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Gel : l’assurance de l’exploitation est intéressante mais insuffisante

Être ou ne pas être assuré ? Telle est la question que se posent de nombreux vignerons. Voici le retour de ceux que nous avons interrogés.

L'assurance permet d'être couvert contre les pertes financières liées aux aléas climatiques.
L'assurance permet d'être couvert contre les pertes financières liées aux aléas climatiques.
© Réussir SA

« En cinq ans, cela va faire la troisième fois que je suis indemnisé », se félicite Gilles Sipeyre, vigneron gardois à Cannes-et-Clairan. Exploitant sur 36 hectares d’IGP et 2 hectares d’AOC, il réalise généralement de bons rendements. « Je suis en taille rase, j’irrigue et 90 % de mon vignoble a moins de 20 ans », détaille-t-il. Il tourne donc aux alentours de 110 hl/ha. Grâce à cela, l’assurance constitue pour lui une bonne solution, vu que le chiffre de référence pour l’indemnisation est la moyenne olympique (moyenne des rendements des cinq dernières années, sans le plus haut ni le plus bas).

Rentable sur des parcelles gélives à gros rendements

« Les remboursements que j’ai eus suite aux gels de 2017 et 2019 m’ont largement payé les cotisations d’assurance des vingt dernières années », assure-t-il. Sans compter ceux attendus suite au gel de ce printemps, qui devraient se monter à environ 140 000 euros pour son exploitation, vu le très faible rendement. « Il y a une franchise, c’est vrai. Mais tout se calcule. Sans l’assurance, je serais très très mal, confie-t-il. Sans compter qu’être assuré permet de mieux dormir. »

Même écho chez Simon Pérot, jeune vigneron à Ternon, dans le Beaujolais. « Je me suis installé en 2019 hors cadre familial, relate-t-il. Je n’avais pas de stocks et des finances limitées. L’assurance m’a semblé incontournable. » Et ce d’autant plus qu’en étant jeune installé, le rendement de référence est celui de l’appellation. Un choix qu’il n’a jamais regretté depuis. « La première année, j’ai gelé et grêlé à 60 %, la seconde à 50 %, retrace-t-il. Sans l’assurance, j’arrêterais déjà mon activité. »

Le rendement moyen des cinq dernières campagnes est en chute

Mais voilà. Ce calcul de l’assurance, basé sur les rendements des cinq dernières années, est de moins en moins intéressant. « Avec un aléa tous les deux ans environ, je n’atteins pas les rendements autorisés », regrette Sébastien Rouger, vigneron à Vouvray.

Il estime néanmoins que l’assurance est indispensable, avec les pertes qu’il connaît. Indispensable mais insuffisante : il est en train de s’équiper d’une tour antigel, les deux dispositifs étant à ses yeux « complémentaires ». De son côté, Stéphanie Morin, du domaine de la Rodaie, à Saint-Nicolas-de-Bourgueil, n’est pas convaincue par l’assurance : « cela nous permet certes de toucher des indemnités, mais pas d’alimenter nos marchés. Nous préférons opter pour un système de lutte contre le gel ». Simon Pérot compte lui aussi investir, mais dans des filets anti-grêle, tout en continuant à s’assurer. « Mais si les aléas se poursuivent et que mon rendement de référence baisse trop, le remboursement ne sera plus énorme », déplore-t-il.

Privilégier un fonds de solidarité paysan ?

De plus, les dernières évolutions de l’assurance en découragent plus d’un. « Mon contrat a augmenté de 42 % pour 2022, rapporte un vigneron alsacien. Je viens de le résilier. À la place, je vais mettre la cotisation sur un compte et utiliser le VCI. Cela devrait faire l’affaire. » Sébastien Rouger et Gilles Sipeyre fustigent eux aussi une hausse de la franchise de l’ordre de 10 %, même s’ils ne comptent pas résilier leur assurance pour autant.

Mais tous lorgnent du côté des propositions de la Confédération paysanne et aimeraient bien les voir devenir réalité. Cette dernière suggère en effet de créer un fonds professionnel, mutuel et solidaire au niveau national, encadré par les pouvoirs publics (État + Europe) qui participeraient à son financement. « Ce fonds apporterait une couverture universelle de toutes les fermes, c’est-à-dire une couverture de base de tous les risques climatiques pour toutes les cultures, y compris lorsqu’elles sont diversifiées, peut-on lire dans le communiqué de l’organisme. Le niveau de cotisation serait acceptable pour toutes les fermes, sans écart marqué entre les différentes productions. Un taux de subvention de 65 % serait appliqué en remplacement de la subvention actuelle aux assurances privées. » À voir si ce vœu pieux devient réalité…

 

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