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Vers des chais bioclimatiques

La maîtrise thermique de la vinification et du stockage des vins à un coût énergétique réduit était au cœur des échanges du 18e forum œnologique de Davayé le 5 février dernier en Bourgogne. Voici les principaux enseignements.

L’œnologie moderne est incontestablement consommatrice d’énergie. Et cela tend à s’accentuer avec le réchauffement climatique, qui contraint certaines régions à récolter pendant les chaleurs du mois d’août. Les coûts financiers et environnementaux induits ne peuvent plus être ignorés. Construire des bâtiments de vinification et de stockage dont les températures ambiantes varient peu est donc un enjeu de plus en plus important. Cette démarche est au cœur de l’architecture bioclimatique qui propose de construire avec le climat et non contre le climat. Au-delà des solutions techniques, elle repose sur du bon sens et beaucoup d’observation. « L’idée est de construire en fonction de l’usage que l’on compte faire du bâtiment, tout en se fixant des objectifs environnementaux », déclare Guillaume Guerlot, gérant de la société de conception de chais Seturec Moe. Il faut également observer l’environnement dans lequel s’intégrera la construction et se poser les bonnes questions. Où est le nord ? Le terrain est-il en pente ? Y a-t-il une nappe phréatique ou une source d’eau à proximité ? « On peut vouloir enterrer une partie de la cave, pour travailler par gravité et faire vieillir les vins, note Guillaume Guerlot. Mais s’il y a un lac souterrain pas loin, ça va poser problème ! », s’exclame-t-il.

Toits et murs végétalisés, des isolants aux multiples bénéfices

L’isolant à l’intérieur du bâtiment, indispensable pour maintenir les températures constantes, est choisi au cas par cas. « Il doit avant tout être sélectionné en fonction de ses performances intrinsèques et de sa compatibilité avec le milieu dans lequel il sera installé », indique Laurent Provost, gérant du cabinet EnR’CO Conseils. Chanvre, laine de coton recyclée, lin, liège… aujourd’hui les isolants écologiques sont nombreux. Pensez toutefois à faire contrôler les matériaux utilisés pour la construction (isolants mais pas que) ou à demander les certificats pour éviter tout risque de contamination aux composés chlorés. Côté extérieur, les toits et murs végétalisés s’avèrent être des outils performants. « Ils permettent de maintenir une inertie thermique, en réduisant les radiations solaires et en régulant l’humidité ambiante par évapotranspiration », indique Joël Rochard, expert en développement durable. Ils contribuent également à améliorer la qualité de l’air, à développer la biodiversité et à faciliter l’intégration du bâtiment dans le paysage. Nombreuses sont les espèces végétales qui s’y développent sans difficulté. « Certaines lianes comme la vigne ou certains arbustes doivent être implantés avec un système antiracines. Il faut donc penser à les irriguer régulièrement », pointe néanmoins Joël Rochard. La mise en place d’un tel écosystème n’est toutefois pas si simple. « Pour éviter les infiltrations et les mauvaises surprises, mieux vaut s’entourer d’un cabinet compétent », prévient Laurent Provost.

La chaleur des fermentations, une énergie recyclable

Pour ce qui est de l’air ambiant, un système de ventilation mécanique est un gage de sécurité vis-à-vis de l’accumulation de CO2 et du maintien de la bonne hygrométrie dans les caves d’élevage. Sa défaillance peut engendrer le développement d’odeurs et de micro-organismes. « Aérer n’est pas ventiler », rappelle Guillaume Guerlot. Bien sûr toutes ces économies ne permettront jamais d’atteindre le niveau zéro en termes de consommation énergétique. Mais certaines actions de recyclage de l’énergie produite sur le domaine, par exemple la récupération de la chaleur issue des fermentations alcooliques, sont aussi à réfléchir. À noter que dans les systèmes d’attribution des subventions européennes, 12 points sur 20 valorisent le caractère environnemental du projet.

voir plus loin

Ce qu’il faut retenir sur les groupes de froid/chaud

Bien dimensionner son groupe de froid et de chaud, c’est déterminer le plus précisément possible les besoins de chaque atelier. Posez-vous les questions telles que « Combien de tonnes de raisins puis-je rentrer au maximum par jour ? Comment se répartit la production entre rouge, blanc et rosé ? Combien de jours durent les vendanges ? Y a-t-il des clarifications par le froid ? Par la suite, vais-je réaliser des stabilisations tartriques ?"
Mieux vaut dimensionner sur la fourchette haute pour encaisser les pics de puissance.
Il faut former le personnel au nettoyage régulier des échangeurs afin qu’ils restent le plus performants possible.
Ne pas négliger la maintenance des circuits frigorifiques. S’il n’y a pas de fuite dans le système, il n’y a pas de pollution.

Avis d’expert : Grégory Patriat, œnologue à la cuverie des Ursulines, Maison Boisset, Nuits-Saint-Georges, en Côte d’or.

Au pic de la canicule, nous ne sommes montés qu'à 19,5 °C dans le chai

« La rénovation de la cuverie des Ursulines, située en plein centre-ville, aura nécessité sept ans de réflexion et de travaux. Le lieu possède une dimension historique forte – c’est un ancien couvent – que nous souhaitions conserver et valoriser. Les caves d’élevage et l’espace de mise en bouteille sont enterrés. Au-dessus, le chai de vinification s’étend sur 1 200 m2 et prend la forme d’un dôme. Il est isolé grâce à des murs béton de 55 cm d’épaisseur renforcés par un isolant extérieur, le Foamglas, composé d’une plaque en verre cellulaire de 12 cm d’épaisseur. Un élastomère de 30 cm d’épaisseur recouvre le Foamglass et le revêtement extérieur est en pierre de Bourgogne. Sur le toit, nous avons implanté des vignes produisant du raisin de table. Un dispositif nommé Geogrip garantit le maintien de la terre sur une profondeur de 1 m et ce malgré une inclinaison du toit allant jusqu’à 47 %. Cela fait trois ans et il n’y a pas un gramme de terre qui a bougé. Un système de drainage installé en périphérie du toit récupère les eaux de pluie qui sont ensuite stockées dans quatre cuves de 5500 l. Cette eau sert non seulement à irriguer les vignes sur le dôme, mais également à nettoyer le sol dans le chai. L’été dernier, au pic de la canicule nous sommes montés à 19,5 °C. L’hiver, on est à peu près à 11 °C. Nous sommes toutefois équipés d’un groupe de froid de 80 kW de puissance et une chaudière de 36 kW qui alimentent le système de thermorégulation. »

 

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