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Dans l'Ain : « Les liens en osier pour attacher la vigne ne nous coûtent que du temps »

À Vaux-en-Bugey, dans l’Ain, Céline et Thierry Tissot ramassent leurs osiers, qu’ils utilisent lors du liage de la vigne. Reportage.

<em class="placeholder">Photo de Céline Tissot, vigneronne en Bugey, pose dans ses vignes.</em>
Céline Tissot, vigneronne en Bugey, participe à la récolte familiale des osiers, qui seront utilisés pour les vignes.
© X. Delbecque

Écologique, économique… et instagrammable ! À l’heure de lier les vignes, Céline et Thierry Tissot, vignerons à Vaux-en-Bugey, dans l’Ain, perpétuent la tradition. « Le geste s’est transmis en famille pendant cinq générations. Mon beau-père n’a jamais rejeté la modernité, mais tant qu’une technique marche, pourquoi en changer ? », retrace Céline Tissot.

 Dès la taille de la vigne terminée, les deux vignerons ne remisent pas tout de suite leurs sécateurs électriques, et filent s’occuper des saules. Ils montent en haut du village sur une petite parcelle de quelques ares où le père de Thierry Tissot a planté les arbres il y a une quarantaine d’années. « Auparavant les osiers étaient disposés en tête de rangs de vigne. Tant que les parcelles étaient travaillées au cheval ça ne dérangeait pas », glisse la vigneronne. Une dizaine de saules conduits en têtards donnent des branches d’un jaune flamboyant : les repousses de l’année procurent l’osier qui sera utilisé pour attacher les vignes.

Seules les ramifications secondaires sont gardées pour le liage

Cette taille est toutefois bien moins laborieuse que celle des vignes, puisqu’elle ne prend qu’une demi-journée et que le travail se fait à hauteur d’homme ! Les branches sont rassemblées en fagots, ramenées au domaine et stockées au frais dans une bâche ou une couverture. À la faveur d’un creux dans le planning, les vignerons débitent ensuite ces fagots. Des heures qui, cumulées, doivent représentent deux ou trois demi-journées.

 « Nous ne gardons que les ramifications secondaires, qui font 2 à 3 millimètres de diamètre, détaille Céline Tissot. Et déjà rien qu’avec cela nous en avons largement assez pour nos vignes ! Les rameaux principaux, eux, partent au compost. » Ces brins, longs de 50 centimètres en moyenne, sont utilisables tels quels pour le liage, et ne subissent pas de préparation particulière. « Le tout c’est qu’ils ne sèchent pas, sinon ils deviennent cassants et il n’est plus possible de les plier », prévient la vigneronne.

Lier avec un brin d’osier demande d’acquérir un léger coup de main. Une fois le sarment rapproché du fil, il s’agit d’encercler le tout avec le brin puis d’entortiller ce dernier de quelques tours, replier le premier bout par-dessus et couper le deuxième. « C’est relativement dur, mieux vaut un couteau bien aiguisé ! », conseille Céline Tissot. Une fois sec, le lien devient d’ailleurs d’autant plus résistant, et assure son rôle sans aucun problème. Si le geste est réalisé correctement, il n’y a aucune raison pour que la ligature ne se desserre ou ne se détache. Thierry Tissot, habitué depuis toujours, avance à un rythme tout à fait normal et réalise un travail tout aussi rapide qu’avec une pince à lier mécanique. Il s’accroche un petit fagot à la ceinture, et un brin d’osier peut lui faire plusieurs pieds.

Un matériau 100 % biodégradable facile à gérer lors de la taille suivante

« Comme nous n’avons que deux hectares sur les cinq qui sont conduits en guyot, et que nous faisons le liage nous-même, la mise en œuvre de cette pratique n’est pas pénalisante », estime Céline Tissot. Au contraire. Les quelques heures annuelles passées à préparer l’osier permettent l’économie d’un attacheur, dont les modèles électriques les plus courants flirtent avec le millier d’euros, et des bobines de fil. « Le seul entretien des saules est un coup de débroussailleuse au printemps, après ils vivent leur vie. Ça n’est pas bien contraignant », relate la vigneronne. 

Mieux encore, le lien est on ne peut plus écologique et biodégradable ! À la taille, les deux vignerons n’ont qu’à donner un coup de sécateur sur le brin d’osier et n’ont aucun remords à le laisser par terre. Et comme le jaune vif des liens a un côté très esthétique, Céline Tissot ne se prive pas pour faire quelques belles photos qui vont alimenter les réseaux sociaux, notamment Instagram et Facebook. C’est un moyen efficace pour mettre en avant le savoir-faire et la philosophie du domaine. La communauté est d’ailleurs très réceptive : ces publications génèrent toujours plusieurs dizaines d’engagements. Preuve s’il en est que l’on peut concilier traditions et modernité !

 

 
<em class="placeholder">Capture d&#039;écran de lien en osier sur Instagram</em>
Le liage à l'osier est un bon moyen pour le domaine de communiquer sur son savoir-faire traditionnel, comme ici sur Instagram. © C. Tissot

Céline et Thierry Tissot

Superficie 5 hectares
Encépagement altesse, chardonnay, gamay, jacquère, mondeuse
Dénominations AOC bugey et roussette-du-bugey, IGP coteaux-de-l’Ain
Entreprise individuelle + 1 salariée + saisonniers
Production 250 hl/an en moyenne
Commercialisation particuliers, cavistes/CHR et export
Prix caveau TTC entre 12 et 15 euros

 

 
<em class="placeholder">Vigneron en train de tailler un saule pour faire des liens en osier</em>
Thierry Tissot a acquis la méthode de ses parents, et poursuit de la même manière. © C. Tissot

Le mode d’emploi a été inventorié en Beaujolais

Le Collectif de la Pierre de Saint Martin, association beaujolaise œuvrant à Vauxrenard, dans le Rhône, a réalisé un recueil patrimonial sur l’usage de l’osier dans la viticulture locale. Dans la région, les brins étaient employés pour relever la vigne et l’attacher aux échalas. Plusieurs espèces de saules pouvaient être utilisées (Salix fragilis, Salix viminalis…), mais les vignerons se servaient généralement du saule blanc (Salix alba), peu intéressant en vannerie.

Après la récolte, les rameaux latéraux étaient élagués, les plus petits étant utilisés en l’état, mais les plus gros ainsi que les rameaux principaux étaient fendus en deux, trois ou quatre pour obtenir des grosseurs identiques. Au XXe siècle sont même apparues de petites machines motorisées pour fendre les osiers. Tous ces brins étaient ensuite conditionnés en fagots et remisés dans un endroit frais. Au moment du relevage, il n’était pas rare que les bois aient séché. Les vignerons les mettaient alors à tremper dans de l’eau, froide ou bouillante pour aller plus vite, les rendant souples à nouveau et prêts à être utilisés.

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