Aller au contenu principal

" Plus besoin d’herbicide entre les rangs "

Didier Scohy, viticulteur à Urville dans l’Aube, utilise du miscanthus pour pailler ses interrangs. Si les résultats positifs se poursuivent, il envisage de produire sa propre matière première.

C’est une plante peu connue, mais qui fait la satisfaction d’un grand nombre de professionnels. Le miscanthus géant est une graminée originaire d’Asie, dont les caractéristiques (forte production de biomasse) sont exploitées depuis une quinzaine d’années dans divers secteurs, tels que l’énergie ou l’élevage.

Didier Scohy, viticulteur champenois, a imaginé un usage pour la vigne. « L’idée m’est venue en visitant une ferme expérimentale, où il y avait des parcelles de miscanthus en production, explique-t-il. En voyant le broyat, je me suis dit que cela pourrait faire un paillis intéressant. » Car le viticulteur s’est lancé récemment dans la viticulture durable : une partie de son parcellaire entre dans la composition d’une cuvée au cahier des charges « zéro herbicide et insecticide ».

Après avoir essayé le ray-grass, le pâturin, l’enherbement naturel ou encore le travail du sol sans être pleinement convaincu, Didier Scohy a donc décidé de tester le mulch, espérant ainsi maîtriser les adventices. En 2016, il réalise son premier essai, sur une parcelle qui n’est pas en sélection. Il commande un camion de onze tonnes de miscanthus broyé et séché à la société francilienne Biomasse Environnement Systèmes, au prix de 114 euros HT la tonne. Une matière qu’il épand un interrang sur deux sur 70 ares, soit un ratio d’environ 15 tonnes par hectare.

Le viticulteur obtient ainsi un paillage de 10 à 15 centimètres d’épaisseur, sur une largeur de 50 centimètres, qu’il entend laisser en place deux ans. Le rang est quant à lui désherbé chimiquement dans un premier temps. « À l’issue de la première année, j’étais entièrement satisfait, assure-t-il. Le paillis a rempli son rôle. Malgré le printemps humide, je n’ai pas eu besoin d’intervenir. »

D’un point de vue pratique, le miscanthus ne cause pas de problème au viticulteur. « Il n’y a pas de souci de portance, au contraire, c’est souple et agréable quand on marche. Le broyage grossier fait que l’enjambeur ne glisse pas », analyse-t-il. Pas de problème notable non plus au niveau des dégâts de gibier, malgré le fait que le miscanthus, véritable éponge, garde la fraîcheur.

Moins de liserons sous le miscanthus

Lors de notre visite en juillet 2017, le paillage s’était déjà bien tassé, et l’on commençait à voir contre la terre de nombreux champignons, signe de la décomposition avancée. Nous avons d’ailleurs noté quelques salissures, entre autres de pissenlit et de liseron. Mais pour l’instant ce dernier « pousse toujours moins sous le mulch que sous le rang » constate le viticulteur.

Début mai 2017, Didier Scohy a renouvelé l’expérience sur 70 ares supplémentaires, séduit par les résultats préliminaires. Cette année, il s’est fourni en matière première directement chez un agriculteur aubois, au tarif beaucoup plus intéressant de 70 euros HT la tonne.

Il a commandé une journée d’épandage à un prestataire, qui utilise le même matériel que pour les écorces, et facture 750 euros l’hectare. « Tout compris, cela me revient à 2 600 euros par hectare pour deux ans » calcule le viticulteur. Un coût qu’il compte encore faire diminuer à l’avenir, en cultivant son propre miscanthus. Car c’est l’une des raisons qui l’a poussé à tester ce produit : c’est une plante à rhizome facile à produire, qui ne souffre aujourd’hui d’aucun ravageur et ne nécessite quasiment pas d’entretien. « Il faut compter 4 000 à 4 500 euros par hectare à la plantation, pour une production annuelle de 15 tonnes, pérenne sur une quinzaine d’années, ce qui serait rentable pour moi », estime Didier Scohy.

Mais avant de se lancer, le viticulteur souhaite poursuivre ses observations. « Pour l’instant, je n’ai pas vu de différence sur la végétation ni sur le rendement. J’ai réalisé une analyse de sol avant de commencer, j’en referai une au bout de 5 ans. S’il n’y a pas de souci agronomique je pense continuer à pailler tous les ans ou tous les deux ans », conclut-il.

Repères

SUPERFICIE 3,13 hectares

TYPE DE SOL calcaire

ENCÉPAGEMENT chardonnay, pinot noir et pinot meunier

AOP champagne

ENTRETIEN DU CAVAILLON désherbage chimique ou mécanique

ENTRETIEN DE L’INTERRANG alternance paillage et enherbement 1 rang sur 2

PRIX DU MISCANTHUS 2 400 euros HT/ha pour deux ans

TEMPS D’ÉPANDAGE une journée pour 70 ares, un interrang sur deux

Tous les articles de notre dossier "Paillage de la vigne" :

Les paillages, une fausse bonne idée ?

« Attention à ne pas encrasser les sols »

« La paille crée un amendement organique »

Le BRF conserve l’humidité

" Plus besoin d’herbicide entre les rangs "

 

Les plus lus

Le Skiterre se compose de deux grands skis qui assurent le contrôle de la profondeur et de la position de la lame.
« Le Skiterre, un outil intercep simple et productif »
Vignerons en Anjou, Nicolas et Christophe Moron se sont équipés d’un outil de travail du sol intercep Skiterre.
Vigneron plantant une nouvelle parcelle avec des pieds de Pinot noir dans la vallee de la Marne en AOC Champagne.Droit de plantation.
Quand FranceAgriMer exaspère les viticulteurs

FranceAgriMer joue un rôle essentiel dans l’attribution des aides. Face aux dossiers chronophages, aux contrôles…

Pellenc - Un robot à chenilles dans les vignes

Pellenc dévoile un robot à chenilles pour les vignes, le RX-20.

Le Dyna-Drive est un outil de travail du sol auto-animé réalisant un mulchage en superficie.
« Le Bomford Dyna-Drive est un outil interrang entre le rolofaca et le rotavator »

Jérôme O’Kelly utilise depuis quatre ans un outil de travail du sol auto-animé.

Chargement d'un camion citerne de la coopérative viticole CRVC (Coopérative régionale des vins de Champagne) enlèvement d'une cuvée chez un vigneron adhérent durant les ...
Vin en vrac acheté à prix abusivement bas : que peut changer la condamnation de deux négociants bordelais

En pleine crise viticole, un jugement se basant en partie sur un article issu de la loi Egalim vient de condamner deux…

Taille de la vigne avec le sécateur électrique viticole sans fil Mage Sam 25, fonctionnant avec batterie au Li-ion, à Mâcon, dans les vignes du Vitilab, en octobre 2022
Lutte contre le gel : « Il faut réserver la taille tardive aux parcelles viticoles les plus gélives et pas trop chétives »

Benjamin Bois, chercheur à l’institut universitaire de la vigne et du vin Jules Guyot, en Bourgogne, a travaillé sur la taille…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Vigne
Consultez les revues Réussir Vigne au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters des filières viticole et vinicole