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Le désherbage mécanique du cavaillon en questions

De nombreuses questions pratiques se posent lors du travail du sol de la vigne avec des interceps. Nous en avons compilé plusieurs au fil de nos reportages. Voici les réponses des conseillers.

L’avantage des interceps passifs, ou auto-animés, est leur faible consommation énergétique. Mais attention à ne pas intervenir lorsque l'herbe est trop développée.
© Jean-Charles Gutner

Quel est le préalable au désherbage mécanique du cavaillon ?

« On l’oublie trop souvent, mais le travail du sol sous le rang nécessite de reprendre le b.a.-ba de l’établissement de la vigne », prévient Loïc Pasdois, conseiller agro-équipement à la chambre d’agriculture de la Gironde. Il convient de vérifier le bon état du palissage, la présence de tuteurs et de marquants et l’inclinaison des piquets de bout de rang. « De même, l’espace entre pieds doit être d’au moins 80 centimètres, sinon les interceps auront du mal à travailler », poursuit-il.

Comment organiser son cycle et quand débuter le travail ?

Le travail du sol doit être raisonné dans son ensemble et non opération par opération. Pour bien faire, les travaux doivent débuter en hiver, soit en post-vendange, soit en février-mars. Pour sa part, Christophe Gaviglio, de l’IFV Sud-Ouest, préconise plutôt un passage en février-mars, pour détruire la flore hivernale avant l’explosion printanière. Mais certains vignerons préfèrent passer après les vendanges afin de casser la levée automnale.

Pour sa part, Loïc Pasdois raisonne selon le type de sol : il préconise un passage en février sur les sols légers et graveleux. Et un labour à l’automne, un peu plus profond, sur les sols lourds et compactés. Quoi qu’il en soit, ce passage hors saison est primordial, car il facilite le travail au printemps. « Les outils sont ainsi plus rapides et efficaces », relève Christophe Gaviglio. Au total, il faut au minimum prévoir entre trois et cinq passages par an.

Les outils passifs ont-ils un intérêt ?

Logiquement, l’avantage des interceps passifs, ou auto-animés, est leur faible consommation énergétique. Ils fonctionnent bien lorsque l’herbe n’est pas trop développée. Mais dès que l’on se laisse déborder, il faudra passer sur un intercep ayant davantage de puissance.

Mieux vaut-il opter pour un tâteur mécanique ou hydraulique ?

Le choix se fera en fonction du temps que l’on peut consacrer au travail du sol. L’hydraulique permet d’avoir une réactivité plus importante sur les sols les plus difficiles comme les argilo-calcaires ou les sols très sales. De même, il permet une plus grande flexibilité selon les conditions météorologiques : l’intercep arrivera à s’effacer même sur un sol un peu mouillé, et il arrivera à ré-entrer même dans les sols un peu secs. Mais dans les vignobles bien implantés, avec peu de manquants, le mécanique fonctionne très bien. C’est un système fiable, robuste et simple à régler.

Le choix d’un outil polyvalent est-il judicieux ?

De nombreux constructeurs proposent actuellement des outils polyvalents : ils se composent d’un porte-interceps avec pivot, sur lequel s’installent plusieurs « embouts » allant de la lame à l’intercep rotatif ou même au rolofaca intercep. C’est par exemple le cas d’Actisol avec l’Acticep Hydro Lame, de Boisselet avec sa gamme Biomatic se montant sur le Servo-moteur, de Braun avec son LUV modulaire, de Clemens avec le Radius SL Plus, ou encore d’Egretier avec le Mini-Sillon. Ils ont l’intérêt d’alléger l’ardoise puisqu’une fois l’équipement de base acquis, il n’y a « plus » qu’à racheter l’outil supplémentaire.

Néanmoins, Loïc Pasdois met en garde : « il n’y a pas d’outil polyvalent au top sur tout, estime-t-il. Par exemple, le constructeur Boisselet propose une large gamme d’outils adaptables sur le Servo-moteur de la gamme Biomatic. Les outils rotatifs et charrues sont efficaces alors que la lame offre une qualité de travail perfectible (en comparaison avec autres lames interceps du marché). De même, l’embout charrue d’Egretier fonctionne très bien, tandis que l’embout lame est moins bien. À l’inverse, la lame de Braun est très performante, simple d’utilisation et de réglage mais lorsque l’on souhaite transformer la lame en charrue décavaillonneuse, son utilisation demande alors une certaine technicité en termes de réglages, l’embout charrue est moins efficace ». Si vous optez ce type d’outil, attention donc à bien tester l’ensemble des accessoires que vous comptez employer avant de passer à l’acte.

Quel est le débit hydraulique nécessaire ?

Tout dépend du type d’intercep. Les outils animés étant équipés d’un système d’effacement hydraulique nécessitent environ 30 l/min, ce qui implique l’ajout d’une centrale hydraulique. À l’inverse, les petites houes rotatives peuvent s’en passer. Quant aux outils n’employant de l’hydraulique que pour l’effacement, ils consomment moins de 10 l/min.

Comment gérer le travail en pentes et en dévers ?

Dans ces configurations de parcelles, le désherbage mécanique du cavaillon est particulièrement ardu. Loïc Pasdois insiste sur la tolérance à l’herbe, qui est nécessaire sur ce type de parcelles. Il conseille un travail superficiel avec des brosses (de type Naturagriff, Boisselet ou Herbanet), pour éviter toute fuite de terre. Ou même, d’expérimenter d’autres types d’entretien du sol, comme de l’enherbement couplé à de la tonte sous le cavaillon, et des engrais verts dans l’interrang.

Pour sa part, dans les dévers, Christophe Gaviglio recommande un travail à cheval sur le rang. C’est le cas avec un enjambeur, mais aussi avec le châssis Acolyte de Boisselet, qui est muni d’une correction de la profondeur et d’une de dévers.

Par ailleurs, certains outils disposent de corrections latérales. Mais en montage par paire, « cela pose le problème du réglage au retour, car il faut l’inverser par rapport à celui de l’aller », souligne Christophe Gaviglio. Une question étudiée par certains constructeurs, à l’image de Souslikoff, qui a intégré la fonction demi-tour dans ses réglages. D’autres fournisseurs, tels que CMB, disposent d’un suivi de sol permettant de s’adapter au dévers lorsqu’il est raisonnable. Quant à Dominique Lefevre, créateur de la société marnaise Deverlame, il est allé jusqu’à installer une correction de dévers à l’intérieur du pivot de sa lame.

Dans le cas des pentes, en revanche, peu de solutions existent. « S’il n’y avait pas eu l’arrivée des herbicides, ces parcelles n’auraient sûrement pas été implantées ainsi, poursuit le conseiller. Il faut donc gérer la terre différemment, car avoir des outils adéquats ne règle pas tout. Il faut aussi remonter la terre qui s’érode. »

Comment éliminer la petite motte de terre qui se forme dans l’interrang sans détruire l’enherbement ?

La question n’est pas tant d’éliminer le monticule, que d’éviter de le former. Pour Christophe Gaviglio, la création d’une motte est le signe que l’opérateur est intervenu de manière trop profonde. « Le but est de passer dans de meilleures conditions de sol, explique-t-il, afin que les adventices ne soient pas très développées et que leurs racines ne créent pas de grosses plaques de terre. » Il est également possible d’associer son intercep à un disque arrière, utilisé en tant que déflecteur.

« Ce type de montage est notamment proposé chez Braun, poursuit l’expert. On a un disque ouvreur qui délimite la zone du cavaillon de la zone interrang enherbée, puis un disque incurvé qui rabat la terre sous le rang. » Certains constructeurs proposent par ailleurs de petits déflecteurs métalliques, à l’image de Naturagriff ou de Boisselet, ou encore des bavettes. « J’ai également vu un vigneron en vigne étroite, qui a monté une dent de griffe rigide sur son enjambeur, et y a ajouté à l’arrière une cornière parallèle au sol, qui rabat la terre », confie quant à lui Loïc Pasdois.

Comment buter tout en conservant assez de surface plane dans l’interrang pour passer en tracteur ?

Buter dans des vignes à 1,50 m de largeur interrang peut être une opération compliquée. Dans ce cas-là, les spécialistes recommandent de créer un buttage peu prononcé. Cela peut être réalisé à l’aide de disques lisses, crénelés ou émotteurs, de diamètre 300, qui passent au plus près des souches. On peut également opter pour les lames les plus courtes du marché, en réglant l’angle d’attaque à 30 ou 40° vers l’arrière. Enfin, il est possible de découper un versoir ou de ne travailler qu’avec un soc qui prend de petits volumes de terre.

Combien ça coûte ?

Le désherbage mécanique du cavaillon est bien plus onéreux qu’un désherbage chimique, vu que le temps de travail est supérieur. Christophe Gaviglio l’estime entre 2 et 2,5 fois plus glouton en vignes larges, et entre 3 et 5 fois en vignes étroites. À cela s’ajoute le fait qu’en moyenne, il est quasi utopique de vouloir entretenir plus de 15 hectares (voire 20 en conditions favorables) mécaniquement avec un seul trio chauffeur-tracteur-intercep. Et sur un vignoble mal adapté et avec des outils trop agressifs, les rendements sont affectés pendant environ quatre ans après la transition du chimique au mécanique.

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