’avions jamais pensé »

Le Château Grand Puy Lacoste, grand cru classé à Pauillac, en Gironde, vient d’équiper les 24 cuves de son nouveau cuvier pour capter le CO2. Pour l’instant, le gaz est évacué vers le parc arboré à l’extérieur, même si tout a été prévu pour la phase suivante de réutilisation. La première vendange vient de se terminer. Tout a bien fonctionné.

Lire aussi : comment éviter toute intoxication au CO2 dans les chais

<em class="placeholder">cuve équipée d&#039;un système de récupération de CO2</em>
Le gaz est évacué vers l’extérieur, un plus pour la sécurité des personnes. © Château Grand Puy Lacoste
« Avant, nous récupérions le gaz d’une cuve en fermentation pour en inerter une autre, mais nous n’avions jamais pensé à évacuer le CO2 de la zone de travail », confie Christel Spinner, directrice technique du château, très satisfaite de cette nouvelle étape pour la sécurité des personnes. À terme, elle souhaiterait réutiliser le CO2 prioritairement pour acidifier l’eau de nettoyage, afin d’en améliorer l’efficacité et économiser l’eau. La tuyauterie est en place, le local est prévu. La programmation de l’investissement complémentaire dépendra de la reprise des marchés.

Capter puis injecter du CO2 pour remplacer un remontage ou un bâtonnage

Vivelys propose un système de captage et réutilisation du CO2 à des fins œnologiques : Scalya up. Pendant les fermentations, le CO2 capté est séché, compressé, puis il peut être réinjecté dans les cuves de vinification pour favoriser l’extraction des moûts issus de raisins rouges. Selon l’intensité du traitement, il se substitue à un remontage ou à un pigeage. Le CO2 peut aussi être utilisé pendant l’élevage des vins blancs pour remplacer un bâtonnage ou maintenir un niveau de CO2 dissous.

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Selon Vivelys, sa technologie à base de CO2 est plus économe en énergie qu'un équipement de pompes pour un remontage automatisé. © Vivelys
« Le budget dépend totalement du nombre de cuves et de la configuration de la cave », indique Laurent Fargeton, directeur du développement chez Vivelys, car une part importante de l’investissement concerne l’installation des réseaux d’aspiration et d’injection. En revanche, « bien que plus chère à l’investissement, cette technologie s’avère plus économe en énergie sur le moyen terme qu’un équipement de pompes pour un remontage automatisé », complète-t-il. La seule puissance nécessaire est celle des compresseurs (5,5 kW), soit la puissance de deux à trois pompes, selon leur débit.

Anthony Appollot, directeur général délégué de Sarments Vignobles, en Gironde

« Avec le débit variable, nous avons gagné en finesse sur nos vins »

Capter le CO2 des cuves et le réinjecter avec un débit variable pour qu’il se substitue au travail de remontage : tel est le principe de l’appareil qu’Anthony Appollot, directeur général délégué de Sarments Vignobles, vient de codévelopper avec l’entreprise CMA. L’intérêt ? Gagner du temps et en qualité sur les vins. « Faire un remontage avec une pompe sur une cuve de 80 hectolitres prend 30 minutes au minimum. Avec cet appareil, c’est 5 minutes par remontage », comptabilise Anthony Appollot. Un gain de temps qui suffit à lui seul à rentabiliser l’appareil.

<em class="placeholder">appareil CMA pour capter le CO2 et faire des remontages</em>
Avec un débit variable, l'extraction peut être modulée. © A. Appollot
Mais le deuxième effet, non moins intéressant, est l’impact qualitatif positif sur les vins, avec plus de finesse, des tanins plus souples. Les essais ont eu lieu l’an dernier au Château de Lussac, une des propriétés du groupe familial. « Nous avions déjà un appareil de ce type, mais le débit n’était pas ajustable. Avec cette version, nous faisons varier la pression avec laquelle le CO2 est injecté : plus forte en début de fermentation, plus douce à la fin. Et le gain a été très net sur le profil des vins », souligne le directeur.

<em class="placeholder">remontage </em>
Le gaz est renvoyé sous pression dans la cuve. © A. Appollot
L’appareil se compose d’un extracteur qui capte le CO2 via un tuyau positionné au-dessus du chapeau de marc. Le gaz est stocké dans une petite cuve tampon, puis renvoyé sous pression dans la cuve. L’opérateur contrôle le système depuis le haut de la cuve à l’aide d’une télécommande. L’appareil devrait être mis sur le marché cette année. Anthony Appollot envisage déjà une amélioration pour son cuvier. « Nous réfléchissons ensemble pour installer ce système en statique, branché sur les douze cuves, avec une programmation pour automatiser les remontages. »

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