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Retour sur dix ans de Deos, l'outil de Paetzold pour contrôler l'oxygénation des vins

L’équipement Deos, mis au point il y a une dizaine d’années par la société Michael Paetzold, a souvent donné des résultats intéressants en élevage mais ne s’est pas encore démocratisé, peut être en raison de son prix élevé.

C’est un petit bijou d’ingéniosité et d’efficacité pour les uns, un outil trop cher et pas indispensable pour les autres. Lancé en 2009, Deos permet de maîtriser les gaz au contact du vin pendant l’élevage, et notamment l’oxygène pour assurer une oxygénation contrôlée. Son principe repose sur la mise en vidange des cuves d’élevage, avec un creux (< 1%) que l’on vient combler avec un mélange contrôlé d’azote et d’air. Le même mélange est envoyé en fond de cuve via un tube. Il n’est pas diffusé en permanence mais « injecté » régulièrement en fonction de l’évolution organoleptique du vin : on compte en moyenne une dizaine d’injections pour l’élevage d’un vin rouge. Selon la société Michael Paetzold, la méthode permet un élevage « doux », sans apport d’oxygène pur. On élimine d’abord les composés réducteurs, puis on ouvre les arômes jusqu’au profil souhaité, avec augmentation de la sucrosité.

Des arômes fruités plus précis

Nicolas Pejoux, directeur technique du Château Rauzan Gassies à Margaux © N. Pejoux

Testé sur une vingtaine de cépages, blancs, rosés, rouges, l’élevage Deos a souvent donné de bons résultats lors d’essais comparatifs. La précision des arômes fruités est mise en avant. « C’est particulièrement intéressant pour les vins mis rapidement en bouteille, cela évite qu’ils ne réduisent ensuite, notamment les rosés, pour lesquels nous avons pu mieux maintenir le thiolé, témoigne Giselle Elichiry œnologue à l’ICV Provence, après trois ans d’essais comparatifs. Sur grenache rouge nous avons mieux préservé le fruité, alors que les arômes ont souvent tendance à s’oxyder. » « On conserve l’aromatique plus longtemps, on préserve de l’oxydation et on évite la réduction », confirme Nicolas Pejoux, directeur technique du château Rauzan Gassies à Margaux en Gironde, un convaincu qui a acquis deux appareils. « Nous avons comparé l’élevage Deos à un élevage en barrique de deux ans, on gagne davantage en rondeur, les tanins ressortent plus soyeux, on n’a pas la sécheresse du bois. »

Un investissement coûteux à amortir

Les résultats ne sont cependant pas toujours aussi flagrants. Aux vignobles Despagne dans l’Entre-Deux-Mers, le Deos acheté en 2010 est remisé depuis sept ans. « C’était intéressant mais depuis, nous avons travaillé la qualité de nos raisins à la vigne et nous faisons aussi bien avec un élevage classique bien maîtrisé. » Le gain en qualité ne justifie pas toujours l’investissement. Il faut dire que l’appareil n’est pas donné : 25 000 € pour un Deos Pro, un coût qu’il faut pouvoir amortir. « S’il était à moitié prix, il serait déjà acheté, témoigne Olivier Ciosi, œnologue responsable de cave à Louérion dans le Lubéron. Nos essais ont été concluants : il apporte un petit plus mais sans lui on obtient aussi une qualité suffisante pour notre gamme. Nous avons d’autres priorités d’investissement. » L’œnologue estime l’élevage Deos plus doux, plus précis et moins risqué que la micro-oxygénation mais moins structurant.

La possibilité d'inerter à l'azote séduit

Deos a également des adeptes pour sa fonction inertage, qui évite l’ouillage des cuves. C’est le cas de Fabien Duperray, du domaine Jules Desjourneys dans le Beaujolais, un convaincu qui inerte ses gamays vingt-deux mois sous Deos, de la fin des vinifications à la mise en bouteille, avec parfois un soutirage. « Je n’ai plus du tout le stress que j’avais avec les cuves à plafond mobile et je préserve mon travail effectué en vinification. Il suffit de faire un contrôle avec l’appareil tous les quinze jours. » Seuls bémols : « On consomme beaucoup d’azote et le vin perd un peu de CO2. » Le vigneron désoxygène également ses vins avant mise en bouteille : « je peux descendre à moins de 0,1 mg/l d’oxygène dissous, ce qui limite nettement mes quantités de SO2 total ».

Un outil jugé simple à piloter

D’un point de vue pratique, l’appareil s’adapte aux cuves existantes sous réserve qu’elles soient assez hermétiques. Il est souvent jugé assez simple à piloter. Il est également utilisé pour gérer les assemblages après élevage en fût, carboniquer, voire décarboniquer, si les cuves supportent les variations de pression.

Malgré ces atouts, les ventes n’ont pas explosé. Michael Paetzold annonce avoir vendu « une petite centaine d’appareils » en France, surtout en Bourgogne et dans le Bordelais, et surtout pour des vins milieu et haut de gamme, et une poignée à l’étranger.

La nano oxygénation en résumé

On parle de « nano oxygénation » car la quantité d’oxygène envoyée par Deos est de 5 à 60 nanogrammes par ml de vin selon les vins. L’élevage débute par l’inertage à l’azote de l’espace de tête de la cuve puis par une désoxygénation totale du vin. L’apport contrôlé d’oxygène se fait via le mélange azote-air (≈1 % d’air), alors injecté et homogénéisé. Il suffit de programmer la dose d’oxygène voulue et Deos calcule les proportions azote-air à injecter en fonction du volume de vin et de celui de la cuve. L’azote provient d’une bouteille ou d’un générateur, il est mélangé à l’air ambiant stérilisé (aux UV). Une sonde analyse la teneur en oxygène du ciel gazeux. Les doses d’O2 et l’intervalle entre deux injections sont décidés selon l’évolution organoleptique des vins.

L’appareil est mobile et peut gérer une trentaine de cuves. Depuis 2019, Michael Paetzold ne propose plus qu’une seule version : le Deos Pro, qui assure élevage et inertage, homogénéisation, désoxygénation, carbonication et décarbonication. Le process est automatisé avec mémorisation des données.

Témoignage : Joël Duffau, vigneron Château La Mothe du Barry (Gironde)

« On préserve le fruité »

« J’ai équipé mes dix cuves avec Deos. Cela me permet d’élever mes rouges sur lies, sans soutirage. J’apporte une dose faible d’oxygène, 20 ng/ml, tous les quinze jours environ pendant trois mois pour éliminer la réduction, tout en brassant les lies. J’espace ensuite un peu les apports les trois mois suivants en fonction de la dégustation. Je gagne du temps par rapport à un élevage classique avec soutirage. Et depuis je n’ai plus de réduction en bouteille sur mes vins jeunes, le fruité est préservé et j’ai pu diminuer mes doses de SO2 à moins de 55 mg/l en total. Le seul bémol est le coût en azote : environ 1 000 € par an pour 1 500 hl. »

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